Accéder au contenu principal

Double peine

vieux


Le cri d’alarme poussé vendredi en direction du ministre de la Santé Olivier Véran par les professionnels de la gériatrie sur la situation des personnes âgées face au coronavirus doit être entendu. Alors que les personnels de ces structures font face – comme dans les hôpitaux ou les cabinets de médecine générale en ville – à un manque critique de masques, les cas de contamination dans plusieurs Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) se sont multipliés ces derniers jours, dans le Doubs, à Paris ou encore à Mauguio près de Montpellier. « En raison du nombre élevé de co-morbidités, cette population est assortie d’un taux de mortalité de près de 15 %, ce qui pourrait se traduire par plus de 100 000 décès dans l’éventualité d’une généralisation que nous n’osons imaginer », s’alarment les professionnels.

A l’inquiétude qui étreint les familles de voir leurs aînés contaminés par le coronavirus s’est ajoutée la crainte de les voir victimes de terribles choix éthiques en cas d’hospitalisation. Faute de places suffisantes en réanimation, des soignants dans les zones les plus touchées par l’épidémie (dans la région Grand Est) ont confié avoir renoncé à intuber des patients de 70 ans déjà malades. Ce tri entre patients en fonction de leurs chances de survie a déjà eu lieu dans certains hôpitaux d’Italie du Nord, devenue le plus important foyer du Covid-19 dans le monde.

Nos aînés sont donc confrontés à une double peine : la solitude et une possible discrimination. La solitude, puisque chez eux ou en établissement ils sont privés de la visite de leurs enfants et surtout de leurs petits-enfants en raison des règles de confinement qui doivent les protéger de toute contamination. « Un crève-cœur » avait reconnu Emmanuel Macron, mais « nécessaire temporairement. » La discrimination, lorsque les personnels soignants se retrouvent contraints – terrible épreuve – à faire des choix entre patients.

La première est compréhensible ; la seconde, qui heurte les consciences, appelle à des actes forts pour ne pas la rendre inéluctable.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 23 mars 2020)

Posts les plus consultés de ce blog

Moine-soldat

Dans le marathon de l’examen de la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le calendrier a marqué une pause ce jeudi à l’occasion de la niche parlementaire du Parti socialiste. Une pause mise à profit par le gouvernement pour aller sur le terrain défendre une réforme toujours massivement rejetée par 7 Français sur 10. À l’avant-veille de la quatrième journée de manifestation appelée par l’intersyndicale, Elisabeth Borne et Gérald Darmanin se sont ainsi rendus hier à Neuville-en-Ferrain, dans le Nord, Olivier Dussopt à Toulouse, où il a notamment rencontré six lecteurs de La Dépêche du Midi au siège de notre journal pour répondre à leurs questions et leurs inquiétudes. Celui qui enchaîne à un rythme soutenu les interviews dans les matinales et défend depuis lundi son texte devant une Assemblée nationale survoltée s’est montré tel qu’en lui-même : un moine-soldat de la macronie. Moine, parce que le ministre connaît sur le bout des doigts le catéchisme de la réforme, son dogme du r

L'indécence et la dignité

C’est sans doute parce qu’elle avait le souriant visage de l’enfance, cheveux blonds et yeux bleus, parce qu’elle aurait pu être notre fille ou notre nièce, notre petite sœur ou notre cousine, une camarade ou la petite voisine. C’est pour toutes ces raisons que le meurtre barbare de la petite Lola a ému à ce point la France. Voir le destin tragique de cette bientôt adolescente qui avait la vie devant elle basculer à 12 ans dans l’horreur inimaginable d’un crime gratuit a soulevé le cœur de chacune et chacun d’entre nous. Et nous avons tous pensé à ses parents, à sa famille, à ses proches, à ses camarades de classe, à leur incommensurable douleur que notre solidarité bienveillante réconfortera mais n’éteindra pas. Tous ? Non, hélas. Dans les heures qui ont suivi le drame, certains ont instrumentalisé de façon odieuse la mort de cette enfant pour une basse récupération politique au prétexte que la suspecte du meurtre était de nationalité étrangère et visée par une obligation de quitter l

Nouveaux obscurantismes

Fin 2019, le transfert de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) de Matignon vers le ministère de l’Intérieur, au sein d’un secrétariat spécialisé dans la radicalisation (le CIPDR, Comité Interministériel de Prévention de la Délinquance et de la Radicalisation), avait provoqué émoi et inquiétude chez les associations d’aides aux victimes des sectes. L’éventualité d’une suppression des archives et du site internet de la Miviludes, dont le travail était unanimement reconnu depuis 17 ans, avait ajouté aux craintes de voir amoindris les moyens d’un service de l’État, d’évidence, indispensable. Tout est ensuite rentré dans l’ordre et ce retour à la normale est sans doute dû à l’épidémie de Covid-19. Car la pandémie historique a suscité de la peur et des inquiétudes évidemment légitimes dans la population effrayée par ce coronavirus dont on ne connaissait pas encore toutes les conséquences sur la santé et contre lequel on n’avait pas e