Accéder au contenu principal

Pollution sans fin

pollution
Philippe Behra effectuant un prélèvement dans la cour d’école de Lastours, en avril 2019./Photo DDM P.C.

La première étude scientifique indépendante sur la pollution en métaux et métalloïdes dans la vallée de l’Orbiel, qui vient de paraître, ne constitue, hélas, pas le premier signal d’alerte des conséquences de l’exploitation minière de la région de Salsigne, ni une surprise pour les connaisseurs du dossier ou les populations concernées qui se battent depuis des années pour davantage de transparence et d’informations. Mais elle représente, incontestablement, une terrible confirmation et le nouvel épisode d’une histoire sans fin qui mêle manquements des autorités, inquiétude des populations, enjeux de santé publique et de protection de l’environnement.

Depuis l’arrêt en 2004 de l’exploitation de la mine de Salsigne – qui fut la principale mine d’or de France et la première mine d’arsenic du monde – des signaux d’alarme ont, en effet, été maintes fois tirés. En janvier 2006, notre journal révélait déjà les conséquences de la pollution : les scientifiques constataient alors plus de 11 % de mortalité par cancer, tous types de cancers confondus. 10 000 personnes, écrivions-nous, étaient concernées dans un rayon de 15 kilomètres autour de Salsigne… Depuis, études et rapports se sont succédé, comme celui du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), classé confidentiel jusqu’en 2039, qui confirmait fin janvier 2018 que le Pech de Montredon, où sont stockés les déchets miniers, ne présentait pas les garanties d’étanchéité prévues, alors que l’on estimait que sept tonnes d’arsenic étaient rejetées chaque année dans l’Orbiel…

Après les inondations d’octobre 2018, une nouvelle étape semblait avoir été franchie. La pollution à l’arsenic de la vallée de l’Orbiel consécutive à ces violentes crues historiques qui ont frappé l’Aude et dont La Dépêche avait révélé des taux jusqu’à 1 000 fois supérieurs à la norme, a montré que la vallée n’en avait pas fini avec l’héritage de Salsigne, et sans doute pour longtemps.

Fin août 2019, dix mois après les crues de 2018, des analyses des urines d’une trentaine d’enfants avait montré que 18 d’entre eux avaient plus de 10 microgrammes d’arsenic par gramme de créatinine, seuil de référence fixé par l’Agence régionale de santé (ARS), qui de son côté se bornait à assurer que ces doses "ne sont pas dangereuses" et que "les chances (sic) d’être contaminé à l’arsenic sont infimes"…

Cette pollution majeure et persistante de la vallée de l’Orbiel, attestée par la nouvelle étude scientifique, appelle une nouvelle fois des mesures plus fortes de protection et de surveillance des populations, de sécurisation des sites d’enfouissement et une exigence de vérité et de transparence totale qui doit s’imposer aux pouvoirs publics et qui a malheureusement trop souvent fait défait ces dernières années. Au-delà, l’histoire de la pollution de Salsigne doit servir de leçon et déclencher une prise de conscience collective. Il y aurait près de 7 000 anciens sites industriels pollués ou potentiellement pollués en France, et quelque 300 000 friches, polluées par des hydrocarbures, des solvants, des métaux lourds, voire parfois des traces de radioactivité, restent encore à répertorier… Un défi qu’il faut relever pour les générations futures.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 25 octobre 2021)

Posts les plus consultés de ce blog

Se préparer

Voilà un type de courbe que l’on n’avait pas vu depuis longtemps concernant le Covid-19 : une hausse, celle du nouveau variant du coronavirus EG.5. Baptisé Eris, ce cousin d’Omicron croît de façon vertigineuse dans le séquençage de cas positifs au Covid-19 en France comme dans d’autres pays. Beaucoup plus contagieux que ses prédécesseurs, Eris pourrait ainsi s’imposer et devenir majoritaire. Au point de relancer une pandémie mondiale que nous pensions derrière nous ? Nous n’en sommes évidemment pas là, mais l’apparition de ce nouveau variant, tout comme la possibilité de voir survenir des clusters de contamination comme cela vient de se produire aux fêtes de Bayonne, nous interroge légitimement. Même si la couverture vaccinale est bonne en France, la crainte de devoir revivre les conséquences sanitaires et socio-économiques d’un retour de la pandémie est bien dans les esprits. Peut-être aurions-nous dû écouter plus attentivement les spécialistes comme le directeur général de l’Organisa

Entaché

Dix ans après son départ du gouvernement Ayrault, Jérôme Cahuzac, l’ancien ministre du Budget de François Hollande, envisage-t-il son retour en politique ? En tout cas l’intéressé, condamné en appel à deux ans de prison pour fraude fiscale et blanchiment de fraude fiscale, et frappé de cinq années d’inéligibilité, était hier sur le marché de Monsempron-Libos, non loin de Villeneuve-sur-Lot, la ville dont il a été le député et le maire.Fin octobre déjà il participait à une réunion, organisée à huis clos, quelques semaines après le lancement d’une association politique «Les amis de Jérôme Cahuzac». Récemment interrogé par Sud-Ouest pour savoir s’il préparait son retour politique, le septuagénaire, qui avait élu domicile en Corse où il pratiquait la médecine à l’hôpital de Bonifacio, s’est borné à répondre que «tout est une question de circonstances», faisant remarquer qu’ «on fait de la politique pour être élu et agir» et qu’il n’y avait pas d’élections avant 2026, date des prochaines m

Amers adieux

Un anniversaire… qui vire aux adieux. Air France, qui fête cette année ses 90 ans, a annoncé hier, à la surprise générale, qu’elle allait quitter en 2026 l’aéroport d’Orly et recentrer ses vols intérieurs sur son hub de Roissy-Charles de Gaulle. En quittant ainsi le deuxième aéroport du pays, la compagnie française tourne la page d’une histoire qui avait commencé en 1952, année de son arrivée à Orly. Histoire partagée depuis par des millions de Français qui, tous, peu ou prou, pour le travail ou les loisirs, ont un jour pris un avion d’Air France pour Paris-Orly, ont parfois confondu Orly-Ouest et Orly-Sud, ont accompagné le développement de la compagnie avec le lancement des Navettes vers Toulouse, Nice, Bordeaux, Marseille puis Montpellier, ont découvert au fil des ans les nouveaux Airbus, apprécié la qualité du service à bord, puis, une fois arrivés, emprunté l’OrlyVal pour rejoindre le centre de Paris ou continuer leur voyage avec une correspondance. Si l’annonce du départ d’Air Fr