En se retrouvant hier matin à l’Elysée pour un Conseil de défense afin de finaliser les mesures de l’acte II du déconfinement, Emmanuel Macron et Edouard Philippe ont peut-être eu à l’esprit le slogan de la campagne présidentielle de 2017 : libérer, protéger. Ce mantra, qui devait être l’alpha et l’oméga du quinquennat en matière économique, pouvait, en effet, s’appliquer parfaitement à la situation du pays qui se relève peu à peu de l’épidémie de coronavirus survenue il y a trois mois.
Libérer les Français du rigide – mais nécessaire – carcan des règles sanitaires du déconfinement, il le fallait bien. La multiplication des matchs de foot réunissant des centaines de personnes au mépris des consignes de distanciation physique, l’augmentation de petits attroupements de Français désireux tout simplement de profiter en extérieur des beaux jours et du soleil, l’agglutinement de familles parisiennes sur des trottoirs devant des parcs et jardins fermés – situation totalement ubuesque – mais aussi le nombre de déplacements sanctionnés car au-delà des 100 kilomètres : tout cela a illustré ces derniers jours la montée de l’exaspération, de la fatigue, de l’incompréhension aussi chez les Français qui regardent comment se passe le déconfinement chez nos voisins. Après 55 jours de confinement difficile parfois et 17 jours de déconfinement trop progressif à leurs yeux, les Français ont clairement envie de passer à autre chose, de penser aussi à autre chose.
En annonçant hier toute une série de mesures attendues, sur les fameux 100 kilomètres mais aussi sur la réouverture des cafés et restaurants ou les collèges et lycées, Edouard Philippe a montré qu’il était à l’écoute de ses compatriotes. L’exécutif a aussi démontré là que c’était bien l’instance politique qui prenait les décisions et non pas les experts, dont le rôle ne peut être que de conseiller.
Libérer donc, mais aussi protéger, car la France n’en a pas fini avec l’épidémie. La situation sanitaire s’améliore de jour en jour et on pourrait croire que l’épidémie est passée et qu’il n’y aura pas de deuxième vague. Mais le coronavirus circule toujours, frappe toujours, et tue toujours… Le gouvernement a donc raison d’être prudent et de maintenir encore des règles sanitaires contraignantes dans certains départements sans les stigmatiser pour autant.
Mais la protection qu’il doit aux Français n’est pas seulement sanitaire et, de plus en plus, va être économique. Après le tsunami de l’épidémie, la France va, en effet, devoir affronter le tsunami de la récession. La hausse des chiffres du chômage dévoilée hier, les plans sociaux en cours ou à venir, le risque de faillite qui touche tout le tissu des PME montrent que les temps à venir seront particulièrement difficiles. 86 % des Français s’en inquiètent à raison. Pour le gouvernement, après la crise sanitaire, la priorité va très vite être la crise économique et sociale.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du vendredi 29 mai 2020)