Les chefs d'Etat et de gouvernements à Biarritz. Photo G7 |
Année après année, les grands sommets internationaux – G7, G8 ou G20 – se ressemblent. Si l'on osait la comparaison triviale, on dirait que, comme pour une discothèque, il y a deux salles deux ambiances, ou comme au festival d'Avignon, le In et le Off.
D'un côté, en effet, il y a le rendez-vous des grands de ce monde, chefs d'Etat et de gouvernements des pays démocratiques les plus riches de la planète, qui se retrouvent pour discuter essentiellement d'économie, de mondialisation, de régulation du capitalisme. Depuis le sommet de Gênes et l'apparition des black blocs – ces groupes ultraviolents qui préfèrent le combat et la casse au débat et aux propositions – les dirigeants se retrouvent bunkérisés dans de jolies cités transformées en camps retranchés. Biarritz ne fera pas exception à la règle ce week-end avec un déploiement de forces jamais vu : 13 200 gendarmes et policiers, des missiles, des bateaux pour sécuriser l'Hôtel du Palais. Paradoxalement, c'est claquemurés dans cet établissement de luxe que les dirigeants vont parler lutte contre les inégalités et ouverture au monde. Sur la forme, l'image est plutôt maladroite même si on comprend bien la nécessité de protéger un sommet de violences ou de menaces terroristes. Sur le fond, on verra ce qu'il ressortira de ce cénacle où, depuis l'arrivée de Donald Trump, le multilatéralisme est à ce point affaibli qu'il n'y aura pas de déclaration commune pour éviter d'afficher trop de divisions…
De l'autre côté, des dizaines d'associations, des milliers de militants organisent des contre-sommets, des espaces de discussion, de proposition, d'indignation, de manifestation. Le foisonnement des thèmes donne parfois le tournis, mais force est de constater que ces contre-sommets pacifiques ont souvent joué le rôle de lanceurs d'alerte sur le dérèglement climatique, les inégalités entre les pays du Nord et du Sud comme au sein même des pays développés, l'urgence écologique, la pollution… Des idées jugées incongrues ou irréalisables et qui ont, au fil des ans, conquis les opinions et, parfois, leurs dirigeants.
Autant dire que les sommets et les contre-sommets livrent deux visions du monde, deux conceptions du développement de l'Humanité entre lesquelles des ponts sont très difficiles à construire. Entre les simples déclarations d'intentions non contraignantes d'un côté et les imprécations à l'action de l'autre, le dialogue semble brouillé.
Pour son premier G7 en tant qu'organisateur, Emmanuel Macron n'économise pas sa peine pour amener du liant, ménageant ici les ONG, notamment environnementales, appelant là ses homologues à l'action. D'aucuns y verront une posture démentie en France par l'action de son gouvernement, d'autres une stratégie de leadership à l'heure où l'Europe est affaiblie par le Brexit et les poussées populistes, les derniers la capacité d'un chef d'Etat à enfin parler cash et vrai. Il y a sans doute un peu de tout cela. Mais si Emmanuel Macron veut que ce G7 ne ressemble pas aux précédents, sitôt tenus, sitôt oubliés, il va falloir passer cette fois de la parole aux actes…
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 24 août 2019)