Sans tambour ni trompettes, la téléphonie mobile 5G va être officiellement lancée d’ici la fin de semaine. Un lancement très progressif qui prendra plusieurs mois, le temps d’installer ou mettre à jour les antennes, de déployer les offres commerciales pour les particuliers et les entreprises et de commencer à découvrir la richesse des usages que permettent des débits impressionnants de vitesse qui seront utiles pour l’industrie, les transports, la santé, etc. Si la 5G est lancée en catimini, ce n’est pas seulement parce que les mesures sanitaires du confinement fixent d’autres priorités, c’est aussi parce que le dossier 5G est – comme celui du compteur Linky – miné par des polémiques sans fin et une défiance généralisée.
Défiance en premier lieu d’une partie la population à l’égard de cette nouvelle technologie, et d’élus locaux sur la nocivité pour la santé humaine des ondes électromagnétiques émises. Invoquant le principe de précaution, plusieurs maires écologistes et de gauche réclament un moratoire en attendant la remise en mars 2021 d’un rapport de l’Anses sur l’impact sanitaire de la 5G. Moratoire réclamé également par la Convention citoyenne sur le climat qui en a fait l’une de ses 150 propositions.
Mais défiance aussi des partisans de la 5G, au premier rang desquels Emmanuel Macron, face aux opposants… Lorsque le chef de l’Etat lance qu’il refuse le « retour à la lampe à huile » et que qu’il ne croit pas que « le modèle Amish permette de régler les défis de l’écologie contemporaine », il récuse de fait que des avancées technologiques et scientifiques soient soumises à la critique, pourtant légitime dans une démocratie. En l’absence, non pas d’un terrain d’entente, mais d’un cadre de discussions apaisées, la 5G est devenue le théâtre d’affrontements où l’on voit se développer les théories conspirationnistes les plus folles – dont certaines ont fait un lien entre la 5G et l’épidémie du coronavirus – mais aussi des actes de sabotage sur fond de revendications anticapitalistes…
Cette polarisation autour de la science et des nouvelles technologies n’est ni nouvelle ni spécifique à la France et se retrouve sur d’autres domaines comme les vaccins. Mais il devient urgent de retrouver le sens de la nuance, du compromis, de l’intérêt général autour de faits avérés si l’on ne veut pas se retrouver enfermés dans des bulles et isolés sur la scène internationale.
(Editorial publié dans La Dépêche du jeudi 19 novembre 2020)