Il est de coutume de dire avant chaque rentrée politique qu’elle sera "chaude", que les questions sociales vont mettre l’exécutif sur des charbons ardents, que les syndicats aiguisent leurs revendications, que les oppositions feront feu de tout bois, bref que l’on va voir ce que l’on va voir. Et souvent – pas toujours – les pronostics ne se vérifient pas et les poussées de fièvre ne viennent pas d’où on les attendait et pas forcément à la rentrée de septembre. Qui aurait pu imaginer, par exemple, l’émergence du mouvement des Gilets jaunes fin 2018, concrétisation d’une accumulation de signaux et de colères nés bien avant l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir ?
Par conséquent, on se gardera bien de prédire une nouvelle rentrée "chaude". En revanche, on peut d’ores et déjà assurer que cette rentrée politique sera tout entière tournée vers la prochaine élection présidentielle. Depuis l’instauration du quinquennat, l’élection suprême est, en effet, devenue la seule véritable échéance qui compte, celle qui peut encore mobiliser l’électeur, celle qui a relégué les élections intermédiaires à des consultations minées par une abstention abyssale, celle autour de laquelle tout finit par s’organiser au risque d’un assèchement de la vie démocratique. L’élection présidentielle, il n’y a que ça qui compte…
Dès lors, à huit mois désormais du prochain scrutin, tous les états-majors des partis sont focalisés sur cette échéance capitale qui aura lieu dans le contexte totalement inédit d’une crise sanitaire majeure, d’une épidémie qui conditionne encore pour plusieurs semaines la vie du pays. Face à la défiance dans la parole politique, les formations, qui tiennent en ce moment leurs journées ou universités d’été, cherchent le ton juste, les idées fédératrices et le mode de désignation idéal de leur candidat à la présidentielle. Car l’élection reste bien, au-delà des programmes et de la vie des partis, la rencontre d’un homme ou d’une femme avec les Français, comme l’avait jadis théorisé le général de Gaulle.
Quatre ans et demi après le tsunami dégagiste qui a conduit à l’élection d’Emmanuel Macron, le paysage politique semble toujours en quête, sinon de cet homme ou cette femme providentiels, du moins d’un renouveau politique à même d’apaiser une France toujours plus "archipélisée". La présidentielle, qui aura – n’en doutons pas – son lot de surprises, doit être l’occasion de refaire nation mais aussi d’envoyer un signal à l’extérieur.
À l’heure où l’idée même de démocratie est fragilisée partout dans le monde sous la poussée des populismes et des fake news, nous avons tous une responsabilité collective à faire de cette élection un moment digne qui montre que le débat démocratique est toujours préférable au combat.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mardi 24 août 2021)