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Ne les oublions pas

 


Ils s’appelaient Charline, Nadifa, Stella, Myriam, Antonin et Léo. Ils avaient entre 25 ans et 35 ans, autant dire qu’ils avaient la vie devant eux. Une vie que ces jeunes diplômés avaient décidé de consacrer aux autres, comme donnant sens au propos d’Albert Enstein : « Chaque homme a le devoir de donner au monde au moins l’équivalent de ce que le monde lui a donné. »

Ces six jeunes humanitaires, dont cinq engagés auprès de l’ONG Acted, avaient, d’évidence, beaucoup à donner aux populations du Niger, ce si vaste et si beau pays frappé par la misère et menacé par le terrorisme djihadiste. Riches déjà de belles expériences dans différents organismes comme dans différents pays, Charline, Nadifa, Stella, Myriam, Antonin et Léo s’étaient engagés, avec le dynamisme de la jeunesse qui veut changer le monde, dans une juste cause non seulement auprès des Nigériens, mais surtout avec eux pour construire des projets pérennes de développement.

En s’accordant une journée de détente avec un guide et un chauffeur chevronnés pour voir les derniers troupeaux de girafes d’Afrique de l’Ouest, dans un parc naturel qui n’avait jamais connu d’attaques, ils ne s’imaginaient pas tomber dans une embuscade terroriste. Ils ont été tués, un à un, exécutés froidement. L’enquête, si elle aboutit un jour, dira s’il s’agissait de représailles à la présence française au Sahel, d’un acte crapuleux ou perpétré au nom d’une idéologie de mort. A dire vrai, peu importe.

L’émotion qui nous étreint tous à la mort de ces jeunes est aussi forte que le désarroi qui frappe aujourd’hui tous ceux qui œuvrent dans l’humanitaire. Jadis préservés des combats des conflits dont ils secourent les victimes civiles, ils se retrouvent désormais pris pour cibles, accusés d’appliquer la politique étrangère de leur pays quand ce n’est pas de néo-colonialisme. Face à ces drames, l’envie des ONG de partir pour protéger les leurs serait bien légitime.

Mais comme Acted l’a annoncé hier, rester pour aider des populations en souffrance qui n’ont plus rien, c’est faire acte de résistance et être à la hauteur. À la hauteur de l’idée que l’on se fait d’un monde plus solidaire, plus fraternel. À la hauteur de l’engagement de six jeunes gens morts loin de chez eux. Ils s’appelaient Charline, Nadifa, Stella, Myriam, Antonin et Léo. Ne les oublions pas.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 12 août 2020)

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