Accéder au contenu principal

Mauvais calculs

maths

Les classements internationaux se ressemblent année en année et les évaluations du ministère de l’Éducation nationale le montrent : le niveau des élèves français en mathématiques est préoccupant pour ne pas dire insuffisant voire mauvais. Dans la dernière évaluation scientifique TIMSS publiée en 2019 ou encore le fameux classement PISA, dont la nouvelle édition 2022 est attendue le mois prochain, la France est à la peine. À l’école élémentaire, au collège ou au lycée, les petits Français décrochent alors que la France reste l’un des pays phare de la discipline. La médaille Fields, le Nobel des mathématiques, a déjà été décernée à 13 lauréats français, notre pays dispose de structures d’enseignement et de recherche reconnues dans le monde entier pour leur excellence comme l’École normale supérieure de Paris ou l’institut Henri-Poincaré, et la France a donné à l’Histoire des mathématiques de grands noms comme Descartes, d’Alembert, Blaise Pascal, Fermat, Condorcet ou, dans la période contemporaine, Alexandre Grothendieck ou Cédric Villani. Comment un tel paradoxe a-t-il pu s’installer et se creuser à ce point ?

Pour sortir de cette ornière, des pistes ont déjà été maintes fois évoquées comme celles du rapport Villani-Torossian qui a proposé, en 2018, 21 mesures pour réformer l’enseignement des mathématiques. En septembre dernier, le Conseil scientifique de l’Éducation nationale, qui s’alarmait du niveau des élèves entrant en 6e quant à leur compréhension des chiffres et leur maîtrise des fractions, préconisait une introduction plus précoce des concepts mathématiques, dès le début de l’école élémentaire.

Mais les mauvais résultats des élèves s’expliquent aussi peut-être parce que la discipline est malmenée depuis plusieurs années avec un manque de moyens, des professeurs insuffisamment formés, des programmes mouvants et peu ouverts aux méthodes d’enseignements pratiquées avec succès à l’étranger. Sans oublier les décisions politiques erratiques. La suppression des maths du tronc commun au lycée par Jean-Michel Blanquer a eu des conséquences catastrophiques avant que la discipline ne soit réintégrée. S’ajoute à cela le sentiment ancien et toujours très répandu d’autodépréciation chez les élèves face à une discipline plus redoutée qu’appréciée.

Pour le nouveau ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal – qui a promis comme nombre de ses prédécesseurs, un retour aux fondamentaux en français et en mathématiques – il y a là un vrai défi. Mais attention aux mauvais calculs qui font passer les coups politiques de court terme avant l’efficacité de long terme. En évoquant la création de groupes de niveaux au collège, le ministre – qui a fait toute sa scolarité dans le privé – laisse à penser qu’il faudrait en finir avec le collège unique – rebaptisé en 1994 « collège inique » par François Bayrou. Instauré en 1975 il a pourtant démocratisé l’enseignement.

La segmentation des classes qui inquiète les syndicats serait, d’évidence, une fausse bonne idée, celle du renoncement à donner aux jeunes adolescents un socle commun de connaissances indispensables pour devenir les citoyens responsables de demain.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 16 novembre 2023)

Posts les plus consultés de ce blog

La messe est dite ?

    L’entourage de François Bayrou a beau tenter d’expliquer que l’échec du conclave sur les retraites n’est imputable qu’aux seuls partenaires sociaux qui n’ont pas réussi à s’entendre en quatre mois pour « améliorer » la contestée réforme des retraites de 2023, la ficelle est un peu grosse. Car, bien évidemment, cet échec – hélas attendu – est aussi celui du Premier ministre. D’abord parce que c’est lui qui a imaginé et convoqué cette instance inédite de dialogue social et qu’il aurait naturellement revendiqué comme le succès de sa méthode un accord s’il y en avait eu un. Ensuite parce qu’il n’a pas été l’observateur neutre des discussions, qu’il promettait « sans totem ni tabou ». Il a au contraire, plusieurs fois, interféré : dès leur lancement en les corsetant par une lettre de cadrage imposant de ne pas créer de dépenses et d’équilibrer les comptes à l’horizon 2030 ; ensuite par son refus de voir abordé l’âge de départ à 64 ans, point centra...

Machine à cash et à rêves

Qui n’a jamais rêvé d’être un jour le gagnant du loto, que l’on soit celui qui joue depuis des années les mêmes numéros en espérant qu’un jour ils constituent enfin la bonne combinaison ou que l’on soit même celui qui ne joue jamais mais qui se projette malgré tout dans la peau d’un gagnant, énumérant ce qu’il ferait avec ces centaines de millions d’euros qui grossiraient son compte en banque. Chacun se prend ainsi à rêver de vacances éternelles au soleil, de voyages au long cours, de montres de bijoux ou de voitures de luxe, de yachts XXL naviguant sur des mers turquoise, de grands restaurants étoilés ou plus simplement de réaliser ses projets longtemps différés faute de financements, de l’achat de sa maison au lancement de son entreprise, ou encore de partager ses gains avec sa famille ou avec ses collègues avec lesquels on a cotisé pour acheter le bulletin. Le loto, c’est une machine à rêver à laquelle chacun s’est adonné une fois dans sa vie et qui rythme toujours le quotidien des ...

Sortir des postures

Le cortège d’une manifestation ou un rassemblement pour fêter la victoire d’un club sportif qui se terminent par des émeutes, des dégradations de mobilier urbain et de vitrines de magasins, parfois pillés, et des attaques violentes des forces de l’ordre par des hordes encagoulées dans un brouillard de gaz lacrymogènes… Les Français se sont malheureusement habitués à ces scènes-là depuis plusieurs décennies. Comme ils se sont aussi habitués aux polémiques politiciennes qui s’ensuivent, mêlant instrumentalisation démagogique, règlement de comptes politiques et critiques d’une justice supposément laxiste. Le dernier épisode en date, qui s’est produit samedi soir à Paris à l’occasion de la victoire du PSG face à l’Inter Milan en finale de la Ligue des champions, ne fait, hélas pas exception à la règle. Au bilan édifiant – deux morts, des dizaines de blessés, plus de 600 interpellations, des rues et magasins saccagés – s’ajoutent désormais les passes d’armes politiques. Entre l’opposition e...