Accéder au contenu principal

La fin de l’omerta

 

stop

L’affaire du violeur de Sorèze qui vient d’être jugée à Albi et s’est terminée par la condamnation de l’accusé à 12 ans de prison n’a pas eu le retentissement qu’espéraient les victimes, dont nous avons recueilli les témoignages poignants. "Nous avons le sentiment que cette affaire n’intéresse personne", nous disent-elles. Et pourtant, cette affaire est importante car elle raconte comment peut s’installer pendant des années, dans l’entre-soi d’un village, une omerta, un silence de plomb nourri par la honte, la peur ou l’ignorance, le qu’en-dira-t-on et le pas de vague,… Combien de villages ont-ils vécu de semblables affaires, longtemps étouffées, et qui n’ont été révélées parfois que trop tardivement pour que la justice s’en saisisse ? Combien de victimes attendent toujours que soient reconnues leurs souffrances ? Combien d’affaires – qui ne concernent pas des célébrités et ne sont donc pas sous les projecteurs – attendent de trouver une issue ?

Heureusement les temps changent et la vague de libération de la parole ouverte par le mouvement MeToo s’est généralisée dans toutes les couches de la société et peut donner, jusque dans le plus petit village, le surplus de courage aux victimes ou aux témoins pour rompre l’insupportable silence et l’impunité qui en découle.

Accueillir la parole des victimes avec bienveillance, les écouter, les considérer, leur dire qu’elles ne sont pas seules est un devoir qui n’a pas toujours été rempli comme il se devait. Les institutions en ont pris acte et ont évolué ; la justice, les enquêteurs, avec des moyens encore insuffisants, traitent mieux ces affaires avec une réelle rigueur mais non sans difficultés. Car au tribunal médiatique des réseaux sociaux toujours prompts à condamner, il faut opposer le temps judiciaire, forcément plus long, qui doit tenir compte du respect de la présomption d’innocence ou des délais de prescription. Mais lorsque les faits sont pénalement établis, la justice peut faire son œuvre, dire le droit, et rétablir la vérité pour que la honte change de camp et que l’on en finisse avec ces omertas, qu’on ne puisse plus dire qu’on ne savait pas…

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du dimanche 25 avril 2021)

Posts les plus consultés de ce blog

Moine-soldat

Dans le marathon de l’examen de la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le calendrier a marqué une pause ce jeudi à l’occasion de la niche parlementaire du Parti socialiste. Une pause mise à profit par le gouvernement pour aller sur le terrain défendre une réforme toujours massivement rejetée par 7 Français sur 10. À l’avant-veille de la quatrième journée de manifestation appelée par l’intersyndicale, Elisabeth Borne et Gérald Darmanin se sont ainsi rendus hier à Neuville-en-Ferrain, dans le Nord, Olivier Dussopt à Toulouse, où il a notamment rencontré six lecteurs de La Dépêche du Midi au siège de notre journal pour répondre à leurs questions et leurs inquiétudes. Celui qui enchaîne à un rythme soutenu les interviews dans les matinales et défend depuis lundi son texte devant une Assemblée nationale survoltée s’est montré tel qu’en lui-même : un moine-soldat de la macronie. Moine, parce que le ministre connaît sur le bout des doigts le catéchisme de la réforme, son dogme du r

L'indécence et la dignité

C’est sans doute parce qu’elle avait le souriant visage de l’enfance, cheveux blonds et yeux bleus, parce qu’elle aurait pu être notre fille ou notre nièce, notre petite sœur ou notre cousine, une camarade ou la petite voisine. C’est pour toutes ces raisons que le meurtre barbare de la petite Lola a ému à ce point la France. Voir le destin tragique de cette bientôt adolescente qui avait la vie devant elle basculer à 12 ans dans l’horreur inimaginable d’un crime gratuit a soulevé le cœur de chacune et chacun d’entre nous. Et nous avons tous pensé à ses parents, à sa famille, à ses proches, à ses camarades de classe, à leur incommensurable douleur que notre solidarité bienveillante réconfortera mais n’éteindra pas. Tous ? Non, hélas. Dans les heures qui ont suivi le drame, certains ont instrumentalisé de façon odieuse la mort de cette enfant pour une basse récupération politique au prétexte que la suspecte du meurtre était de nationalité étrangère et visée par une obligation de quitter l

Bien manger

C’est un petit logo qui nous est devenu familier lorsque nous faisons nos courses. Impulsé par un règlement européen (INCO) de 2014, établissant des règles pour informer les consommateurs sur la déclaration nutritionnelle ou la liste des ingrédients d’un produit, le Nutri-Score, ses cinq lettres de A à E et ses cinq couleurs de vert à rouge, est désormais bien ancré dans le paysage. De plus en plus présent sur le devant des emballages, on peut même dire que c’est un succès européen puisqu’il est présent non seulement en France, qui l’a introduit en 2017, mais également en Belgique, en Allemagne, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Espagne et même en Suisse, qui ne fait pourtant pas partie de l’Union européenne. Face à des étiquettes qui livrent la composition des produits écrite en tout petits caractères difficilement lisibles, certains consommateurs s’étaient déjà tournés vers des applications comme Yuka. Avec un smartphone, il suffit alors de scanner le code-barres d’un produit pour en a