Le 13 avril 2020, après presqu’un mois de confinement, Emmanuel Macron s’adressait aux Français pour tenter de les galvaniser, les assurer que l’espoir était là et qu’il fallait tenir. Il évoquait même l’« après » en lançant « sachons sortir des sentiers battus, des idéologies, nous réinventer – et moi le premier ».
Le chef de l’Etat aux réformes libérales du début du quinquennat allait alors revêtir les habits d’un président social-démocrate et pratiquer le « quoi qu’il en coûte » d’un Etat-providence pour maintenir à flot une économie en passe d’être submergée par la vague épidémique. Mais s’il a modifié son logiciel politique pour faire face au Covid-19, Emmanuel Macron a conservé le caractère jupitérien de sa présidence, décidant seul, dans le huis clos d’un opaque conseil de défense sanitaire, exaspérant les oppositions – sans prises sur le cours des choses ni idées – et bousculant ses propres ministres jusqu’au Premier d’entre eux. Jean Castex s’était ainsi retrouvé contraint d’annoncer le 29 janvier dernier qu’il n’y aurait pas le 3e confinement que tout le monde attendait. Fidèle à son intuition et à son sens politique, Emmanuel Macron avait décidé de repousser ce confinement angoissant, tablant sur la montée en puissance de la campagne de vaccination pour passer la vague et désireux de remporter ce « pari » politique face aux injonctions des mandarins du Conseil scientifiques et de tout ce que la France compte de commentateurs patentés et d’épidémiologistes de plateaux télé. L’épidémie progressait mais le Président entendait bien rester le maître des horloges.
Jusqu’à ce lundi… Alors que la 3e vague épidémique est une réalité que vivent depuis des jours les hôpitaux franciliens saturés, et que la campagne vaccinale avance à un rythme de tortue, faute de doses et d’une logistique millimétrée, Emmanuel Macron a reconnu depuis Montauban que « le maître du temps, c’est le virus malheureusement… » Et qu’il allait donc falloir prendre de nouvelles mesures, expérimenter de nouvelles méthodes non plus seul mais en concertation. La multiplication ces dernières heures des consultations tous azimuts avec les scientifiques, les médecins ou les élus locaux pour imaginer les solutions territorialisées les plus efficaces et les plus acceptables pour les Français constitue sans doute, un an après le premier confinement, un tournant dans la gestion de l’épidémie. Et la preuve que les certitudes, parfois martelées comme la méthode Coué, laissent désormais place à un fonctionnement moins vertical et une humilité bienvenue.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 18 mars 2021)