C’est un appel lancé au cœur de l’été qui est quasiment passé inaperçu mais qui prend un relief particulier avec la décision de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le 14 août, de classer l’épidémie de mpox en « urgence de santé publique de portée internationale. » Mi-juillet, Yuen Kwok-yung, éminent chercheur hongkongais qui a combattu les virus les plus dangereux, avertissait qu’une nouvelle pandémie était inévitable et pourrait causer des dégâts bien plus graves que le Covid-19.
Le scientifique, qui a créé l’an dernier l’Alliance pour la recherche sur les pandémies, avec ses homologues chinois et américains, estime que l’évolution rapide du climat et les maladies infectieuses émergentes devraient être une priorité absolue pour les hommes politiques, qui devraient résoudre ces « menaces existentielles mondiales ». Ce n’est pas la première fois que des alertes surviennent sur le développement de pandémies. En 2008, les analystes de la CIA dans leur rapport sur l’état du monde en 2025 craignaient déjà l’émergence d’une pandémie semblable à celle du Covid-19, imaginant « l’apparition d’une nouvelle maladie respiratoire humaine virulente, extrêmement contagieuse ».
Après le Covid-19, le monde s’inquiète donc désormais de la mpox, la variole du singe, détectée pour la première fois chez l’être humain en 1970, en République démocratique du Congo, mais qui, endémique dans les pays d’Afrique centrale et de l’Ouest, s’était étendue au-delà, en Europe notamment, en juillet 2022. Alors que pour la deuxième fois en deux ans, le mpox est considéré comme une urgence de santé publique de portée internationale, l’OMS a voulu rassurer hier, estimant que « ce n’est pas la même chose que le Covid-19 et le mpox peut être maîtrisé. »
L’agence onusienne, qui n’a pas qualifié le mpox de pandémie, marche, de fait, sur un chemin de crête. Faut-il être alarmiste pour alerter et sensibiliser le grand public, au risque que la multiplication des « urgences de santé publique de portée internationale » ne crée une accoutumance, une indifférence et donc une absence de réaction appropriée en cas de propagation rapide du virus dans le monde ? Ou faut-il ne pas être alarmiste au risque d’être ensuite accusé de n’avoir rien fait pour endiguer en temps et en heure une pandémie en puissance ? Cette lutte entre rassuristes et alarmistes, nous l’avons déjà vécue lors de l’épidémie de Covid-19 et force est de constater que toutes les leçons n’ont pas été tirées de cette pandémie qui avait mis le monde à genoux.
Certes, la recherche scientifique avait été au rendez-vous pour produire un vaccin anti-Covid en un temps record, certes en Europe, la solidarité avait joué à plein entre les États membres pour disposer de doses en nombre suffisant, mais la vaccination dans les pays pauvres n’a pas été maximale et il manque un retour d’expérience sur les mesures sanitaires parfois très draconiennes mise en œuvre par endroits – le zéro Covid en Chine – et plus encore ce que Yuen Kwok-yung préconise, à savoir une véritable collaboration mondiale.
Celle-ci n’est pas encore opérationnelle, et les négociations sur un « Accord mondial sur la prévention, la préparation et la riposte face aux pandémies » traînent en longueur et ne devraient pas aboutir avant 2025. Il y a pourtant urgence si on veut éviter un nouveau Covid…