Voilà un pataquès dont le gouvernement se serait bien passé. Alors que le Premier ministre semblait avoir repris la main sur la communication gouvernementale en présentant, mardi devant l’Assemblée nationale, la stratégie nationale de déconfinement, et tandis qu’Edouard Philippe expliquait aux députés que nous saurions le 7 mai par une carte quels départements pourraient être déconfinés (zone verte) ou maintenus confinés (zone rouge) après le 11 mai, voilà que le ministre de la Santé Olivier Véran et le directeur général de la Santé Jérôme Salomon, ont présenté ce jeudi une carte d’étape avec… une nouvelle couleur orange intermédiaire, amenée à évoluer. Mais à cette première surprise s’est ajoutée celle de voir des départements – le Lot, le Cher et la Haute-Corse – placés en rouge contre toute attente.
Les Agences régionales de Santé (ARS) ont eu beau reconnaître des "doutes" voire des "erreurs" dans la remontée des statistiques pour expliquer ce bug, le mal était fait. Et à l’heure où les Français se projettent dans l’après 11-mai, les élus des départements concernés sont montés au créneau – à raison – pour dénoncer "l’erreur de l’année" à même de doucher les espoirs de déconfinement et rajouter à l’angoisse des populations, peu ou prou accusées d’être les mauvais élèves dans le respect du confinement…
Cette fâcheuse erreur de communication est, hélas, la dernière en date d’une série bien trop longue. Sur les masques, inutiles puis indispensables, sur les tests, sans objet puis incontournables, sur le déconfinement, tour à tour par région, puis national, puis départemental, sur les écoles rouvertes puis fermées, sur les déplacements entre départements, dont on comprend mal s’ils seront autorisés ou interdits entre ceux de couleurs différentes, etc. Ce jeudi, on a même vu la vente de muguet autorisée pour les fleuristes puis à nouveau interdite en moins de deux heures…
Certes, face à cette pandémie totalement inédite, il est normal que le gouvernement tâtonne comme d’ailleurs tâtonnent les scientifiques chargés de le conseiller. Édouard Philippe n’a ainsi pas eu tort de fustiger les commentateurs "ayant une vision parfaitement claire de ce qu’il aurait fallu faire selon eux à chaque instant". Et on pourrait même ajouter que, devant la complexité de la situation, il n’est pas illogique que l’on fasse preuve d’indulgence et de patience. Mais tout de même, l’accumulation d’annonces qui ont ensuite été démenties, les propos à l’emporte-pièce de certains ministres inconséquents, les multiples contradictions et atermoiements de l’exécutif et une communication erratique et zigzagante dont on se demande si elle est pilotée, interrogent légitimement les Français et amoindrissent leur confiance dans le gouvernement.
Or la confiance est pourtant bien LA clé pour la réussite du déconfinement. Il reste neuf jours au gouvernement, par les actes autant que par la parole, pour la gagner.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 2 mai 2020)