La chronique de l’actualité aéronautique étant régulièrement alimentée depuis quatre ans par les déboires de Boeing, qui accumule des incidents parfois spectaculaires, on en oublierait presque combien ce mode de transport reste le plus sûr et, surtout, combien ce secteur industriel est l’un des plus innovants. La livraison prochaine de l’A321 XLR, une nouvelle version de l’avion vedette d’Airbus à long rayon d’action, dont prendra possession la première la compagnie aérienne Iberia, vient nous le rappeler.
L’exploit de l’avionneur européen n’est pas tant d’avoir lancé un nouveau programme pour répondre aux nouveaux besoins des compagnies, mais de l’avoir fait dans un contexte où les embûches étaient nombreuses. Entre la complexité inhérente à la conception d’un nouvel appareil, la survenue de la pandémie de Covid-19 puis de la guerre en Ukraine, et les nouvelles exigences imposées par les autorités de contrôle et de régulation du secteur aérien – l’EASA en Europe et la FAA aux États-Unis – on ne peut que tirer notre chapeau aux dirigeants, ingénieurs, techniciens, ouvriers d’Airbus et leurs sous-traitants. Et cela d’autant plus que ce nouvel avion apparaît à tous comme un « game changer », qui peut véritablement révolutionner le milieu du marché. Boeing, qui a longtemps occupé ce segment avec les Boeing 757 et 767 conçus dans les années 1970, espérait le reconquérir avant de connaître les avanies de son 737 MAX qui ont fini par le faire renoncer…
Airbus a donc un coup à jouer pour occuper le terrain et séduire des compagnies qui attendaient un tel avion. Car celui-ci combine le meilleur des deux mondes, celui des mono-couloirs (de type Airbus A320 et Boeing 737) et celui des gros-porteurs (Airbus A330 et A350, Boeing 787 et 777) jusqu’alors seuls capables d’effectuer des vols long-courriers. Non seulement l’A321XLR voit sa consommation de carburant et ses émissions de CO2 baisser de 30 %, mais il offre des coûts d’exploitation inférieurs de 45 % à ceux des gros-porteurs aux compagnies aériennes. Ces dernières ne s’y trompent pas et le très polyvalent A321XLR, sans équivalent, est d’ores et déjà promis à un beau succès – plus de 550 commandes passées.
Si les compagnies sont séduites pour répondre à la croissance du trafic aérien – à l’horizon 2043, l’IATA prédit que le nombre de passagers aériens doublera par rapport à 2023, soit 8,6 milliards de personnes – les passagers devraient l’être aussi. Non seulement l’A321 XLR apportera une nouvelle référence dans le confort en cabine grâce à des aménagements novateurs, mais, surtout, il évitera des vols en correspondance pour des destinations lointaines en offrant à de « petits » aéroports des liaisons directes qu’ils ne pouvaient imaginer jusqu’à présent – on attend un Toulouse-New-York. Des vols long-courriers qui pourraient de plus être à des prix abordables si les compagnies low-cost adoptent ce nouvel avion.
Au final, si l’A321XLR est moins spectaculaire que l’A380 et ses deux ponts, il pourrait bien être l’avion qui amène l’aviation mondiale dans une nouvelle ère.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du vendredi 30 août 2024)