Accéder au contenu principal

Monde nouveau

drapeaufrance


On dit parfois que la forme, c’est le fond qui remonte à la surface. Il est à espérer que l’adage n’est pas tout à fait vrai car sur la forme, la communication de l’exécutif depuis le début de la crise du coronavirus est pour le moins chaotique et parfois contradictoire. Il y a eu la déclaration de l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn assurant que le risque de voir ce virus qui paralysait Wuhan arriver chez nous était "pratiquement nul" ; les moqueries de la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye sur les mesures drastiques de confinement prises par l’Italie et qui finiront par être appliquées pareillement en France ; l’explication sur l’inutilité du port généralisé du masque – qui s’est avéré un mensonge pour couvrir une pénurie imputable au précédent quinquennat – qui évolue maintenant vers un masque pour tous ; le maintien du premier tour des élections municipales invitant à la fois les Français à aller voter et à rester chez eux, etc. Si l’on ajoute à ces volte-face des prises de paroles ministérielles nombreuses et parfois précipitées, notamment sur le déconfinement alors que le pic épidémique n’était pas atteint, ces embrouillaminis ont été de nature à troubler les Français.

Mais à la décharge d’Emmanuel Macron et du gouvernement, qui peut dire, notamment dans les oppositions, qu’il aurait pu faire mieux ? Ces tâtonnements face à une crise mouvante n’étaient-ils pas logiques, dès lors que le chef de l’Etat a pris ses décisions en fonction de comités scientifiques dont les avis ont été changeants ? Et à la différence d’un Trump ou d’un Johnson pétris de certitudes, Emmanuel Macron ne s’est-il pas toujours montré réfléchi et prudent face à une épidémie d’ampleur historique ? Enfin, si son langage s’est montré martial – "Nous sommes en guerre" – le Président n’a-t-il pas su enclencher une dynamique d’union nationale et son gouvernement n’a-t-il pas apporté très tôt des réponses, économiques et sanitaires, à la crise ? La façon dont l’exécutif a géré l’épidémie de Covid-19 donnera lieu plus tard, n’en doutons pas, à un examen approfondi, notamment par le Parlement où les oppositions joueront leur rôle légitime.

Mais là n’est sans doute ni l’essentiel, ni la priorité pour Emmanuel Macron qui doit s’exprimer pour la 4e fois lundi devant les Français. Pour le chef de l’Etat, s’il s’agit d’insister sur l’importance du confinement, il s’agit surtout de dresser des perspectives et dévoiler sa stratégie pour "l’après". Car pour celui qui a porté ces trois dernières années des réformes libérales, le Covid-19 a d’ores et déjà bouleversé la donne, signant le retour de l’Etat providence et soulignant les aspects sombres de la mondialisation.

L’effet de blast du coronavirus sur la société impose de tout revoir, de tout réinventer comme en 1945 au sortir de la guerre. Emmanuel Macron en a très tôt été convaincu puisque dès le 16 mars, il assurait que "beaucoup de certitudes, de convictions sont balayées, seront remises en cause. Le jour d’après, ce ne sera pas un jour d’avant", et promettait d’en tirer "toutes les conséquences". Autant dire que se dresse devant le Président marcheur du "nouveau monde" de 2017 un défi immense : inventer pour la France, enfin, un monde nouveau.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 10 avril 2020)

Posts les plus consultés de ce blog

Grandiose !

  Cent ans après les JO de Paris de 1924, les XXXIIIes Jeux Olympiques d’été de l’ère moderne se sont ouverts hier dans la Capitale au terme d’une cérémonie d’ouverture exceptionnelle qui est entrée dans l’histoire en en mettant plein les yeux au monde entier. Les athlètes ont défilé non pas dans un Stade olympique mais en bateau, sur la Seine, sur un parcours rythmé par une mise en scène de toute beauté mettant en valeur la France, son patrimoine, son Histoire, ses talents, avant de rejoindre le Trocadéro devant une Tour Eiffel parée des anneaux olympiques. Nul doute que cette cérémonie réussie, émouvante, populaire, inédite, fera date en se rangeant dans la longue liste des défilés qui ont marqué les JO mais aussi l’histoire de notre pays, de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 à celle pour le Bicentenaire de la Révolution française en 1989, en passant par la Libération de Paris dont on va bientôt célébrer les 80 ans. Cette cérémonie ponctue plusieurs années de préparatio...

Guerres et paix

La guerre menace encore une fois le Pays du Cèdre, tant de fois meurtri par des crises à répétition. Les frappes israéliennes contre le sud du Liban et les positions du Hezbollah ravivent, en effet, le spectre d’un nouveau conflit dans cette Terre millénaire de brassage culturel et religieux. Après quinze années de violence qui ont profondément marqué le pays et ses habitants (1975-1990), la paix est toujours restée fragile, constamment menacée par les ingérences étrangères, les divisions communautaires et une classe politique corrompue. La crise économique sans précédent qui frappe le pays depuis 2019, puis l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth en 2020, symbolisant l’effondrement d’un État rongé par des décennies de mauvaise gouvernance, ont rajouté au malheur de ce petit pays de moins de 6 millions d’habitants, jadis considéré comme la Suisse du Moyen-Orient. Victime d’une spectaculaire opération d’explosion de ses bipeurs et talkies-walkies attribuée à Israël, le Hezbollah – ...

Vaccin et vigilance

La résurgence de la coqueluche en France comme ailleurs en Europe a de quoi inquiéter. En France depuis le début de l’année, un total provisoire de 28 décès a été rapporté à Santé Publique France, dont 20 enfants (18 de moins de 1 an) et 8 adultes (de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). La circulation de la bactérie Bordetella pertussis, principale cause de la coqueluche, est si importante que les autorités s’attendent à de nouveaux cas à venir dans les prochains mois. Car la coqueluche est extrêmement contagieuse, une personne contaminée pouvant transmettre la maladie à 15 autres en moyenne… Et si elle a longtemps été considérée comme une maladie de la petite enfance, elle peut être sévère à tous les âges, voire mortelle pour les nourrissons, non ou partiellement vaccinés, et les personnes à risque telles que les femmes enceintes et les personnes âgées. Ce n’est pas la première fois que l’on est confronté à une résurgence de la coqu...