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Affichage des articles du février, 2019

Retrouver l'esprit européen

Dans moins de trois mois, lors des élections de mai prochain, l'Europe va jouer son avenir. La construction européenne, qui a fêté ses 60 ans, se poursuivra-t-elle, avec les modifications nécessaires à un meilleur fonctionnement ? Ou va-t-elle se fracasser sur l'écueil des politiques nationalistes qui ne cessent de gagner du terrain ? Pour répondre à cette épineuse question, il faut sans doute prendre un peu de hauteur, sortir de l'actualité chaude – des atermoiements des progressistes qui peinent à s'allier comme des coups de menton et des provocations régulières des populistes – et revenir aux sources de la construction européenne. En 1952, sept ans seulement après une guerre mondiale qui ravagea l'Europe, entre en vigueur le traité de Paris, qui instaura la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), l'ancêtre de l'Union européenne. Dans « Une Europe fédérée », Jean Monnet, l'un des pères de l'Europe avec Robert Schuman, expli

Le coeur et la raison

« Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point. » La célèbre phrase de Pascal a ceci de particulier que l'on peut l'appliquer à bien des sujets autres que celui de la religion auquel le savant l'avait circonscrite dans ses « Pensées ». Par exemple au sujet des températures printanières – et quasi estivales – que l'on constate depuis quelques jours en France. Côté cœur, c'est tout simplement le bonheur de retrouver le soleil et la chaleur, comme un avant-goût de grandes vacances. Ce week-end, de Toulouse à Gruissan, de Montpellier aux Pyrénées, chacun a ainsi profité de ces rayons de soleil qui nous ont tiré de la grisaille et du froid de l'hiver. C'est peu dire que cela fait du bien, au moral… comme au commerce. Les cafetiers et même les glaciers ont retrouvé des couleurs sur leurs terrasses bondées et certains ont – presque – oublié les samedis de rideau baissé pour cause de manifestation de Gilets jaunes. Dépasser 20 °C en plein mois de

Derrière l'écran

La grand-messe de la téléphonie mobile, qui s’est officiellement ouverte hier à Barcelone, permet, année après année, de mesurer le poids croissant du secteur des télécoms. En termes économiques, culturels, sociétaux, et même politiques et géostratégiques, rarement une technologie aura conquis aussi rapidement une telle place, qui va encore aller en se renforçant avec l’intégration de plus en plus forte de l’intelligence artificielle. Rares sont ceux - à part quelques personnalités visionnaires comme Steve Jobs, l’emblématique PDG d’Apple et père de l’iPhone - qui, il y a une dizaine d’années, auraient imaginé l’importance que prendraient dans nos vies les smartphones. Après avoir progressivement remplacé tout un tas d’appareils du quotidien (de l’appareil photo à l’agenda papier, du GPS au lecteur de musique) et créé de nouveaux usages (réseaux sociaux, banque en ligne), le smartphone est devenu - pour le meilleur et le pire - notre meilleur compagnon, le boîtier qui renferme to

Sortir du diagnostic

En 1995, Jacques Chirac lance sa campagne présidentielle avec une expression qui sera son marqueur dans la course à l'Elysée pour ne pas dire son slogan : la fracture sociale. En 2003, un an après son élection face à Jean-Marie Le Pen, il reviendra d'ailleurs dessus, estimant que cette fracture sociale – contre laquelle il avait finalement peu fait durant son premier mandat – menaçait «de s'élargir en une fracture urbaine, ethnique et parfois même religieuse.» En 2004, le géographe Christophe Guilluy publie « Atlas des nouvelles fractures sociales », coécrit avec Christophe Noyé, puis en 2010, « Fractures françaises ». Deux ouvrages dans lesquels le chercheur explore le thème de la France périphérique, ces zones périurbaines qui s'étendent à l'ombre des grandes villes et jusqu'au milieu rural et qui prennent de plein fouet les conséquences de la mondialisation dont elles sont les perdantes. Avec un corollaire : cette France des invisibles se réfugie de plu

Prise de risque

L'annonce par Airbus de l'arrêt de son gros-porteur A380 n'est certes pas une surprise. Dans ces colonnes, nous disions déjà la semaine dernière combien le superjumbo était en sursis, ne répondant plus aux besoins des compagnies aériennes dans un marché mondial qui a profondément évolué ces dernières années. Avant de quitter l'entreprise après 28 ans dans l'aéronautique et la Défense, Tom Enders a donc préféré trancher clairement pour l'arrêt du programme, plutôt que de laisser perdurer un espoir illusoire de rebond ; et acter de fait un terrible échec commercial pour le plus gros avion civil du monde. Quand la production de l'A380 sera définitivement interrompue en 2021, seuls 250 exemplaires auront été vendus… Le président exécutif d'Airbus, qui laissera son siège à l'issue de l'assemblée générale du 10 avril prochain, reconnaît d'ailleurs que le lancement de l'A380 au tournant du siècle – qui aura coûté quelque 30 milliards d'

Colères

Le mouvement des Gilets jaunes, on l'a dit maintes fois est inédit. Inédit dans son mode d'action avec l'occupation de ronds-points et des manifestations hebdomadaires chaque samedi depuis le 17 novembre 2018 ; inédit par sa composition sociologique avec des femmes et des hommes qui s'estimaient – et s'estiment toujours – méprisés, oubliées et invisibles ; inédit par sa défiance radicale envers les élites, les politiques, les syndicats ou les médias. Mais ce mouvement est aussi inédit par ses conséquences directes sur la marche du pays. Certes, toute manifestation ou journée de grève recherche bien souvent la paralysie de l'activité comme moyen de pression pour faire avancer des revendications. Mais là où cette paralysie, orchestrée par des syndicats structurés, est habituellement limitée dans le temps, elle semble sans fin pour le mouvement protéiforme des Gilets jaunes. Depuis 13 semaines, en effet, les manifestations se succèdent, perturbant l'activ

Responsabilité

Le retrait prochain des troupes américaines de Syrie, tel un jeu de dominos, a des répercussions profondes, dont le retour dans l'Hexagone de quelque 150 jihadistes français dont des familles jusqu'à présent détenus en Syrie et en Irak. Ainsi, la France vient d'être contrainte de changer de doctrine à leur égard. Jusqu'alors, en effet, le gouvernement français s'était toujours opposé à leur retour – sauf pour les mineurs –, estimant qu'ils devaient être jugés sur place et y purger leur peine, sous réserve de bénéficier d'un procès équitable. Désormais, le rapatriement de ces ressortissants français est inéluctable, fut-il facilité par des avions américains. Le retour de ces jihadistes constitue ainsi un véritable défi pour la France, mais aussi un casse-tête politique face à l'extrême sensibilité de l'opinion publique sur le sujet. Car les Français restent durablement marqués par les attentats terroristes perpétrés par Daech sur notre sol, de

Symboles

La confirmation hier par la compagnie aérienne australienne Qantas qu'elle annulait la commande de huit Airbus A380 marque un nouveau revers pour le superjumbo du constructeur aéronautique européen. Un gros porteur dont la pérennité est désormais suspendue, sans beaucoup d'illusions, à une négociation avec la compagnie Emirates, qui avait passé une méga-commande de 36 A380. L'histoire semble désormais jouée et l'A380 va vraisemblablement – sauf surprise venue de Chine ou d'Inde – tirer bientôt sa révérence, devenant le symbole d'un terrible et douloureux échec commercial, mais aussi devenant une page importante de l'histoire aéronautique mondiale. L'échec, c'est finalement celui d'un avion mal-né qui a accumulé les déconvenues au moment même où le paysage aérien mondial s'est retrouvé chamboulé. L'idée de départ était pourtant séduisante : le plus gros avion commercial du monde avec ses deux ponts, ses quatre réacteurs, capable d

L'alerte

L'enquête sur le complotisme que viennent de publier la Fondation Jean-Jaurès et l'organisme Conspiracy watch est capitale dans le sens où elle permet de mettre des chiffres sur un phénomène ancien dont l'ampleur constitue désormais une réelle menace pour la démocratie, en France comme ailleurs dans le monde. Jusqu'à présent, les thèses complotistes restaient circonscrites à quelques cercles d'hurluberlus, particulièrement aux Etats-Unis où, au nom du premier amendement de la Constitution qui garantit une absolue liberté d'expression, tout un tas de théories ont pu se développer sans ambages. La Terre est plate, le monde est gouverné par la secte des Illuminati, les Américains ne sont jamais allés sur la Lune, etc. Une digue contre ces élucubrations avait été bâtie au fil des ans par la classe politique dans sa majorité et par les médias. Cette digue a commencé à se fissurer en 2016 au moment de la campagne électorale présidentielle américaine qui a vu l

Démocratie sociale ou directe ?

Le Grand débat national censé répondre à la crise des Gilets jaunes en est à peine au quart de sa durée que, déjà, c'est son issue qui occupe tous les esprits. Quelle peut-être la forme que prendra la restitution des milliers de contributions qui auront été collectées sur tout le territoire et sur internet ? Que décidera Emmanuel Macron pour présenter et expliciter ses choix actant, a-t-il promis, «des conséquences profondes» ? D'ores et déjà, deux pistes sont sur la table et, à dire vrai, deux visions de sortie de la crise. La première, horizontale, est l'organisation d'un Grenelle. L'évocation de ce simple mot convoque le souvenir de la sortie de crise de Mai-68. Du 25 au 27 mai 1968, le ministère des Affaires sociales, sis rue de Grenelle à Paris, accueille l'ensemble des organisations syndicales pour déboucher sur les accords éponymes historiques. Ces accords de Grenelle actent des avancées sociales majeures : hausse du Smic et des salaires, réduction

Fracture(s) numérique(s)

Lorsque l'on évoque la fracture numérique, on pense immédiatement à ces territoires ruraux, voire à certains quartiers urbains, qui ne bénéficient pas de connexions à internet à haute vitesse. Réseau mobile absent ou trop faible pour capter quoi que ce soit ; ADSL au débit anémique ; fibre optique absente : autant de handicaps pour les PME, les élus et les simples Français qui se sentent citoyens d'une seconde zone où les nouveaux usages numériques, économiques, éducatifs, administratifs ou ludiques leur sont compliqués voire interdits. Cette fracture-là est grave, certes, mais elle se résorbe petit à petit grâce à l'engagement – encore trop lent pour les Français concernés – de l'Etat, des collectivités locales et des opérateurs. Il est en revanche une autre fracture numérique, beaucoup plus discrète et pourtant capitale : la capacité de chacun à tirer parti d'internet pour profiter des services qui, jour après jour, deviennent incontournables dans une sociét

Concession(s)

La hausse annuelle des tarifs de péage, qui va grever un peu plus le budget des automobilistes, tombe au plus mal pour le gouvernement, qui tente de résoudre la crise des Gilets jaunes dont l'origine de la colère est, certes, liée au coût des carburants mais aussi, justement, au prix des péages. D'ailleurs, depuis le 17 novembre, les péages un peu partout en France ont été souvent pris pour cible, occupés pour des opérations «barrières levées» et pour certains incendiés comme à Narbonne. Elisabeth Borne, la ministre des Transports – qui connaît parfaitement le dossier pour avoir été directrice des concessions chez Eiffage en 2007 – a bien tenté d'amoindrir l'impact de cette hausse annoncée en demandant aux sociétés d'autoroutes de faire un effort. Las, ces dernières n'ont consenti que la mise en place de tarifs préférentiels sur les trajets domicile-travail. Une bien maigre concession… Car les sociétés d'autoroutes sont tout simplement dans leur bon

Le juste prix

Les Français qui vont faire leurs courses ce week-end vont constater une hausse significative des prix de certains produits alimentaires de grandes marques. Une hausse qui s'établit en moyenne à 6,3 % et qui est la conséquence directe d'une mesure-clé de la loi Alimentation qui entre en vigueur ce 1er février : les enseignes n'ont plus le droit de vendre à prix coûtant et le seuil de revente à perte est relevé de 10 %. Cette mesure a été prise pour tenter d'en finir avec la guerre des prix à laquelle se livrent les tout-puissants géants de la grande distribution et pour que, in fine, les producteurs soient enfin mieux rémunérés. Si l'intention était évidemment louable au moment de l'adoption de la loi, c'est peu dire qu'elle tombe mal. Alors que la crise des Gilets jaunes a démarré après la hausse de quelques centimes du prix du litre des carburants, la hausse de prix de nombreux produits alimentaires ne va-t-elle pas raviver l'exaspération des