L’épidémie de coronavirus, on le voit désormais tous les jours, n’est plus seulement une crise sanitaire mondiale, mais un événement planétaire qui bouleverse tout sur son passage en soulignant les faiblesses – mais aussi la capacité de mobilisation et de résilience – de nos sociétés : la diplomatie, l’économie, la vie quotidienne, les loisirs, le travail, l’école… Le Covid-19 chamboule tout, apportant chaque jour, pas par pays, le décompte inquiétant des nouveaux cas de contamination.
Va-t-il pour autant impacter les prochaines élections municipales dont le premier tour se tient dans moins de 15 jours ? Pour l’heure, personne n’ose envisager un report du scrutin. Non seulement ce serait politiquement ravageur alors que l’on aborde la dernière ligne droite, que les candidats mettent toutes leurs forces dans la bataille et que les Français – même si tous n’ont pas encore fait leur choix définitif – souhaitent participer à l’élection de celui qui reste leur élu préféré. Mais un report s’avérerait aussi particulièrement compliqué à organiser : ne concernerait-il que les départements les plus touchés par le coronavirus qu’il créerait, de fait, une rupture de l’égalité républicaine entre Français. Impensable. Et qui dit report global dit choisir une nouvelle date, alors même qu’on n’a aucune idée de la façon dont va évoluer l’épidémie. Emmanuel Macron admettait lui-même mardi soir que la phase 2 dans laquelle la France se trouve pourrait durer "des semaines et sans doute des mois."
Dès lors, rester sur le calendrier prévu – les 15 et 22 mars – est pour l’heure une solution de sagesse, qui n’empêche en rien les autorités de prendre si besoin des mesures particulières d’hygiène dans les bureaux de vote tout en continuant à marteler des messages de prévention qui doivent lutter contre la kyrielle de rumeurs et de fausses informations qui circulent.
Car plus que le virus lui-même, les municipales ont davantage à craindre de l’effet de psychose que provoque le Covid-19 sur les populations. Par peur de se retrouver dans des bureaux de vote à manipuler des bulletins et des enveloppes, passer dans des isoloirs ou signer un parapheur passant de mains en mains, certains électeurs vont-ils déserter les urnes, alors qu’il n’y a pas davantage de danger que lorsqu’ils vont au supermarché ? Nul ne le sait, mais certains candidats commencent à s’inquiéter en observant un nombre de procurations beaucoup plus bas qu’à l’accoutumée. D’autres, notamment à droite, craignent que les aînés, qui votent plus que la moyenne, décident de rester chez eux.
Au final, le coronavirus apparaît comme un possible catalyseur d’abstention dont notre démocratie se passerait bien.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 5 mars 2020)