L’année 2022 sera-t-elle l’année du tournant ? Celle non plus seulement de la prise de conscience – dans une partie de plus en plus large de l’opinion – de l’impact du réchauffement climatique qui conduit à des phénomènes de plus en plus fréquents et intenses (canicules, sécheresses, incendies), mais celle du passage à l’action ? Car ce que nous pensions réservé à quelques contrées lointaines d’Asie ou d’Afrique touche désormais de plein fouet notre pays. Les récents feux de forêt, dont celui de la Teste-de-Buch en Gironde qui a ému les Français, montre bien qu’il n’y a pas qu’en Californie ou en Grèce où les pompiers sont confrontés à des murs de flammes de dizaines de mètres de hauteur. Et ces villages qui se retrouvent privés d’eau au robinet ne sont pas des bleds asséchés au Maghreb mais bel et bien des bourgs du Var ou de la Drôme…
L’eau justement, ressource vitale mais aussi enjeu de souveraineté géopolitique, est peut-être LE sujet le plus urgent que l’humanité va avoir à traiter. Car la pénurie d’eau affecte quatre personnes sur dix dans le monde selon la FAO, l’organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, et pourrait donner lieu à des conflits là où elle se raréfie.
En France, où les agences de l’eau – et notamment celle de notre territoire, Adour Garonne – font un travail remarquable, la question de la gestion de l’eau se pose de façon un peu plus aiguë chaque année : comment gérer au mieux nos ressources en eau, fragiles et limitées, alors que les dernières études sur le climat font état dans un avenir proche d’une multiplication des sécheresses et d’une diminution des précipitations ? Le mois de juillet 2022 a été le mois de juillet le plus sec jamais enregistré depuis 1959 selon Météo-France et quasiment tous les départements ont pris des arrêtés de restriction de l’usage de l’eau.
Face à cette situation, il y a urgence à réfléchir collectivement et trouver le bon compromis entre des associations de défense de l’environnement qui prônent un changement écologique radical avec l’arrêt de l’irrigation agricole et la création de réserves intouchables pour la biodiversité, et le monde de l’agriculture qui réclame la construction de barrages ou de retenues collinaires pour faire face aux déficits de précipitation et aux sécheresses de plus en plus fréquents.
Trouver des compromis pour un partage juste, faire émerger des innovations pour mieux économiser cet or bleu, et aussi s’inspirer de ce qui se fait ailleurs. Dans son ouvrage « L’avenir de l’eau » (éditions Fayard), second volet de son « Petit précis de mondialisation », l’académicien Erik Orsenna avait entamé un tour du monde pour voir comment l’eau était gérée dans plusieurs pays. Il en avait tiré la conclusion que s’il faut penser global, il faut agir local. À nous de relever cet immense défi et trouver les solutions, pour aujourd’hui et pour demain.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du 2 août 2022)