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Articles

Affichage des articles du novembre, 2023

Regrets et vérité

  Jogging et regard noirs, large pull et cheveux blancs, elle s’avance lentement dans le box vitré des accusés de la cour d’assises des Hauts-de-Seine à Nanterre, hier, hésitante, comme apeurée par le crépitement des flashs des journalistes auxquels elle a consenti d’apparaître. Elle s’assoit, seule pour la première fois, sur le banc et baisse la tête, avant que son procès ne démarre. Cette fragilité apparente pourrait presque faire passer cette femme de 75 ans pour une pauvre petite chose, elle qui a jadis longtemps été considérée comme la victime soumise et manipulée de son mari. Mais Monique Olivier est aujourd’hui dans le box pour répondre de ses actes, accusée de complicité de Michel Fourniret dans les enlèvements et les meurtres de trois jeunes filles, Estelle Mouzin, Marie-Angèle Domèce et Joanna Parrish. Année après année, les enquêteurs ont acquis la conviction que si Fourniret, décédé en 2021, était l’ogre des Ardennes, elle en était bien l’ogresse, s’il était le baril de pou

Les déserts et le dogme

Les déserts médicaux ont-ils vocation à rester des marronniers, ces sujets d’actualité qui reviennent chaque année à la même période ? On serait tenté de le croire tant les déserts médicaux s’invitent régulièrement dans la presse, notamment chaque automne à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances de la Sécurité sociale ou ailleurs dans l’année lorsque des populations se mobilisent pour sauver ici une maternité, là un service d’urgence dans des départements isolés, ou lorsque des associations de patients ou d’élus publient enquêtes et rapports sur une situation qui s’enlise. Cette année 2023 ne fait, hélas, pas exception à la règle et deux grandes enquêtes viennent de montrer coup sur coup la persistance des déserts médicaux pour la médecine générale ou spécialisée. La première vient de l’Association des maires ruraux de France (AMRF). Après deux études sur les ruraux qui pâtissent d’une surmortalité (avril 2023) et d'un accès à la médecine de ville assez rare (novembre

Un tournant

Les images émouvantes des premières libérations d’otages israéliens détenus depuis le 7 octobre par le Hamas, apportent un immense soulagement pour leurs familles et leurs proches qui attendaient ardemment ce moment, mais aussi pour le monde. Car de nombreux pays ont, à un moment de leur histoire, été suspendus au destin d’un ou plusieurs otages. En France, chacun se rappelle des libérations des journalistes Philippe Rochot, Jean-Louis Normandin, Georges Hansen et Aurel Cornea, de Marcel Carton et Marcel Fontaine, Jean-Paul Kauffmann, Florence Aubenas, Sophie Pétronin ou Olivier Dubois. … L’insoutenable attente, la mobilisation de l’opinion, le retour en France sur le tarmac d’un aéroport et l’accueil par le président de la République ont toujours marqué, à raison, l’opinion. La libération des otages israéliens est toutefois différente par la barbarie qui en est à l’origine, par les conditions inédites qui la permettent et parce que seule une partie des 240 hommes, femmes et enfants ki

Entaché

Dix ans après son départ du gouvernement Ayrault, Jérôme Cahuzac, l’ancien ministre du Budget de François Hollande, envisage-t-il son retour en politique ? En tout cas l’intéressé, condamné en appel à deux ans de prison pour fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale, et frappé de cinq années d’inéligibilité, était hier sur le marché de Monsempron-Libos, non loin de Villeneuve-sur-Lot, la ville dont il a été le député et le maire.Fin octobre déjà il participait à une réunion, organisée à huis clos, quelques semaines après le lancement d’une association politique «Les amis de Jérôme Cahuzac». Récemment interrogé par Sud-Ouest pour savoir s’il préparait son retour politique, le septuagénaire, qui avait élu domicile en Corse où il pratiquait la médecine à l’hôpital de Bonifacio, s’est borné à répondre que «tout est une question de circonstances», faisant remarquer qu’ «on fait de la politique pour être élu et agir» et qu’il n’y avait pas d’élections avant 2026, date des prochaines m

Toujours là

La pandémie de Covid-19 ne fait plus la une des médias depuis bien longtemps, supplantée par d’autres urgences, d’autres drames, d’autres enjeux géopolitiques, climatiques, économiques partout sur la planète. Pour autant le coronavirus –et sa kyrielle de variants dont le petit dernier JN.1 vient d’apparaître en France – est toujours là et continue à circuler dans le monde. Et s’il est désormais pris en compte comme une maladie chronique à l’instar de la grippe saisonnière, il continue à contaminer des milliers de personnes, notamment les plus fragiles. Bientôt quatre ans après son apparition, ce virus, qui a mis l’économie mondiale à genoux pendant de longs mois et bouleversé notre vie quotidienne avec ses confinements, ses couvre-feux et l’apprentissage des gestes barrière, continue à mobiliser les communautés médicale et scientifique. La première rappelle l’importance de la vaccination de rappel. Fin septembre, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’inquiétait face au faible nom

Les diaboliques

En qualifiant Marie-José Montesinos et Jean-Paul Vidal d’ « amants diaboliques » dans l’affaire des disparus de Mirepoix – ils comparaissent à partir d’aujourd’hui devant la cour d’assises de l’Ariège, accusés des meurtres de Christophe Orsaz et de sa fille, Célia – l’opinion s’est immédiatement rappelé le film d’Henri-Georges Clouzot, « Les diaboliques », magistrale histoire d’une machination dans laquelle s’enfoncent Simone Signoret, Véra Clouzot et Paul Meurisse. S’il ne s’était pas librement inspiré du roman de Boileau-Narcejac, « Celle qui n’était plus », le film aurait tout aussi bien pu s’appuyer sur de vraies affaires criminelles. Car il y a eu de nombreux « amants diaboliques » au fil des ans, en France comme à l’étranger. En 1953, un an après la publication du roman – sans qu’il y ait un lien – à Arreau dans les Hautes-Pyrénées, un couple tue un homme qu’il hébergeait depuis six mois et évite de justesse la peine capitale. En 1956, autre affaire : le procès « des amants de Ve

Mauvais calculs

Les classements internationaux se ressemblent année en année et les évaluations du ministère de l’Éducation nationale le montrent : le niveau des élèves français en mathématiques est préoccupant pour ne pas dire insuffisant voire mauvais. Dans la dernière évaluation scientifique TIMSS publiée en 2019 ou encore le fameux classement PISA, dont la nouvelle édition 2022 est attendue le mois prochain, la France est à la peine. À l’école élémentaire, au collège ou au lycée, les petits Français décrochent alors que la France reste l’un des pays phare de la discipline. La médaille Fields, le Nobel des mathématiques, a déjà été décernée à 13 lauréats français, notre pays dispose de structures d’enseignement et de recherche reconnues dans le monde entier pour leur excellence comme l’École normale supérieure de Paris ou l’institut Henri-Poincaré, et la France a donné à l’Histoire des mathématiques de grands noms comme Descartes, d’Alembert, Blaise Pascal, Fermat, Condorcet ou, dans la période co

Sortir de la naïveté

Ce n’est pas la première fois qu’un rapport alerte sur les vulnérabilités de la France aux ingérences étrangères. Mais parce qu’il est le dernier à le faire, celui de la délégation parlementaire au renseignement, publié le 2 novembre, permet de mesurer la croissance exponentielle de ces opérations d’influence et de déstabilisation qui visent la France et l’Europe et dont plusieurs affaires ont montré ces derniers mois l’ampleur et la sophistication. En 2021, un imposant rapport de l’Institut de Recherche Stratégique de l’École Militaire (Irsem) avait ainsi détaillé « les opérations d’influence chinoises », qui mobilisent tout l’appareil d’État chinois avec des moyens considérables pour imposer le narratif positif voulu par Xi Jinping. En juin dernier, le rapport de la commission d’enquête sur « les ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères visant à influencer ou corrompre des relais d’opinion, des dirigeants ou des partis politiques français », avait mi

La guerre et l'oubli

Ce samedi 11 novembre, devant les monuments aux morts de toutes les communes de France, comme devant la tombe du soldat inconnu sous l’arc de Triomphe, le président de la République comme les élus, associations d’anciens combattants, écoliers et simples citoyens commémoreront la fin de la Première guerre mondiale. Il y a 105 ans, un armistice mettait fin à quatre années d’un terrible conflit qui fit plus de 9 millions de morts et disparus dont 1,4 million pour la France, et plus de 21 millions de blessés dont 4 millions de Français. Un siècle plus tard, à quelques milliers de kilomètres à l’Est de l’Hexagone, aux portes de l’Europe, une autre guerre a lieu depuis plus de 20 mois, qui entre dans son second hiver. Face à l’agression russe, l’Ukraine connaît la dureté et les horreurs d’une guerre dont les tranchées renvoient à celles du Chemin des Dames, dont les blessés au front du Donbass sont les frères d’armes, à travers le temps, des gueules cassées de 14-18, dont les bombardements i

Culture démocratique

Ce n’est pas le moindre des paradoxes de voir d’un côté le gouvernement multiplier le recours à l’article 49-3 de la Constitution pour faire adopter sans vote – et avec le moins de débats possible – les projets de loi budgétaires, et de l’autre voir le président de la République inviter prochainement les chefs des partis politiques à réfléchir à élargir le champ du référendum voire à réformer le très verrouillé référendum d’initiative populaire (RIP), qui, depuis 2008, n’a jamais été à son terme. Brutalisation de la démocratie parlementaire d’un côté, appel à recourir à davantage de démocratie directe de l’autre… Ce vertigineux « en même temps » illustre toute la difficulté qu’a Emmanuel Macron à accepter le traditionnel cadre institutionnel de la Ve République dans lequel s’inscrivent pourtant depuis 1958 droite et gauche. Élu pour la première fois en 2017 sur le mandat le plus important de la République – la présidence – avec la promesse du dépassement, Emmanuel Macron n’a pas eu les

Drame sans fin

La disparition de Delphine Jubillar, survenue dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020 à Cagnac-les-Mines, dans le Tarn, n’a toujours pas été résolue mais est déjà entrée dans l’histoire des grandes affaires judiciaires françaises. Le mystère reste, en effet, entier sur les circonstances de la disparition de la jeune infirmière et l’absence de découverte de corps rappelle le souvenir terrible d’autres dossiers emblématiques qui ont passionné les Français : de l’affaire Seznec au début du XXe siècle jusqu’à l’affaire Viguier à Toulouse dans les années 2000 en passant par l’affaire Le Roux, qui s’étalera sur plus de trois décennies. Autant d’affaires qui attestent que l’absence de corps n’empêche pas la tenue d’un procès. Le réquisitoire du parquet de Toulouse, qui a demandé le 3 novembre le renvoi de Cédric Jubillar devant les assises pour le meurtre de son épouse, vient une nouvelle fois de le démontrer. Les enquêteurs ont, en effet, accumulé, en bientôt trois années, un faisceau d’indic

Combien de scandales ?

Combien faudra-t-il de scandales touchant des établissements d’hébergement de personnes âgées dépendantes (Ehpad) ? Combien faudra-t-il de témoignages de familles désemparées face à la maltraitance, physique et psychologique, dont sont victimes leurs parents dans ces structures aux coûts sans cesse croissants ? Combien faudra-t-il de témoignages de directeurs ou de personnels qui, courageusement, dénoncent, année après année avec une terrible régularité et un amer goût de déjà-vu, le manque de moyens, l’implacable réduction des coûts et donc des prestations ou les pressions de groupes privés au comportement de rapaces de la finance ? Combien faudra-t-il de livres accablants, d’enquêtes de presse sérieuses ? Combien faudra-t-il de condamnations judiciaires et de rappels à l’ordre ? Oui, combien faudra-t-il de tout cela pour qu’enfin, le gouvernement et au-delà toute la société, prennent enfin la pleine mesure des dysfonctionnements qui minent le grand âge en France ? Deux ans après la

Confiance numérique

Une petite inattention qui a de grandes conséquences, une anodine fausse manipulation qui entraîne de graves et parfois inextricables difficultés. Voilà comment l’on pourrait résumer ce que vivent quelque 500 000 à 1,2 million de Français qui, à des degrés divers, sont chaque année victimes d’escroquerie en ligne et d’usurpation d’identité. Cliquer sans se méfier sur le lien dans un courriel que l’on vient de recevoir de sa banque… alors qu’il s’agit d’un message frauduleux parfaitement imité qui conduira à l’installation d’un logiciel espion verrouillant son ordinateur et réclamant une rançon. Répondre à un SMS que l’on croit venir d’un service de livraison et compléter ensuite un formulaire en ligne sans prendre garde, car le numéro du vrai expéditeur a été préalablement piraté. Dans certains cas, il faudra payer pour retrouver, sans garantie aucune, l’accès à ses données. Dans d’autres, on s’apercevra bien trop tard que quelqu’un se fait passer pour soi et a accumulé des contraventi

Surmonter la crise

  Le bio est-il à un tournant, entre crise de croissance et crise de foi, tant du côté des producteurs, des distributeurs que des consommateurs ? En tout cas, après des années de croissance, le marché des produits bio connaît un net ralentissement en France. Selon une étude de l’Agence bio, la consommation de produits bio a ainsi baissé de 5 % en 2022, passant de 13 milliards d’euros en 2020 à 12,4 milliards en 2022. Une baisse qui s’explique par plusieurs facteurs, liés à la crise sanitaire du Covid et à l’envolée de l’inflation dans l’alimentaire. La pandémie de Covid-19 a, en effet, bouleversé les habitudes alimentaires des Français. Avec les confinements successifs, les fermetures des restaurants et des cantines et la généralisation du télétravail, les consommateurs ont privilégié des produits souvent moins chers et plus accessibles que les produits bio. Les circuits courts, qui représentent près de 30 % des ventes de produits bio, ont également souffert des restrictions de déplace