Accéder au contenu principal

Refuser la loi du Far West

 

rodeo

Les rodéos urbains ne datent bien sûr pas d’aujourd’hui. On pourrait même dire que cette passion pour la mécanique rugissante et la grisante vitesse est un incontournable de la jeunesse, reconduit depuis qu’un certain James Dean incarna la Fureur de vivre. Mais ces rodéos sont devenus des événements trop récurrents pour qu’on les regarde avec indifférence ou indulgence. De jour comme de nuit, des jeunes – et moins jeunes – rendent le quotidien des habitants infernal, entre vacarme incessant et mise en danger des riverains, que ceux-ci soient d’ailleurs dans de grandes métropoles comme Toulouse ou Montpellier, ou dans des villes moyennes.

En 2018, une loi a été votée pour « renforcer la lutte contre les rodéos motorisés ». Un premier pas nécessaire dont l’action a mobilisé les forces de l’ordre pour multiplier les contrôles et les saisies. Au final, les condamnations ont été multipliées par plus de dix entre 2018 et 2020. Sans pour autant empêcher les rodéos qui, durant le premier confinement, ont connu une hausse de 15 %. Exutoire contre l’étouffante mesure d’assignation à résidence pour ce confinement inédit et très éprouvant dans les quartiers ? Bravade contre les forces de l’ordre ? Opportunité de profiter d’artères désertées ? Un peu de tout cela sans doute.

Trois ans après cette première loi, une mission d’information parlementaire va rendre un rapport pour renforcer les dispositifs, notamment sur les saisies ou la surveillance des réseaux sociaux sur lesquels les « exploits » des rodéos filmés sont souvent publiés. Mais à côté de l’aspect répressif qui reste une nécessité, il faudra aussi intégrer la dimension sociale de la prévention, comme le suggérait à raison Christophe Castaner lorsqu’il était ministre de l’Intérieur. Car les quartiers de banlieues dans lesquels se déroulent le plus souvent ces rodéos sont toujours en souffrance et en déficit de structures culturelles ou sportives. Le plan Borloo sur les banlieues en 2018 avait laissé espérer une vraie vision partagée pour l’avenir… avant qu’Emmanuel Macron ne l’enterre à peine publié.

Si certaines mesures ont toutefois été menées à bien, il reste encore beaucoup à faire pour ces quartiers et leurs habitants afin que ceux-ci, et notamment ceux qui subissent les rodéos, n’aient pas l’impression de vivre sous la loi du Far West…

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du dimanche 8 août 2021)

Posts les plus consultés de ce blog

Guerres et paix

La guerre menace encore une fois le Pays du Cèdre, tant de fois meurtri par des crises à répétition. Les frappes israéliennes contre le sud du Liban et les positions du Hezbollah ravivent, en effet, le spectre d’un nouveau conflit dans cette Terre millénaire de brassage culturel et religieux. Après quinze années de violence qui ont profondément marqué le pays et ses habitants (1975-1990), la paix est toujours restée fragile, constamment menacée par les ingérences étrangères, les divisions communautaires et une classe politique corrompue. La crise économique sans précédent qui frappe le pays depuis 2019, puis l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth en 2020, symbolisant l’effondrement d’un État rongé par des décennies de mauvaise gouvernance, ont rajouté au malheur de ce petit pays de moins de 6 millions d’habitants, jadis considéré comme la Suisse du Moyen-Orient. Victime d’une spectaculaire opération d’explosion de ses bipeurs et talkies-walkies attribuée à Israël, le Hezbollah – ...

Vaccin et vigilance

La résurgence de la coqueluche en France comme ailleurs en Europe a de quoi inquiéter. En France depuis le début de l’année, un total provisoire de 28 décès a été rapporté à Santé Publique France, dont 20 enfants (18 de moins de 1 an) et 8 adultes (de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). La circulation de la bactérie Bordetella pertussis, principale cause de la coqueluche, est si importante que les autorités s’attendent à de nouveaux cas à venir dans les prochains mois. Car la coqueluche est extrêmement contagieuse, une personne contaminée pouvant transmettre la maladie à 15 autres en moyenne… Et si elle a longtemps été considérée comme une maladie de la petite enfance, elle peut être sévère à tous les âges, voire mortelle pour les nourrissons, non ou partiellement vaccinés, et les personnes à risque telles que les femmes enceintes et les personnes âgées. Ce n’est pas la première fois que l’on est confronté à une résurgence de la coqu...

En marche

    Depuis douze siècles des pèlerins convergent vers Saint-Jacques-de-Compostelle qui, avec Jérusalem et Rome, est l’un des lieux des trois grands pèlerinages de la Chrétienté. Mais ceux qui marchent aujourd’hui sur les chemins de Compostelle ne le font pas seulement au nom de leur foi et n’arrivent pas forcément à la destination finale en Espagne. Les pèlerins du XXI e  siècle ne font souvent qu’une partie seulement de l’itinéraire millénaire avec des motivations bien plus diverses. Passionnés de randonnée pédestre, amoureux des paysages ou des monuments qui jalonnent le parcours désormais bien balisé et en partie classé au patrimoine mondial de l’Unesco, certains cheminent seuls, en couple ou en groupe pour accomplir une promesse personnelle, honorer un proche, rencontrer d’autres pèlerins de toutes nationalités ou tout simplement pour se retrouver soi-même. Car la marche est bonne pour le corps et l’esprit. « Les seules pensées valables viennent en marchant...