Les propos alarmants de nombreux experts qui depuis ce week-end parlent d’épidémie « hors de contrôle » en France ; la fatigue et la détresse qu’on a pu lire dans les témoignages de soignants, médecins ou infirmières, en première ligne dans tous les hôpitaux de France et non pas seulement ceux de Paris ; l’inquiétude qui n’a cessé de monter dans les Ehpad ; le constat fait par un nombre croissant de Français qu’ils connaissaient désormais dans leur entourage proche des personnes contaminées par le coronavirus et peut-être même décédées de la Covid-19 : autant de signes qui, ces derniers jours, ont acté une accélération dramatique de la propagation de l’épidémie en France, autant de signaux d’alerte qui ont conditionné les Français à se préparer à endurer de nouvelles mesures restrictives pour tenter de freiner le virus. Mais même en sachant tout cela, le reconfinement que s’apprêterait à leur annoncer ce soir Emmanuel Macron – s’il se réalise effectivement – constituera pour les Français un immense choc.
Un choc, car depuis le déconfinement du mois de mai, le gouvernement, les chefs d’entreprise, les citoyens dans leur grande majorité pensaient qu’un reconfinement général était impossible, inimaginable même. De taboue, cette perspective, pourtant déjà utilisée en Israël ou en Irlande, est apparue au fil du temps inéluctable, et la solution la plus efficace pour casser les chaînes de contamination qui ne cessent de s’allonger.
Un choc car nous allons devoir recommencer à vivre confinés avec tout ce que cela suppose de contraintes, de pression psychologique et de détresse morale pour beaucoup de Français. Quand bien même ce reconfinement serait « adouci » par rapport à celui que nous avons connu au printemps, il n’en restera pas moins une épreuve qui va peser sur chacun de nous.
Un choc pour l’économie du pays, ensuite, déjà durement éprouvée par le premier confinement et qui, tout juste convalescente, se retrouve à nouveau un genou à terre. L’espoir d’un rebond de l’activité paraîtra impossible pour nombre de PME ou d’indépendants.
Un choc politique, enfin, puisqu’un reconfinement signe, d’évidence, l’échec du déconfinement et de la stratégie mise en œuvre par le gouvernement depuis mai. À la décharge de l’exécutif, nos voisins européens n’ont pas fait mieux, mais l’impréparation face à une deuxième vague pourtant annoncée de longue date, interroge. Les oppositions ne s’y trompent pas.
Face à cette situation exceptionnelle, gageons toutefois que nous retrouverons les réflexes de solidarité qui nous avaient permis de tenir il y a sept mois, et que cette fois sera la bonne…
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 28 octobre 2020)