Le gouvernement pensait sans doute en avoir fini avec les masques, dont la pénurie au début de l’épidémie du coronavirus lui avait été violemment reprochée, tant par l’opinion publique que par les experts, agacés par sa communication approximative sinon mensongère sur leur utilité. Las ! Alors que désormais il y a pour les Français suffisamment de masques – chirurgicaux ou grand public en tissu – et que le gouvernement a largement fait évoluer sa doctrine jusqu’à aboutir à une obligation dans tous les lieux publics clos le 20 juillet dernier, voilà que survient un nouveau casse-tête. Au moment où l’épidémie de Covid-19 semble regagner de la vigueur en France – comme chez nos voisins – comment inciter les Français à bien porter le masque quand ceux-ci, au contraire, veulent profiter de leur été sans contraintes après l’épreuve du confinement ?
Chantre des territoires, Jean Castex entend bien ne pas se laisser enfermer par cette épineuse question et souhaite y associer les collectivités locales. À elles, en lien avec les préfets, de prendre les arrêtés d’obligation de port du masque dans les zones touristiques bondées, les marchés de plein air très fréquentés, les rues des centres-villes trop étroites pour absorber les foules voire les plages surpeuplées. Depuis plusieurs jours, on voit ainsi fleurir des arrêtés partout en France, incontestablement pertinents… mais au risque de la confusion. D’une commune à l’autre, les règles vont ainsi être différentes, ce qui est prohibé ici sera autorisé plus loin. Autant d’injonctions contradictoires qui pourraient déconcerter et décourager les Français. Rien ne vaut la clarté d’une règle simple, uniforme et compréhensible par tous, comme le réclame l’Académie de médecine qui martèle "masquez-vous, masquez-vous, masquez-vous".
Plus facile à dire qu’à faire à l’heure où, au nom de la liberté, certains refusent toute restriction dans leur quotidien au point d’aller le crier dans des manifestations sans masque comme on vient de le voir en Allemagne et comme on le voit depuis des mois aux Etats-Unis. Ces manifestants devraient se rappeler ce que disait Victor Hugo : "Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité."
Et notre responsabilité, collective et individuelle, aujourd’hui, en l’absence de traitement efficace et en attendant un vaccin, est bien d’utiliser le seul outil à notre disposition : le masque, si pénible soit-il à porter par forte chaleur. C’est, pour l’heure, la seule façon d’éviter un reconfinement généralisé que personne n’a envie de vivre.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mardi 4 août 2020)