Accéder au contenu principal

Vivre avec

 masque

Ce sont de petits témoignages qui fleurissent sur les réseaux sociaux. Un jeune homme qui raconte qu’il "serre la main de [sa] copine pour retrouver la sensation". Un autre, nostalgique, qui regrette "les jours où on pouvait se serrer la main, la bonne époque…" Un troisième qui avoue continuer à "serrer la main de ses amis et de ses clients". Une autre qui fait la bise à ses collègues qu’elle n’avait pas vues depuis des semaines. Ou encore ce médecin qui s’est surpris à serrer la main de son patient, mécaniquement et à leur grande surprise… avant qu’ils ne partent vite se saisir de leur gel hydroalcoolique.

Ces témoignages, dont les sociologues feront sans doute leur miel, montrent combien il est difficile d’abandonner ces gestes jadis banals, ciment de notre vie sociale… et professionnelle. Et c’est bien désormais en entreprise que le respect des règles sanitaires – gestes barrière et distanciation sociale – semble poser problème. La force de l’habitude fait que les salariés, notamment dans les open spaces, tendent, en effet, à retrouver leur fonctionnement d’avant le confinement, entre discussions devant la machine à café et réunion où les participants sont bien trop proches et nombreux. À leur décharge certaines entreprises n’ont pas réaménagé suffisamment leurs locaux, se contentant de laisser leur DRH rappeler les règles sanitaires dans des courriels infantilisants qui finissent par se perdre…

Alors que l’épidémie semble gagner chaque jour en vigueur, laissant craindre la deuxième vague que pronostiquent certains experts, la situation a fait réagir le Premier ministre qui a clairement évoqué, mardi dans l’Hérault, la généralisation du port du masque sur le lieu de travail, plus seulement donc dans les lieux recevant du public. L’exécutif– qui a sans doute beaucoup à se faire reprocher dans sa communication sur les masques depuis le début de l’épidémie – marche toutefois sur des œufs. De la même façon qu’il délègue la responsabilité du port du masque en extérieur aux préfets et aux maires, il renvoie toute décision d’une généralisation du port du masque en entreprises aux partenaires sociaux. En juillet, il avait d’ailleurs estimé que les entreprises "doivent gérer au cas par cas, en fonction des situations". Mais ce cas par cas atteint vite ses limites lorsqu’il provoque des situations si disparates que les Français ne s’y retrouvent plus. À un moment, seul un cadre national peut apporter la cohérence et la lisibilité nécessaires.

En juillet, plusieurs médecins et l’Académie de médecine ont plaidé pour le port du masque sur le lieu de travail. "Le risque est grand de devoir payer un prix sanitaire, social et économique sans commune mesure avec la contrainte raisonnable que représentent ces nouvelles habitudes", estimait l’Académie, soulevant finalement la seule interrogation qui vaille : préfère-t-on revivre le confinement ou l’éviter en portant le masque ? Poser la question, c’est y répondre. Et aussi désagréable soit-il, il va nous falloir apprendre à vivre avec le masque.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 13 août 2020)

Posts les plus consultés de ce blog

Grandiose !

  Cent ans après les JO de Paris de 1924, les XXXIIIes Jeux Olympiques d’été de l’ère moderne se sont ouverts hier dans la Capitale au terme d’une cérémonie d’ouverture exceptionnelle qui est entrée dans l’histoire en en mettant plein les yeux au monde entier. Les athlètes ont défilé non pas dans un Stade olympique mais en bateau, sur la Seine, sur un parcours rythmé par une mise en scène de toute beauté mettant en valeur la France, son patrimoine, son Histoire, ses talents, avant de rejoindre le Trocadéro devant une Tour Eiffel parée des anneaux olympiques. Nul doute que cette cérémonie réussie, émouvante, populaire, inédite, fera date en se rangeant dans la longue liste des défilés qui ont marqué les JO mais aussi l’histoire de notre pays, de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 à celle pour le Bicentenaire de la Révolution française en 1989, en passant par la Libération de Paris dont on va bientôt célébrer les 80 ans. Cette cérémonie ponctue plusieurs années de préparatio...

Guerres et paix

La guerre menace encore une fois le Pays du Cèdre, tant de fois meurtri par des crises à répétition. Les frappes israéliennes contre le sud du Liban et les positions du Hezbollah ravivent, en effet, le spectre d’un nouveau conflit dans cette Terre millénaire de brassage culturel et religieux. Après quinze années de violence qui ont profondément marqué le pays et ses habitants (1975-1990), la paix est toujours restée fragile, constamment menacée par les ingérences étrangères, les divisions communautaires et une classe politique corrompue. La crise économique sans précédent qui frappe le pays depuis 2019, puis l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth en 2020, symbolisant l’effondrement d’un État rongé par des décennies de mauvaise gouvernance, ont rajouté au malheur de ce petit pays de moins de 6 millions d’habitants, jadis considéré comme la Suisse du Moyen-Orient. Victime d’une spectaculaire opération d’explosion de ses bipeurs et talkies-walkies attribuée à Israël, le Hezbollah – ...

Vaccin et vigilance

La résurgence de la coqueluche en France comme ailleurs en Europe a de quoi inquiéter. En France depuis le début de l’année, un total provisoire de 28 décès a été rapporté à Santé Publique France, dont 20 enfants (18 de moins de 1 an) et 8 adultes (de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). La circulation de la bactérie Bordetella pertussis, principale cause de la coqueluche, est si importante que les autorités s’attendent à de nouveaux cas à venir dans les prochains mois. Car la coqueluche est extrêmement contagieuse, une personne contaminée pouvant transmettre la maladie à 15 autres en moyenne… Et si elle a longtemps été considérée comme une maladie de la petite enfance, elle peut être sévère à tous les âges, voire mortelle pour les nourrissons, non ou partiellement vaccinés, et les personnes à risque telles que les femmes enceintes et les personnes âgées. Ce n’est pas la première fois que l’on est confronté à une résurgence de la coqu...