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Affichage des articles du octobre, 2021

« L’oscillation au bord de l’abîme »

  En parler ou pas ? Pour la classe politique, de gauche à droite, pour la majorité présidentielle, pour les rédactions des médias nationaux ou régionaux, la question du traitement d’Eric Zemmour depuis qu’il grimpe dans les sondages d’intentions de vote à l’élection présidentielle constitue autant un casse-tête qu’un cas de conscience. En parler, c’est forcément alimenter la machine à polémiques et à clash, aux outrances et aux buzz sans limite savamment entretenue par le polémiste d’extrême droite, qui se complaît dans le confortable rôle du candidat pas encore déclaré ; et donc faire de lui l’épicentre de la campagne qui démarre. Ne pas en parler, c’est laisser se banaliser une kyrielle de contrevérités, d’approximations, de propos révisionnistes abjects, de mensonges et de provocations permanentes proférés par un bateleur habile, condamné pour incitation à la haine et qui, qu’on le veuille ou non, séduit une part de l’électorat français. Entre ces deux choix cornéliens – les mêmes

Pollution sans fin

Philippe Behra effectuant un prélèvement dans la cour d’école de Lastours, en avril 2019./Photo DDM P.C. La première étude scientifique indépendante sur la pollution en métaux et métalloïdes dans la vallée de l’Orbiel, qui vient de paraître, ne constitue, hélas, pas le premier signal d’alerte des conséquences de l’exploitation minière de la région de Salsigne, ni une surprise pour les connaisseurs du dossier ou les populations concernées qui se battent depuis des années pour davantage de transparence et d’informations. Mais elle représente, incontestablement, une terrible confirmation et le nouvel épisode d’une histoire sans fin qui mêle manquements des autorités, inquiétude des populations, enjeux de santé publique et de protection de l’environnement. Depuis l’arrêt en 2004 de l’exploitation de la mine de Salsigne – qui fut la principale mine d’or de France et la première mine d’arsenic du monde – des signaux d’alarme ont, en effet, été maintes fois tirés. En janvier 2006, notre journ

Nouveau monde

  Pendant les confinements de la crise du Covid-19, cette pandémie qui a mis l’économie mondiale à genoux comme jamais auparavant, nous nous sommes mis à rêver du jour d’après. Nous avons imaginé qu’allait advenir un monde nouveau qui corrigerait les excès de la mondialisation, mettrait au cœur de nos sociétés la solidarité dont nous avions fait preuve face au coronavirus, et déclencherait, sinon la décroissance illusoire, du moins une croissance raisonnée, verte et vertueuse, pour mieux lutter contre le réchauffement climatique et les inégalités sociales. Las ! Force est de constater que nous en sommes loin et que comme disait Antonio Gramsci, le penseur marxiste italien, « le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres »… Face à toute nouvelle avancée technologique, surtout lorsqu’elle s’accompagne d’un enthousiasme débridé, il convient bien sûr de prendre de la hauteur pour en mesurer les enjeux : « Le progrès de la vites

Comprendre pour protéger

  Le 9 janvier 2016, lors d’un hommage rendu aux victimes de l’attaque terroriste de l’Hyper Kacher, survenue un an auparavant, le Premier ministre Manuel Valls avait lâché avec l’aplomb dont il est coutumier : « Il ne peut y avoir aucune explication qui vaille. Car expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser. » Une petite phrase qui avait suscité un tollé auprès des chercheurs qui travaillent de longue date sur le terrorisme. Car évidemment, expliquer, ce n’est en rien excuser mais c’est chercher à comprendre quels sont les ressorts, les réseaux, les filières, les modalités, les moyens de radicalisation et leur évolution qui conduisent à des attentats. Et ce travail de décryptage permet justement de prévenir les attaques. « Connaître les causes d’une menace est la première condition pour s’en protéger », relevait d’ailleurs, à raison, un rapport du CNRS publié en mars 2016 (Recherches sur les radicalisations, les formes de violence qui en résultent et la manière dont les sociétés les

La fin d'un monde

Comment déclencher la prise de conscience des conséquences du réchauffement climatique ? Les rapports du Giec, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, se succèdent depuis 20 ans, toujours plus alarmants… mais trop souvent encore ignorés ou minimisés par les décideurs et une bonne part de l’opinion publique. La jeunesse se mobilise depuis plusieurs mois, défilant au gré des Marches pour le climat, faisant de Greta Thunberg sa porte-parole… mais elle reste, là encore, insuffisamment écoutée. Presque 200 Etats se sont engagés en 2015 à Paris à réduire, entre autres, leurs émissions de CO2 pour empêcher une hausse globale de la température de la Terre, lors de l’historique Cop21 organisée par la France… mais la mise en œuvre concrète peine toujours à se mettre en place ou reste à tout le moins insuffisante. Les initiatives locales se multiplient pour mobiliser les bonnes volontés autant que les solutions innovantes pour l’indispensable transition écologique – le

Tournants

La fin de la gratuité des tests de dépistage du coronavirus sans prescription médicale constitue un tournant dans l’épidémie de Covid-19 en France. Depuis mars 2020, en effet, les tests naso-pharyngés et leurs angoissants écouvillons étaient devenus le symbole de l’épidémie et de toutes les étapes de la crise sanitaire, de la pénurie mondiale de réactifs pour les réaliser à l’imbroglio bureaucratique pour autoriser les laboratoires vétérinaires à participer à l’effort de guerre des campagnes de dépistage ; des couacs dans l’organisation des tests salivaires à l’école aux difficultés de mettre en œuvre la contraignante stratégie tester-tracer-isoler… Après des débuts poussifs, au fil des mois, la France est pourtant devenue l’un des pays les mieux organisés, celui où l’on a le plus testé et surtout l’un de ceux qui ont toujours rendu gratuits les tests, pour ses citoyens et même pour ses visiteurs. Les Français se sont ainsi familiarisés avec les tests, lorsqu’ils avaient des symptômes,

Question de souveraineté

  La crise sanitaire mondiale de l’épidémie de Covid, on le sait, a bouleversé bien des certitudes et dans de nombreux domaines, plus rien ne sera comme avant. C’est particulièrement vrai dans le domaine de la santé. On se souvient qu’au début de l’épidémie, on s’est aperçu que la quasi-totalité des masques chirurgicaux étaient produits à l’étranger, hors d’Europe, en Chine principalement. Idem pour des médicaments aussi basiques que le doliprane. La mondialisation était passée par là sans que l’on ne s’en rende compte et pour des raisons de coût de production et donc aussi de rentabilité financière, les stocks ont disparu au profit d’un fonctionnement par flux. Un système qui fonctionnait plutôt bien mais il a suffi d’un grain de sable – en l’occurrence un coronavirus – pour que la belle mécanique se grippe et que l’on mesure l’importance d’être maître de sa production. Il s’agit là d’une question de souveraineté industrielle et médicale, à laquelle les citoyens sont d’autant plus sen

Les radars et le plateau

Depuis l’arrivée en 2003 des premiers radars automatiques de contrôle de la vitesse sur les routes françaises, le sujet est toujours aussi explosif, toujours aussi clivant et sujet à toutes les polémiques. Chaque fois que les cabines ont été modernisées et améliorées pour mesurer les excès de vitesse – des radars tronçons aux radars feux rouges en passant par les radars chantiers et les dernières tourelles ultra-perfectionnées – le débat sur le bien-fondé des radars ressurgit de plus belle. L’extension à tout le territoire des voitures-radars privées, dévoilée jeudi soir, ne va pas échapper à la règle, d’autant plus que ces radars mobiles de nouvelle génération fonctionnant 6 heures par jour week-end compris n’ont plus besoin d’un flash pour épingler dans le flux de la circulation les automobilistes pressés… Procédé utile pour renforcer la sécurité routière et faire baisser la mortalité dont la vitesse reste l’un des facteurs prépondérants, diront les uns ; pernicieux et implacable sys

Réalité et ressenti

  Les bons chiffres économiques s’enchaînent depuis quelques jours. Taux de chômage bientôt au niveau inespéré de 2008, prévision de croissance la plus forte de tous les pays européens, reprise économique de nombreux secteurs au fur et à mesure de l’allègement des restrictions anti-Covid : les voyants sont au vert et laissent espérer que l’onde de choc de l’épidémie de Covid-19 sur l’économie française commence enfin à s’éloigner. Certes, il reste encore beaucoup d’inconnues pour que ce qui ne sont, pour l’heure, que des prévisions ou des frémissements se confirment. En raison des perturbations de production et de logistique en Asie, des pénuries touchent toujours de nombreux secteurs (BTP, automobile, électronique mais aussi jouets, vêtements ou chaussures, agro-alimentaire), reposant la question de la relocalisation et de la souveraineté industrielle. Le niveau de notre dette, conséquence du salvateur « quoi qu’il en coûte », atteint des sommets jamais vus, et la perspective du retou

De l'électricité dans l'air

  En laissant entendre qu’il allait se prononcer en faveur des Small Modular Reactor (SMR), ces petits réacteurs modulaires nouvelle génération qui viendraient en appoint dans les centrales classiques, mais aussi qu’il allait prendre une décision sur la construction de futurs EPR, les centrales de 3e génération, sans attendre la mise en service de l’EPR de Flamanville – dont les délais et les coûts ont explosé – Emmanuel Macron rouvre de façon fracassante le débat sur le nucléaire en France et en fait l’un des thèmes majeurs de la prochaine campagne présidentielle. Car autour de ce dossier gravitent de multiples sujets, aussi clivants qu’importants pour notre pays : la science, la souveraineté industrielle et énergétique, le pouvoir d’achat, l’environnement... La science car le futur du nucléaire, dont la très attendue fusion, se dessine dans une course mondiale où la France, pionnière du nucléaire civil et puissance dotée de l’arme nucléaire, ne peut pas se permettre de laisser passer