Le drame de l'effondrement spectaculaire du pont de Mirepoix-sur-Tarn doit plus que jamais être abordé avec prudence, pondération, ne serait-ce que par égards aux victimes de cet accident hors normes.
Après l'émotion légitime qui a largement dépassé les frontières du département, la solidarité nécessaire exprimée envers la commune sinistrée, et la compassion envers les proches des victimes, le temps est celui des responsabilités.
Responsabilités d'abord que doivent établir les enquêteurs qui sont depuis lundi sur le terrain pour comprendre ce qui a pu se passer. Le poids du camion, plus du double de ce qui était autorisé pour cet ouvrage, est vraisemblablement un facteur clé pour expliquer le drame. Y en a-t-il d'autres ? L'entretien du pont a-t-il été parfaitement réalisé ? Les contrôles ont-ils été suffisamment réguliers et approfondis ? Ce sera aux enquêteurs – et à eux seuls – de le dire.
Responsabilités ensuite des commentateurs, quand on voit certains d'entre eux, qui n'ont pas le début d'une compétence en ponts et chaussées, tantôt évoquer la faute à pas de chance, tantôt faire un lien obscur avec un « système économique dirigé par l'Union européenne » (sic) sur le plateau d'une chaîne d'information en continu…
En revanche, le drame de Mirepoix-sur-Tarn peut être l'occasion pour les pouvoirs publics de regarder si toutes les leçons ont bien été tirées du rapport parlementaire très fourni sur l'état des ponts en France, publié en juin dernier. Ce document sénatorial de 180 pages, réalisé après l'effondrement du pont italien de Gênes, estimait qu' « au moins 25 000 ponts sont en mauvais état structurel et posent des problèmes de sécurité et de disponibilité pour les usagers ». Pire, le rapport observait qu'on ne connaissait pas le nombre exact de ponts et que certains se trouvaient dans un vide juridique quant à leur propriétaire… D'où le souhait des sénateurs de voir la France, capable de construire le viaduc de Millau, mettre en place un « plan Marshall » pour tous les ponts en souffrance.
En second lieu, le drame haut-garonnais doit être aussi l'occasion de s'interroger sur la réalité des convois routiers. Il s'agit là de la responsabilité de l'Etat.
(Editorial publié dans La Dépêche du mercredi 20 novembre 2019)