Effet collatéral du confinement : les chiffres de la délinquance sont en forte baisse. Coups et blessures volontaires, violences sexuelles, vols avec ou sans armes, avec ou sans violences, vols de voitures ou à l’intérieur des véhicules, escroqueries : tous les voyants semblent au vert avec des baisses d’un mois sur l’autre de – 33 % à – 51 % selon les chiffres publiés lundi par le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI). Si on ajoute combien la fermeture des frontières pénalise le trafic de drogues et notamment celui de cannabis, on pourrait presque penser que le confinement est venu à bout de tous les maux qui minent le quotidien de milliers de Français chaque année.
Mais pour spectaculaires que soient ces chiffres, il convient d’être très mesuré, au moins autant que les spécialistes du SSMSI qui estiment que l’interprétation de ces pourcentages "s’avère très complexe."
Il faut en effet noter, d’abord, que les chiffres sont ceux des crimes et délits "enregistrés" par la police et la gendarmerie. Or, le confinement de la population a fort logiquement influencé les conditions de dépôt de plaintes, tant pour les victimes que les forces de sécurité. Des faits pourtant commis sont sans doute statistiquement ignorés.
Second point, la délinquance n’a pas disparu, mais elle s’est adaptée au confinement : certains faits ne peuvent plus être commis, notamment sur la voie publique, quand d’autres se multiplient. Violences intrafamiliales sur les femmes ou les enfants facilitées par le huis clos du confinement ; multiplication des cyber-escroqueries à l’heure de l’explosion du télétravail ; abus de confiance au domicile de personnes âgées ou fragiles inquiètes face au coronavirus ; cambriolages d’entrepôts ou de commerces fermés ; ou encore agressions particulièrement odieuses de personnels soignants sur leur trajet domicile-travail. On peut même y ajouter la délinquance routière avec de grands excès de vitesse sur des routes moins fréquentées…
Il convient donc de regarder avec sang froid les chiffres exceptionnels de la délinquance à l’aune de la situation exceptionnelle du confinement. Et aussi se préparer à un possible rebond lors du déconfinement.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mardi 8 avril 2020)