Les maires et élus locaux sont quotidiennement sollicités parce qu’ils sont, "à portée d’engueulade", les élus les plus proches des Français, leurs préférés même selon les enquêtes d’opinion. Mais leur engagement au service de l’intérêt général et auprès de leurs administrés se heurte de plus en plus à la violence d’une société toujours plus consumériste et individualiste. Insultes et menaces, notamment sur les réseaux sociaux, tags sur les murs de leur domicile, intimidation et menace physiques, jusqu’aux coups et parfois jusqu’à la mort. En 2020, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, les élus ont été 1 276 fois la cible d’agressions, soit une hausse de 200 % par rapport à 2019 ! Certes l’épidémie de Covid-19 a suscité son lot de colère face à une vie complètement chamboulée, marquée par des confinements éprouvants et des restrictions aux libertés publiques douloureuses, mais rendues nécessaires pour lutter contre la propagation du coronavirus. Emmanuel Macron lui-même a reconnu, mercredi dans son adresse aux Français, que la pandémie a charrié lassitude, fatigue, énervement et emportement. Mais face à la violence inadmissible qu’essuient les élus il est plus que temps que les citoyens de tous bords se fassent entendre et se lèvent pour dire stop.
"La République affirme le droit et impose le devoir" disait Victor Hugo. Nous avons tous, collectivement, le devoir de la défendre et de défendre ceux à travers lesquels elle s’exprime. Dire stop aux violences physiques mais dire stop aussi aux violences verbales qui minent depuis trop longtemps le débat public à force de polémiques stériles qui ne font que le jeu des extrêmes, ou de pompiers-pyromanes de plateau télé. La force d’une démocratie comme la nôtre est justement qu’elle permet l’expression de toutes les opinions pour peu qu’elles respectent le cadre républicain. Mais cette force, attaquée de toutes parts, est aujourd’hui fragilisée, en France comme d’ailleurs dans d’autres pays où la polarisation des opinions ne laisse plus place à la nuance.
C’est pour cela, pour retrouver le sens du débat entre adversaires plutôt que celui du combat entre ennemis, qu’il ne faut rien laisser passer, l’agression physique d’un élu comme l’intrusion d’un groupuscule d’extrême droite dans l’enceinte d’un conseil régional.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du dimanche 4 avril 2021)