On ne dira jamais assez l’importance des dessinateurs de presse pour saisir une situation. Le 11 mars dernier, alors que l’épidémie du coronavirus se propage dans le monde, Graeme MacKay, dessinateur pour le journal canadien The Hamilton Spectator, publiait un "cartoon" très partagé ensuite sur les réseaux sociaux. On y voit une ville où quelqu’un livre un conseil "Assurez-vous de vous laver les mains et tout ira bien". La ville est alors sous la menace d’une vague "Covid-19", elle-même en passe d’être engloutie par une autre vague plus grosse marquée "récession". Ce dessin, prémonitoire, a depuis été détourné par certains qui ont rajouté une troisième vague, "changement climatique".
Ces dessins illustrent simplement la situation complexe qui nous attend. Alors que l’épidémie est "sous contrôle" en France depuis la semaine dernière selon le Conseil scientifique, nous allons faire face à un tsunami socio-économique ravageur dont on commence à mesurer l’ampleur. Un déficit qui chute à 11 % du PIB, une dette publique qui explose, une croissance qui se ralentit et un chômage qui a connu une hausse spectaculaire : la France est en passe de faire face à une "récession historique" jamais vue depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Jusqu’à présent, grâce à notre Etat social qui a joué le rôle d’amortisseur, notamment avec le mécanisme du chômage partiel, on a évité un "écroulement" de notre économie, pour reprendre le mot d’Edouard Philippe. Mais demain ? Des secteurs entiers sont dans des situations périlleuses, l’habillement, l’automobile, la culture, le tourisme, l’aéronautique… Le gouvernement, tout comme l’Europe, planche sur des plans de relance massifs ; demain, Emmanuel Macron annoncera des mesures en faveur de la filière aéronautique. Tout cela est évidemment nécessaire mais ne sera sans doute pas suffisant pour empêcher des plans sociaux et les drames familiaux qu’ils entraînent…
La pandémie du Covid-19 nous impose de revoir nos façons de penser, tant pour répondre à la vague de la récession qu’à celle du changement climatique, aux inquiétudes des chefs d’entreprise qu’à celle des Français – plus de 4 actifs sur 10 ont peur de perdre leur emploi… Certains, à droite, reprennent les vieilles recettes, raniment le débat sur l’abrogation des 35 heures ou proposent d’amputer les salaires en échange d’un maintien de l’emploi. Face à ces solutions court-termistes, il existe d’autres possibilités.
Emmanuel Macron, qui se doit de réussir la fin de son quinquennat, l’a parfaitement théorisé ce samedi : "Le monde d’après sera résolument écologique. Je m’y engage. Nous le bâtirons ensemble. Nous avons une opportunité historique de reconstruire notre économie et notre société sur de nouvelles bases, de nous réinventer, d’investir dans un avenir décarboné." Le Président a souvent déçu en matière d’écologie avec son "Make your planet great again" peu suivi d’effets ; c’est peu dire que sur cette croissance verte, il est attendu et n’a plus droit à l’erreur.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 8 juin 2020)