Crise sanitaire assurément, crise politique et diplomatique parfois, le coronavirus chinois va-t-il virer à la crise économique, au krach boursier qui entraînerait l’économie mondiale dans une inquiétante spirale à l’instar de ce qui s’était passé en 2008 après la crise des subprimes américaines ? On n’en est pas encore là, mais au fur et à mesure que s’étendent les contaminations au Covid-19 dans le monde, l’inquiétude grandit et les marchés ont horreur de l’incertitude. Dès lors pas étonnant que la semaine passée, toutes les bourses aient lourdement chuté.
C’est que la crise du coronavirus a mis en lumière deux faits majeurs pour l’économie et la marche du monde.
Le premier, c’est la vulnérabilité de la Chine, d’évidence un colosse aux pieds d’argile. Dans une économie toujours plus mondialisée, l’Empire du milieu – adepte du concept "un pays, deux systèmes" – s’est retrouvé paralysé par le virus, contraint de fermer des usines et d’arrêter des productions pour endiguer une épidémie d’évidence mal maîtrisée lors de son déclenchement. Une situation qui pèse d’autant plus sur l’économie mondiale que depuis la précédente épidémie du SRAS en 2002-2003, le poids économique de la Chine a considérablement augmenté : de 5 % du PIB mondial et 5 % de la croissance mondiale il y a 15 ans le pays, qui représente 12 % du commerce mondial, pèse aujourd’hui 17 % du PIB mondial et contribue à 30 % de la croissance. Quand la Chine tousse, c’est donc la planète qui s’enrhume…
D’où le second fait majeur induit par l’épidémie de coronavirus : la prise de conscience des autres pays de leur dépendance économique à la Chine, devenue l’atelier de la planète. Commerce, industrie, aéronautique, technologies, automobile mais aussi tourisme, aérien, agriculture, alimentation, médicaments... Tous les secteurs dépendent à divers degrés de la Chine et sont donc touchés par le ralentissement économique du pays enlisé dans l’épidémie.
Dès lors, le coronavirus peut constituer un électrochoc, un "game changer" dans la mondialisation pour reprendre l’expression du ministre de l’Economie Bruno Le Maire, c’est-à-dire l’occasion d’enclencher une nouvelle donne. Celle-ci ne saurait être une démondialisation dont certains rêvent ou le retour d’un illusoire protectionnisme, car les échanges internationaux sont l’un des éléments clés de toutes les économies, au premier rang desquelles l’économie française qui sait exporter son savoir-faire par exemple dans le luxe. En revanche, cette nouvelle donne peut consister à regarder s’il est toujours aussi pertinent de faire fabriquer en Chine des produits dont le coût de revient final pourrait être désormais pas si éloigné d’une production en Europe. Cette relocalisation ne pourra pas concerner tous les produits, mais à l’heure où la prise en compte de l’empreinte environnementale est capitale, la réflexion mérite d’être lancée.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 2 mars 2020)