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L'ordre répubicain

 

gendarmes

En rendant hommage à Eric Monroy, ce policier décédé en pleine intervention dans la nuit du 5 au 6 août après avoir été percuté par un automobiliste qui tentait de prendre la fuite, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a déclaré : "Refuser l’autorité, voilà le mal de la société". On se gardera bien de faire, comme le ministre, une généralisation aussi simpliste et large que colorée politiquement, ne serait-ce que parce qu’il y a bien d’autres maux dont souffre la société française, notamment concernant sa situation économique, sa situation sociale, les discriminations ou la précarité qui la minent, etc. En revanche, là où le ministre à raison, c’est que l’on assiste depuis quelques années à une inquiétante multiplication des incidents lors de contrôles, et notamment de contrôles routiers, qu’ils soient effectués par des gendarmes ou des policiers. Des refus d’obtempérer qui vont des insultes au délit de fuite et conduisent parfois à des drames, blessant ou tuant les membres des forces de l’ordre.

Selon une note de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) datant de novembre 2019, 25 policiers et gendarmes ont été tués durant l’exercice de leurs fonctions (contre 15 en 2017), dont 13 (4 policiers et 9 gendarmes) en mission. N’y aurait-il qu’un homme ou une femme portant l’uniforme décédé dans ces situations que ce serait déjà une mort de trop. Ce refus de l’autorité, de toute autorité institutionnelle, se constate aussi auprès des élus et notamment des maires. Depuis début 2020, 233 maires ou adjoints ont été agressés. Un phénomène qui s’aggrave et qui a conduit le sénateur LR Philippe Bas à demander au Premier ministre Jean Castex un "plan pour la sécurité" des élus. Dans un cas comme dans l’autre, les gendarmes et les policiers d’un côté, les élus locaux de l’autre, qui sont en première ligne sur le terrain face à une multitude et une diversité de problèmes à régler, n’attendent plus des mots ni des hommages mais bien des actes.

Les forces de l’ordre ont besoin de moyens, et notamment de moyens humains pour être davantage sur le terrain et retisser le lien de confiance avec la population ; un lien qui était si solide après les attentats de 2015 et qui s’est délité depuis, notamment lors des opérations de maintien de l’ordre des manifestations de Gilets jaunes, qui ont donné lieu à des violences policières. Les élus, dont les prérogatives sont grignotées année après année par les autres strates de notre millefeuille administratif, demandent eux aussi des moyens pour assurer sereinement leur mission au service de l’intérêt général.

Dans les deux cas, c’est bien l’ordre républicain qu’il convient de restaurer. Un travail aussi indispensable que difficile qui ne saurait souffrir des formules à l’emporte-pièce qui fleurissent sur les réseaux sociaux ou dans la bouche de certains responsables politiques. Il faut évidemment dénoncer toutes ces agressions qui abîment la République, mais il faut aussi apporter des réponses globales, sociétales, qui ne peuvent se cantonner au seul aspect sécuritaire du problème.

Car pour reprendre la formule de Jean Jaurès, "le progrès est la condition de l’ordre".

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 22 août 2020)

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