Accéder au contenu principal

Les enjeux d’un vaccin

labo


La recherche d’un vaccin contre le coronavirus SARS-Cov-2 responsable de la pandémie du Covid-19 est une course contre la montre comme rarement l’humanité en aura connue. Une course dans laquelle sont engagés des milliers de chercheurs dans le monde avec des objectifs louables et d’autres qui le sont beaucoup moins. Parce que cette course est à la fois scientifique mais aussi économique, diplomatique et géopolitique. Face au nouveau coronavirus apparu en Chine en décembre 2019 et instruits par le précédent épisode de SRAS en 2002-2003, les pays du monde entier se sont lancés à la recherche d’un vaccin. Cette quête a mobilisé des laboratoires privés et publics, des chercheurs de grandes universités comme ceux de jeunes sociétés de biotechnologies qui explorent depuis quatre mois de multiples pistes.

Face au redoutable coronavirus, une collaboration s’est mise en place, un partage des données s’est opéré, montrant, s’il en était besoin, que c’est bien la coopération internationale, l’alliance de tous les pays, le multilatéralisme qu’ont en horreur les populistes, qui permettront de trouver une issue à la pandémie. À cet égard, on peut saluer que la France, pays de Pasteur – et du Professeur Raoult rajouteront certains – ait contribué à lancer une initiative mondiale sous l’égide de l’ONU sur les diagnostics, les traitements et les vaccins ; et soit à l’origine de l’opération "Covid-19 Santé en commun" tournée vers les pays les plus défavorisés, notamment en Afrique.

Mais cette course au vaccin fait aussi affleurer le pire : la recherche d’une victoire diplomatique et celle de colossaux profits plutôt que la quête d’un bien commun. On voit bien que les relations commerciales conflictuelles entre les Etats-Unis et la Chine, qui existaient avant l’épidémie, perdurent plus que jamais, car devenir le premier pays qui aura trouvé le vaccin apportera prestige et poids politique à son dirigeant. Dès lors tous les coups sont permis et on a vu récemment la tentative américaine de s’emparer pour 1 milliard de dollars des droits de l’entreprise biopharmaceutique allemande CureVac qui travaille sur un vaccin contre le Covid-19 dont les Etats-Unis voulaient l’exclusivité…

Il aura fallu qu’Angela Merkel puis la Commission européenne montent au créneau pour bloquer ce transfert de savoirs outre-Atlantique. Si l’affaire a été démentie par Washington, on mesure bien que la course au vaccin n’est pas seulement un sujet scientifique et que nombreux sont ceux qui veulent faire mentir Pasteur qui assurait que "la science n’a pas de patrie".

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 4 mai 2020)

Posts les plus consultés de ce blog

Moine-soldat

Dans le marathon de l’examen de la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le calendrier a marqué une pause ce jeudi à l’occasion de la niche parlementaire du Parti socialiste. Une pause mise à profit par le gouvernement pour aller sur le terrain défendre une réforme toujours massivement rejetée par 7 Français sur 10. À l’avant-veille de la quatrième journée de manifestation appelée par l’intersyndicale, Elisabeth Borne et Gérald Darmanin se sont ainsi rendus hier à Neuville-en-Ferrain, dans le Nord, Olivier Dussopt à Toulouse, où il a notamment rencontré six lecteurs de La Dépêche du Midi au siège de notre journal pour répondre à leurs questions et leurs inquiétudes. Celui qui enchaîne à un rythme soutenu les interviews dans les matinales et défend depuis lundi son texte devant une Assemblée nationale survoltée s’est montré tel qu’en lui-même : un moine-soldat de la macronie. Moine, parce que le ministre connaît sur le bout des doigts le catéchisme de la réforme, son dogme du r

L'indécence et la dignité

C’est sans doute parce qu’elle avait le souriant visage de l’enfance, cheveux blonds et yeux bleus, parce qu’elle aurait pu être notre fille ou notre nièce, notre petite sœur ou notre cousine, une camarade ou la petite voisine. C’est pour toutes ces raisons que le meurtre barbare de la petite Lola a ému à ce point la France. Voir le destin tragique de cette bientôt adolescente qui avait la vie devant elle basculer à 12 ans dans l’horreur inimaginable d’un crime gratuit a soulevé le cœur de chacune et chacun d’entre nous. Et nous avons tous pensé à ses parents, à sa famille, à ses proches, à ses camarades de classe, à leur incommensurable douleur que notre solidarité bienveillante réconfortera mais n’éteindra pas. Tous ? Non, hélas. Dans les heures qui ont suivi le drame, certains ont instrumentalisé de façon odieuse la mort de cette enfant pour une basse récupération politique au prétexte que la suspecte du meurtre était de nationalité étrangère et visée par une obligation de quitter l

Nouveaux obscurantismes

Fin 2019, le transfert de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) de Matignon vers le ministère de l’Intérieur, au sein d’un secrétariat spécialisé dans la radicalisation (le CIPDR, Comité Interministériel de Prévention de la Délinquance et de la Radicalisation), avait provoqué émoi et inquiétude chez les associations d’aides aux victimes des sectes. L’éventualité d’une suppression des archives et du site internet de la Miviludes, dont le travail était unanimement reconnu depuis 17 ans, avait ajouté aux craintes de voir amoindris les moyens d’un service de l’État, d’évidence, indispensable. Tout est ensuite rentré dans l’ordre et ce retour à la normale est sans doute dû à l’épidémie de Covid-19. Car la pandémie historique a suscité de la peur et des inquiétudes évidemment légitimes dans la population effrayée par ce coronavirus dont on ne connaissait pas encore toutes les conséquences sur la santé et contre lequel on n’avait pas e