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Articles

Affichage des articles du octobre, 2024

Une cause nationale

  Un adolescent de 14 ans recruté comme tueur à gages par les réseaux criminels marseillais. L’affaire, qui a vu un chauffeur de VTC tué de sang-froid, a provoqué une onde de choc dans la société française, qui a découvert avec effroi combien le trafic de drogue se diffusait jusqu’à impliquer des mineurs. Ce dossier glaçant permettra-t-il une prise de conscience à tous les niveaux ? En tout cas l’affaire marque un tournant dans l’histoire déjà sombre du narcotrafic en France. De la French Connection des années 70 aux guerres de territoires actuelles, notre pays semble ne jamais parvenir à endiguer ce fléau qui gangrène nombre de quartiers populaires des banlieues françaises, mais pas seulement eux puisque le trafic se diffuse aussi vers les villes moyennes voire le monde rural. Marseille, bien sûr, cristallise toutes les tensions. La cité phocéenne, jadis plaque tournante mondiale de l’héroïne, voit aujourd’hui ses quartiers nord transformés en quasi-zones de non-droit où les règlement

Agir et attendre

Emmanuel Macron et Bruno Retailleau se sont rencontrés lundi matin. Il s’agissait de la première entrevue entre les deux hommes depuis la nomination du gouvernement Barnier, il y a un mois. L’entretien, qui a duré une heure trente, s’est bien passé selon les entourages du président de la République et du ministre de l’intérieur qui, il faut bien le dire, sont aux antipodes l’un de l’autre sur la forme et le fond. Rien de commun, en effet, entre le jeune président libéral adepte du en même temps, promoteur de la start-up nation disruptive et dont la déroutante plasticité le rend difficile à suivre y compris dans son propre camp, et l’ex-sénateur vendéen formé par Philippe de Villiers, aussi raide que courtois, tenant constant d’une droite dure mais claire, pétrie de certitudes et arc-boutée sur un corpus de valeurs conservatrices et catholiques. Et pourtant l’ancien banquier d’affaires citadin et le terrien rural attaché à son bocage et sa ferme de Saint-Malô-du-Bois sont dans le même b

Fragile accalmie

   Après des mois de tempête inflationniste qui ont secoué le pouvoir d’achat des Français, une embellie arriverait-elle cet automne ? En tout cas, plusieurs indicateurs apportent un peu d’optimisme, notamment sur les prix de l’alimentaire. Le 15 octobre, l’Insee a ainsi publié son Indice des prix à la consommation définitif pour le mois de septembre : il baisse de 1,2 % sur un mois, soit la plus forte baisse mensuelle depuis 1990, et les prix de l’alimentation hors produits frais sont quasi stables sur un an (+ 0,1 %). Ce mardi, RTL a annoncé de son côté que son « panier », composé de 13 produits du quotidien, comme les pâtes, les œufs ou le lait, affichait une baisse de 2,39 %, la première depuis sa création en octobre 2021. Autre motif de soulagement pour les ménages français : la baisse des prix de l’énergie. Les tarifs du gaz et de l’électricité, qui avaient flambé l’an dernier, retrouvent peu à peu des niveaux plus raisonnables avec des perspectives à la baisse pour les prochains

Des paroles aux actes

L’agriculture française vient de se confronter à un effet papillon, cette image qui illustre la théorie du chaos et qui veut qu’un battement d’ailes à l’autre bout du monde enclenche de lourdes conséquences à des milliers de kilomètres. L’effet papillon, c’est le traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur (Argentine, Brésil, Uruguay, Paraguay et Bolivie) qui pourrait être sur la table du prochain sommet du G20 le 18 novembre à Rio. La perspective de la signature de ce traité – à laquelle s’oppose, bien seule, la France – constitue un casus belli pour les agriculteurs français et vient souffler sur les braises de la colère paysanne de janvier dernier que certains avaient un peu vite oubliée. Car rien n’est réglé… Il y a dix mois, en effet, le monde paysan avait crié sa colère et sa détresse, au départ de l’Occitanie, en faisant monter des tracteurs à Paris, en bloquant les autoroutes ou en assiégeant des préfectures. Face à cette crise historique, le jeune Premier m

Menace invisible

Chaque jour, des millions de Français sont exposés, à leur insu, à une menace invisible : un cocktail toxique de pesticides. Ces substances, censées protéger nos cultures, s’infiltrent insidieusement dans notre environnement, notre alimentation et finalement, dans nos corps. Et cela est particulièrement vrai pour les riverains de champs où se font des épandages et qui entendent faire bouger la réglementation avec une action collective défendue par l’ancienne ministre de l’Environnement, l’avocate Corinne Lepage. Depuis plusieurs années, de nombreuses études scientifiques ont démontré les dangers de l’exposition chronique des populations à ces substances chimiques. Cancer, troubles neurologiques, perturbations endocriniennes : la liste des maux potentiellement liés aux pesticides s’allonge année après année. Malgré cela, l’industrie chimique persiste à minimiser les risques, s’abritant derrière le sacro-saint principe du « doute raisonnable ». Le lobby de l’industrie phytosanitaire cons

Peau de chagrin

  Ce n’est pas la première fois que nous abordons dans notre journal les difficultés pour les Français de décrocher des rendez-vous médicaux chez un dermatologue, un ophtalmologiste, un cardiologue, voire un dentiste ou simplement un médecin généraliste. Si nous y consacrons à nouveau un dossier, c’est parce que nous recevons régulièrement de nombreux témoignages de lecteurs exaspérés de rencontrer de telles difficultés et accablés d’être confrontés très concrètement à cette pénurie de médecins qui créent des déserts médicaux bien réels. Ce phénomène, qui semble s’aggraver d’année en année, touche particulièrement les dermatologues, ces spécialistes essentiels à notre bien-être cutané. Mais au-delà des problèmes de peau, c’est tout notre tissu médical qui s’effiloche, laissant de nombreux Français totalement démunis, comme l’a montré l’étude récente de la Fondation Jean Jaurès, intitulée « Cartes de France de l’accès aux soins ». Celle-ci, publiée en avril dernier, a dressé un constat

Dangereuse saignée

  Le choc a été d’autant plus rude que personne ne s’y attendait : le Budget 2025, présenté jeudi soir en Conseil des ministres et qui a commencé son marathon parlementaire hier à l’Assemblée nationale, acte la suppression de 4 000 postes d’enseignants. Alors qu’il y a quelques semaines à peine la communauté éducative déplorait un manque de quelque 3 000 enseignants, la voilà qui fait face à une véritable saignée, la plus grosse coupe en matière de personnels dans le nouveau Budget. Une décision qui va toucher essentiellement le premier degré public (maternelle et élémentaire) avec une baisse de 3 155 postes contre 660 dans le privé. Le second degré public (collèges et lycées) perd lui 180 postes contre 40 dans le privé. Le gouvernement a beau jeu d’expliquer que le Budget de l’Éducation nationale reste le premier de l’État (63 milliards d’euros, en hausse de 800 millions), qu’il prévoit le financement de 2 000 AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap) supplémentaires et q

Les juges de la République

  Un meurtre sordide qui scandalise et émeut – à raison – l’opinion, un dossier d’évidence entaché d’un dysfonctionnement de la chaîne judiciaire et qui implique un ressortissant étranger sans papier qui aurait dû être expulsé ; un énième règlement de compte meurtrier sur fond de trafic de stupéfiants impliquant un mineur ; une attaque violente contre les forces de l’ordre, leur matériel comme leur intégrité physique, qui révolte les Français… Autant de dossiers – le meurtre de Philippine, le tueur à gage de 14 ans de Marseille, l’attaque du commissariat de Cavaillon – qui, cumulés avec d’autres, électrisent le débat public. Fortement médiatisés, notamment par certaines chaînes d’information en continu, ils suscitent aussi des déclarations politiques – particulièrement à droite et à l’extrême droite promptes à les instrumentaliser – sur l’habituel et prétendu laxisme de la justice et sur la nécessité qu’il y aurait à en finir avec les règles l’État de droit… Ces politiques qui se préci

L'union est un combat

Pour mieux analyser une situation politique, il est toujours intéressant de faire un pas de côté et prendre de la distance. Ainsi, on a vu la presse étrangère stupéfaite par la dissolution de confort décidée par Emmanuel Macron en juin, puis la désinvolture avec laquelle le chef de l’État a brusqué les institutions pour ne pas demander à la coalition arrivée en tête aux législatives, en l’occurrence le Nouveau Front populaire (NFP), de former un gouvernement et lui préférer une alliance fragile des partis sanctionnés dans les urnes – dont le sien – autour de Michel Barnier. Pareillement, un regard extérieur est intéressant sur la coalition de gauche, bâtie dans l’urgence entre des partis qui ne s’étaient pourtant pas épargnés durant les élections européennes. Ce regard-là est arrivé avec Yannis Varoufakis, l’ex-ministre grec de l’Économie, tenant d’une gauche radicale proche de la France insoumise. Dans une interview à Libération , s’il se félicite que l’union à gauche ait pu se faire,

Proche-Orient, année zéro

En 1948, Roberto Rossellini sortait le film "Allemagne, année zéro », dont le titre fait allusion à l’expression "Stunde Null" (l’heure zéro) qui décrit l’effondrement de l’Allemagne en 1945. Y aura-t-il un jour un film "Gaza, année zéro", ou "Proche-Orient, année zéro" ? Le grand reporter Guillaume Auda, vient, lui, de publier " 7 octobre 2023. Année zéro " (Ed. Le cherche Midi), une enquête de terrain en Israël et en Palestine sur le basculement qui s’est opéré il y a un an avec les attaques terroristes du Hamas palestinien contre Israël. Des attaques qui ont fait près de 1 205 morts, 3 200 blessés et 250 otages et qui ont précipité le Proche-Orient dans la guerre. En riposte aux pogroms, Israël conduit depuis une guerre meurtrière et destructrice dans la bande de Gaza – plus de 41 000 morts – pour éliminer le Hamas et a ouvert un front désormais au Sud Liban contre le Hezbollah qui pourrait embraser toute la région. Depuis le 7 octobre 20

Vents contraires

  Menhirs 1, éoliennes 0. On pourrait trivialement résumer ainsi l’affaire du parc éolien de Porspoder, dans le Finistère, dont l’autorisation préfectorale a été annulée par la justice administrative cette semaine, car les trois éoliennes envisagées étaient prévues trop proches des menhirs de granit rose de Kergalou. Le préfet, qui a autorisé le projet en 2022, était passé outre les avis défavorables de l’architecte des bâtiments de France, des deux communes concernées et de la commissaire de l’enquête publique. Cette affaire, un rien clochemerlesque, pourrait évidemment prêter à sourire, mais elle illustre les vents contraires qui, régulièrement partout en France, soufflent sur les projets de parcs éoliens qu’ils soient sur terre ou sur mer. D’un côté, les opposants dénoncent pêle-mêle la défiguration des paysages, les nuisances sonores, l’impact sur la biodiversité ou la faune et la dépréciation immobilière. Une peur parfois instrumentalisée par des discours alarmistes et des informa

Trouver le juste équilibre

  Alors que la pandémie de Covid-19 avec ses confinements semblait avoir définitivement ancré le télétravail dans nos habitudes professionnelles, un vent contraire souffle depuis la Silicon Valley. Les géants américains de la tech, prescripteurs de cette révolution du travail à distance, font aujourd’hui machine arrière. Apple, Google, Meta, Tesla… : tous sonnent le rappel de leurs troupes au bureau et demandent à leurs salariés de revenir travailler sur site au moins trois jours par semaine. Ce spectaculaire revirement peut-il trouver un écho en France ? Notre pays, jadis très réticent, avait rattrapé son retard de façon fulgurante pendant la crise Covid. Aujourd’hui près d’un tiers des salariés français télétravaille au moins un jour par semaine et selon une étude de l’Observatoire du télétravail, plus des deux tiers des télétravailleurs souhaitent continuer à exercer leur activité à distance au moins partiellement. Les avantages du télétravail ne sont plus à démontrer : gain de temp

Ligne de crête

  La dernière fois que Michel Barnier s’est exprimé devant l’Assemblée nationale, c’était en 2009 en tant que ministre de l’Agriculture de Nicolas Sarkozy. Quinze ans, autant dire une éternité en politique. Rien n’est plus pareil, surtout depuis l’avènement des chaînes d’information en continu et des réseaux sociaux qui compressent le temps et accélèrent la vie politique ; surtout, aussi, après la déflagration de l’élection d’Emmanuel Macron en 2017 qui a précipité l’effondrement des partis traditionnels de gauche et de droite. Quinze ans où l’on est passé de confortables majorités absolues et, au pire des cas, de cohabitations tendues mais correctes, à une Assemblée éclatée comme jamais avec un hémicycle en surchauffe permanente dans lequel rien n’est jamais acquis ni définitif. En montant à la tribune hier, Michel Barnier, Premier ministre d’une coalition de partis sanctionnés lors des dernières législatives, a peut-être été saisi de nostalgie mais plus sûrement de vertige devant l’i