Accéder au contenu principal

Deux visions de l'Amérique


trump
Gage Skidmore from Peoria, AZ, United States of America

Dans trois mois, les Etats-Unis se rendent aux urnes pour réélire le républicain Donald Trump ou choisir le démocrate Joe Biden. Entre le président sortant qui avait triomphé d’Hillary Clinton il y a quatre ans – à la surprise générale et à celle du principal intéressé – et l’ancien vice-président de Barack Obama, le choix est radicalement différent pour une Amérique plus divisée que jamais. Car la polarisation de l’opinion qui était déjà à l’œuvre en 2016 n’a cessé depuis de se renforcer. Depuis quatre ans, en effet, Trump, soutenu par une base électorale ultraconservatrice qu’il sait chauffer à blanc, bouscule tout sur son passage, sur la scène intérieure comme sur la scène internationale. Entre outrances, éructations, colères, approximations et fake news déversées notamment à jet continu et quasiment 24 heures sur 24 sur son compte Twitter, Donald Trump a bousculé tous les codes et redéfini toutes les priorités des Etats-Unis à l’aune de son seul slogan de campagne "Make America great again" (rendons sa grandeur à l’Amérique). Israël, Syrie, Irak, Corée du Nord, Otan, Chine, climat, immigration, etc. : sur tous les sujets, Trump le bulldozer avance sans se soucier des conséquences avec toujours le souci de cliver au maximum. On est avec lui ou contre lui, on est amis ou ennemis. Le parti républicain l’a bien compris, qui s’est rangé très rapidement derrière Trump avec une fidélité qui a permis à ce dernier d’éviter la destitution mal préparée par les démocrates.

L’ancien business man, adepte des "deals" d’homme à homme, n’a que faire des règles : tous les moyens sont bons pour parvenir à ses fins. En dépit des difficultés à constituer son administration, en dépit des départs innombrables à la Maison Blanche, cette stratégie du chaos permanent a pourtant eu des résultats qu’on ne peut nier au plan économique. C’est d’ailleurs bien sur l’économie que Trump misait pour sa réélection.

Mais deux événements ont grippé la machine : l’épidémie de coronavirus et la mort de l’Afro-Américain George Floyd, tué par des policiers blancs lors d’un banal contrôle à Minneapolis. Dans les deux cas, Trump n’a pas mesuré l’impact de ces deux événements sur le pays. Face au premier, plaçant l’économie avant la vie de ses concitoyens – contrairement au choix inverse fait par de nombreux pays dont la France – le populiste Trump a tergiversé, versé dans les thèses complotistes, refusé d’écouter les experts et n’a donc pas pris les bonnes mesures pour contrôler une mortalité devenue exponentielle. Face au second, qui illustre la persistance d’un racisme chronique aux Etats-Unis, il n’a jamais cherché à rassembler les Américains, au point de faire sortir de leur réserve les anciens président Barack Obama et George W. Bush… Depuis plusieurs semaines, Joe Biden est en tête des sondages y compris dans les Etats clés qui peuvent faire basculer l’élection. Mais en 2016, Hillary Clinton était aussi en tête et Donald Trump, qu’on a si souvent enterré, a une telle capacité de rebond que rien n’est joué. "Ne sous-estimez jamais un homme qui se surestime", disait Roosevelt. La formule vaut plus que jamais pour Donald Trump.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 3 août 2020)

Posts les plus consultés de ce blog

Grandiose !

  Cent ans après les JO de Paris de 1924, les XXXIIIes Jeux Olympiques d’été de l’ère moderne se sont ouverts hier dans la Capitale au terme d’une cérémonie d’ouverture exceptionnelle qui est entrée dans l’histoire en en mettant plein les yeux au monde entier. Les athlètes ont défilé non pas dans un Stade olympique mais en bateau, sur la Seine, sur un parcours rythmé par une mise en scène de toute beauté mettant en valeur la France, son patrimoine, son Histoire, ses talents, avant de rejoindre le Trocadéro devant une Tour Eiffel parée des anneaux olympiques. Nul doute que cette cérémonie réussie, émouvante, populaire, inédite, fera date en se rangeant dans la longue liste des défilés qui ont marqué les JO mais aussi l’histoire de notre pays, de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 à celle pour le Bicentenaire de la Révolution française en 1989, en passant par la Libération de Paris dont on va bientôt célébrer les 80 ans. Cette cérémonie ponctue plusieurs années de préparatio...

Guerres et paix

La guerre menace encore une fois le Pays du Cèdre, tant de fois meurtri par des crises à répétition. Les frappes israéliennes contre le sud du Liban et les positions du Hezbollah ravivent, en effet, le spectre d’un nouveau conflit dans cette Terre millénaire de brassage culturel et religieux. Après quinze années de violence qui ont profondément marqué le pays et ses habitants (1975-1990), la paix est toujours restée fragile, constamment menacée par les ingérences étrangères, les divisions communautaires et une classe politique corrompue. La crise économique sans précédent qui frappe le pays depuis 2019, puis l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth en 2020, symbolisant l’effondrement d’un État rongé par des décennies de mauvaise gouvernance, ont rajouté au malheur de ce petit pays de moins de 6 millions d’habitants, jadis considéré comme la Suisse du Moyen-Orient. Victime d’une spectaculaire opération d’explosion de ses bipeurs et talkies-walkies attribuée à Israël, le Hezbollah – ...

Vaccin et vigilance

La résurgence de la coqueluche en France comme ailleurs en Europe a de quoi inquiéter. En France depuis le début de l’année, un total provisoire de 28 décès a été rapporté à Santé Publique France, dont 20 enfants (18 de moins de 1 an) et 8 adultes (de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). La circulation de la bactérie Bordetella pertussis, principale cause de la coqueluche, est si importante que les autorités s’attendent à de nouveaux cas à venir dans les prochains mois. Car la coqueluche est extrêmement contagieuse, une personne contaminée pouvant transmettre la maladie à 15 autres en moyenne… Et si elle a longtemps été considérée comme une maladie de la petite enfance, elle peut être sévère à tous les âges, voire mortelle pour les nourrissons, non ou partiellement vaccinés, et les personnes à risque telles que les femmes enceintes et les personnes âgées. Ce n’est pas la première fois que l’on est confronté à une résurgence de la coqu...