Accéder au contenu principal

Trouver le juste équilibre

 

teletravail

Alors que la pandémie de Covid-19 avec ses confinements semblait avoir définitivement ancré le télétravail dans nos habitudes professionnelles, un vent contraire souffle depuis la Silicon Valley. Les géants américains de la tech, prescripteurs de cette révolution du travail à distance, font aujourd’hui machine arrière. Apple, Google, Meta, Tesla… : tous sonnent le rappel de leurs troupes au bureau et demandent à leurs salariés de revenir travailler sur site au moins trois jours par semaine. Ce spectaculaire revirement peut-il trouver un écho en France ? Notre pays, jadis très réticent, avait rattrapé son retard de façon fulgurante pendant la crise Covid. Aujourd’hui près d’un tiers des salariés français télétravaille au moins un jour par semaine et selon une étude de l’Observatoire du télétravail, plus des deux tiers des télétravailleurs souhaitent continuer à exercer leur activité à distance au moins partiellement.

Les avantages du télétravail ne sont plus à démontrer : gain de temps sur les trajets domicile-travail, meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, réduction du stress lié aux open spaces bruyants. Certains salariés déplorent toutefois l’isolement social, la difficulté à déconnecter, l’absence de frontière nette entre sphères privée et professionnelle. Pour les entreprises, le bilan est plus contrasté. Si certaines y voient un moyen de réduire leurs coûts immobiliers et d’attirer des salariés et notamment les jeunes générations, d’autres pointent du doigt une perte de productivité et un affaiblissement de la culture d’entreprise et de l’esprit d’équipe. Dans un pays où le présentéisme et la verticalité hiérarchiques sont très importants, le télétravail avait aussi mis au jour le rôle parfois dispensable des managers « intermédiaires »…

Face à ces constats mitigés, les entreprises françaises doivent-elles suivre leurs homologues américaines ? Rien n’est moins sûr. En France, le télétravail est encadré par des accords d’entreprise ou des chartes, fruit d’un dialogue social structuré qui avait abouti à un accord national interprofessionnel (ANI) sur le télétravail, signé en novembre 2020, et même à un droit à la déconnexion. L’enjeu pour les entreprises françaises est donc de trouver le bon dosage entre jours travaillés et télétravaillés. Cela suppose aussi de repenser l’organisation du travail, les espaces de bureau ou les outils collaboratifs pour bien faire fonctionner des équipes hybrides.

Le télétravail ne peut toutefois pas être pensé uniquement comme un simple mode d’organisation du travail car le débat dépasse largement la sphère de l’entreprise et concerne toute la société. Quel impact sur l’aménagement du territoire, alors que certains voient dans cette pratique un moyen de revitaliser les zones rurales ? Quelles conséquences sur la mobilité et l’environnement, notamment autour des grandes métropoles asphyxiées par les embouteillages ? Comment repenser nos villes et nos bureaux ? Et quid de tous ceux dont le métier ne se prête pas au télétravail ? L’exemple de la Silicon Valley montre qu’il n’y a ni solution unique ni solution miracle ; chaque pays, chaque entreprise doit faire ses propres choix. À la France de trouver le juste équilibre.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 3 octobre 2024)


Posts les plus consultés de ce blog

Grandiose !

  Cent ans après les JO de Paris de 1924, les XXXIIIes Jeux Olympiques d’été de l’ère moderne se sont ouverts hier dans la Capitale au terme d’une cérémonie d’ouverture exceptionnelle qui est entrée dans l’histoire en en mettant plein les yeux au monde entier. Les athlètes ont défilé non pas dans un Stade olympique mais en bateau, sur la Seine, sur un parcours rythmé par une mise en scène de toute beauté mettant en valeur la France, son patrimoine, son Histoire, ses talents, avant de rejoindre le Trocadéro devant une Tour Eiffel parée des anneaux olympiques. Nul doute que cette cérémonie réussie, émouvante, populaire, inédite, fera date en se rangeant dans la longue liste des défilés qui ont marqué les JO mais aussi l’histoire de notre pays, de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 à celle pour le Bicentenaire de la Révolution française en 1989, en passant par la Libération de Paris dont on va bientôt célébrer les 80 ans. Cette cérémonie ponctue plusieurs années de préparatio...

Guerres et paix

La guerre menace encore une fois le Pays du Cèdre, tant de fois meurtri par des crises à répétition. Les frappes israéliennes contre le sud du Liban et les positions du Hezbollah ravivent, en effet, le spectre d’un nouveau conflit dans cette Terre millénaire de brassage culturel et religieux. Après quinze années de violence qui ont profondément marqué le pays et ses habitants (1975-1990), la paix est toujours restée fragile, constamment menacée par les ingérences étrangères, les divisions communautaires et une classe politique corrompue. La crise économique sans précédent qui frappe le pays depuis 2019, puis l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth en 2020, symbolisant l’effondrement d’un État rongé par des décennies de mauvaise gouvernance, ont rajouté au malheur de ce petit pays de moins de 6 millions d’habitants, jadis considéré comme la Suisse du Moyen-Orient. Victime d’une spectaculaire opération d’explosion de ses bipeurs et talkies-walkies attribuée à Israël, le Hezbollah – ...

Vaccin et vigilance

La résurgence de la coqueluche en France comme ailleurs en Europe a de quoi inquiéter. En France depuis le début de l’année, un total provisoire de 28 décès a été rapporté à Santé Publique France, dont 20 enfants (18 de moins de 1 an) et 8 adultes (de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). La circulation de la bactérie Bordetella pertussis, principale cause de la coqueluche, est si importante que les autorités s’attendent à de nouveaux cas à venir dans les prochains mois. Car la coqueluche est extrêmement contagieuse, une personne contaminée pouvant transmettre la maladie à 15 autres en moyenne… Et si elle a longtemps été considérée comme une maladie de la petite enfance, elle peut être sévère à tous les âges, voire mortelle pour les nourrissons, non ou partiellement vaccinés, et les personnes à risque telles que les femmes enceintes et les personnes âgées. Ce n’est pas la première fois que l’on est confronté à une résurgence de la coqu...