En prenant à nouveau la parole pour une allocution solennelle devant les Français, Emmanuel Macron est monté au front hier avec un triple objectif : apporter de la clarté, de la cohérence, et fixer un cap pour les semaines et mois à venir. Autrement dit, trois choses qui ont semblé manquer à l’exécutif ces dernières semaines, secoué qu’il a été par des polémiques à répétition – sur les librairies ou Amazon en particulier – que le Premier ministre a rarement été en mesure de contrecarrer. En montant hier en première ligne pour esquisser les perspectives de ce deuxième confinement, Emmanuel Macron entendait donc reprendre la main et le contrôle de la situation avec une règle d’airain : ne surtout pas refaire les mêmes erreurs qu’il y a six mois. Pas question ainsi de prononcer le terme « déconfinement », propice à tous les relâchements dans les comportements qui nous mèneraient à une 3e vague redoutée – et même annoncée par l’OMS… Hier, il s’agissait d’alléger les mesures contraignantes, de desserrer l’étau très progressivement à quelques semaines des fêtes de Noël, quitte à susciter du ressentiment chez ceux – restaurateurs en tête – qui vont rester encore enferrés dans des contraintes sanitaires très éprouvantes.
Pour Emmanuel Macron, qui a voulu se montrer terre à terre et éloigné du lyrisme qu’il affectionne, la tâche est d’autant plus rude qu’il lui faut mener trois batailles.
La première, c’est évidemment celle de l’opinion, de l’adhésion des Français, gagnés par la lassitude. La sidération du premier confinement avait permis à l’exécutif de mettre en œuvre des mesures restrictives fortes, totalement inédites pour notre démocratie mais bien acceptées. Pour ce deuxième confinement, la donne a changé, les Français sont fatigués de cette épidémie qui va perturber les retrouvailles de Noël. L’acceptabilité des contraintes est donc capitale pour l’exécutif, faute de quoi la colère qui sourd va s’amplifier. L’unanimité du printemps, déjà fragile, n’existe plus. La contestation gagne du terrain, les oppositions n’hésitent plus à critiquer, les tribunes défendant des intérêts catégoriels se multiplient.
La deuxième bataille est bien sûr sanitaire : retrouver la maîtrise de la progression de l’épidémie en améliorant le traçage des cas Covid – un point faible – et se préparer à l’arrivée des vaccins. Ce défi sera d’autant plus difficile pour l’exécutif que la France est le pays où la défiance envers les vaccins est la plus importante. Ce qui aurait pu être la phase la plus réjouissante pour en finir avec l’épidémie s’annonce déjà comme un chemin semé d’embûches.
Enfin, la troisième bataille sera celle de la réponse à la crise économique. Perfusée par le plan de relance, l’économie française semble résister, mais les perspectives en termes de faillites font froid dans le dos.
Ces trois batailles sont d’autant plus importantes qu’elles vont constituer un marqueur fort de l’année 2021. Autant dire qu’à un an de la présidentielle, mieux vaut n’en perdre aucune. Hier, Emmanuel Macron a montré qu’il voulait se donner les moyens pour les remporter et inventer « un nouvel avenir français » qui sonne comme un futur programme…
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 25 novembre 2020)