Accéder au contenu principal

En attendant Macron

 

macron

À force d’évoquer pour l’épidémie de Covid-19, jusque dans les propos du Premier ministre Jean Castex, le film « Un jour sans fin » – dans lequel l’acteur Bill Murray incarne un journaliste qui revit sans cesse la même journée – les Français en viennent à revivre la séquence qu’ils avaient endurée fin janvier : attendre la prise de parole d’Emmanuel Macron comme on attend Godot. Une nouvelle fois, en effet, les voici face à un interminable feuilleton à suivre en direct sur les chaînes d’information en continu : quand le Président va-t-il s’exprimer ? Ce mercredi soir ? La semaine prochaine ? Dans dix jours ? Avant ou après Pâques ? Et que va-t-il dire ? Quelles mesures de freinage va-t-il décider ? Jusqu’où le curseur va-t-il être poussé dans l’inventivité de nouvelles mesures pour freiner la troisième vague galopante sans en passer par le confinement strict que réclament à cor et à cri les personnels soignants ? Et leur mise en œuvre va-t-elle nous replonger, comme il y a quelques jours avec une attestation de déplacement kafkaïenne, dans cet Absurdistan dont se moquait naguère le grand journal allemand Die Zeit ?

Ballottés entre éléments de langage ministériels alambiqués et tribunes d’épidémiologistes inquiets, les Français attendent et s’impatientent, jugeant de plus en plus sévèrement l’exécutif… 70 % des Français évaluent ainsi négativement la communication globale du gouvernement sur la crise sanitaire selon notre sondage Odoxa-La Dépêche paru mardi.

Pour le chef de l’Etat, de plus en plus critiqué pour avoir fait le pari – même s’il récuse le terme – de ne pas reconfiner fin janvier, il y a donc urgence à reprendre la main pour expliquer que le temps gagné sur un nouveau confinement n’a pas été un temps perdu face à la troisième vague. Si Emmanuel Macron a récemment reconnu que « le maître du temps, c’est le virus malheureusement… », pas question pour autant de regretter ses choix, de faire un « mea culpa » comme a pu le faire son homologue Angela Merkel. Question de tempérament et question de positionnement institutionnel aussi puisque depuis le début de la crise, Emmanuel Macron est bel et bien le seul à décider à l’issue de conseils de défense sanitaire bien peu transparents.

Le « Président épidémiologiste », comme l’appellent certains de ses proche,  peut-il toutefois s’affranchir totalement des avis scientifiques, dont il suivait pourtant scrupuleusement les préconisations au début de l’épidémie, pour « prendre son risque », politiquement porteur, en inventant une improbable troisième voie, alors qu’approche le terrible cap des 100 000 morts du Covid en France ?

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 31 mars 2021)

Posts les plus consultés de ce blog

Sortir des postures

Le cortège d’une manifestation ou un rassemblement pour fêter la victoire d’un club sportif qui se terminent par des émeutes, des dégradations de mobilier urbain et de vitrines de magasins, parfois pillés, et des attaques violentes des forces de l’ordre par des hordes encagoulées dans un brouillard de gaz lacrymogènes… Les Français se sont malheureusement habitués à ces scènes-là depuis plusieurs décennies. Comme ils se sont aussi habitués aux polémiques politiciennes qui s’ensuivent, mêlant instrumentalisation démagogique, règlement de comptes politiques et critiques d’une justice supposément laxiste. Le dernier épisode en date, qui s’est produit samedi soir à Paris à l’occasion de la victoire du PSG face à l’Inter Milan en finale de la Ligue des champions, ne fait, hélas pas exception à la règle. Au bilan édifiant – deux morts, des dizaines de blessés, plus de 600 interpellations, des rues et magasins saccagés – s’ajoutent désormais les passes d’armes politiques. Entre l’opposition e...

Le prix de la sécurité

C’est l’une des professions les plus admirées et respectées des Français, celle que veulent exercer les petits garçons et aussi les petites filles quand ils seront grands, celle qui incarne au plus haut point le sens de l’intérêt général. Les pompiers, puisque c’est d’eux dont il s’agit, peuvent évidemment se réjouir de bénéficier d’une telle image positive dans l’opinion. Celle-ci les conforte et les porte au quotidien mais si elle est nécessaire, elle n’est plus suffisante pour faire face aux difficultés qu’ils rencontrent au quotidien, opérationnelles, humaines et financières. Opérationnelle d’abord car leurs missions ont profondément changé et s’exercent avec plus de contraintes. De l’urgence à intervenir pour sauver des vies – presque 9 opérations sur 10 – on est passé à des interventions qui ne nécessitent parfois même pas de gestes de secours et relèvent bien souvent davantage de la médecine de ville voire des services sociaux. C’est que les pompiers sont devenus l’ultime recour...

Principes et réalité

Seize mois après les manifestations historiques des agriculteurs, nées en Occitanie à l’hiver 2024 en dehors des organisations syndicales traditionnelles, voilà la colère paysanne de retour. Ce lundi, à l’appel notamment de la FNSEA et des Jeunes agriculteurs, et après de nombreuses actions ponctuelles ces dernières semaines, les tracteurs seront, en effet, à nouveau dans les rues pour dire l’exaspération des agriculteurs de voir les mesures promises si lentes à se mettre en place et pour rappeler l’urgence à agir aux députés, qui examinent ce lundi à l’Assemblée nationale une proposition de loi clivante lancée par le sénateur LR Laurent Duplomb. Ambitionnant de « lever les contraintes », ce texte, plébiscité par le monde agricole mais qui ulcère les défenseurs de l’environnement et les tenants d’un autre modèle agricole, propose entre autres de faciliter le stockage de l’eau, de simplifier l’extension des élevages, de réintroduire certains pesticides dont un néonicotinoïde qu...