Une ligne à grande vitesse (LGV) sans discontinuer reliera-t-elle enfin un jour Paris et Toulouse, quatrième ville de France ? Un TGV pourra-t-il demain rapprocher Montpellier de Perpignan et poursuivre même vers Barcelone ? Ces questions, lancinantes, les habitants d'Occitanie se les posent depuis bien trop longtemps. À telle enseigne que l'infinie patience dont ils ont fait preuve jusqu'à présent pourrait légitimement laisser la place à la colère. Car depuis des années, de promesses non tenues en délais sans cesse allongés, l'Occitanie, deuxième région de France avec ses plus de 5 millions d'habitants, est laissée sur la touche du développement du train à grande vitesse.
Les deux LGV en question sont pourtant réclamées de façon constante et régulière par une écrasante majorité des habitants. Il y a deux ans, un sondage Ifop-La Dépêche montrait que 88 % d'entre eux souhaitaient ces deux projets… mais que 52 % craignaient que l'Etat ne tienne pas ses engagements. Tristement prémonitoire…
Ce n'est pourtant pas faute d'avoir été très conciliant. Les élus d'Occitanie de tous bords, majoritairement unis autour des deux projets, n'ont cessé de faire des propositions, notamment pour le financement des lignes. Les collectivités ont payé par ailleurs nombre d'études et même subventionné la ligne TGV Paris-Bordeaux qui connaît un évident succès. Ces deux LGV Bordeaux-Toulouse et Montpellier-Perpignan s'inscrivent par ailleurs dans l'architecture globale du train en Occitanie où la Région a fait d'énormes efforts sur les trains du quotidien, notamment avec une SNCF qui n'a pas toujours été au rendez-vous. L'articulation entre TGV et TER est évidemment l'une des clés pour proposer aux habitants l'offre de transports qu'ils attendent, en phase avec la lutte contre le réchauffement climatique et permettant un aménagement du territoire harmonieux qui ne laisse personne isolé.
Carole Delga aurait pu dire tout cela au nouveau secrétaire d'Etat au Transport Jean-Baptiste Djebbari ce mercredi si leur rendez-vous n'avait été reporté au 4 décembre. On n'est plus à quelques jours près après des années d'attente…
Mais si la présidente PS de la Région monte à ce point au créneau sur ce sujet, c'est aussi parce qu'il dépasse évidemment le seul domaine du transport. Les tergiversations autour des LGV occitanes laissent, en effet, la désagréable impression que notre région reste moins bien traitée que d'autres. Derrière les LGV se jouent ainsi deux visions de la France, l'une où tout se déciderait à Paris, l'autre où les régions auraient une certaine capacité d'initiative. Cette ligne de fracture, certes ancienne, a profondément marqué les débuts du quinquennat d'Emmanuel Macron et a nourri à l'évidence le mouvement des Gilets jaunes. Le président de la République, qui (re) découvre l'importance des élus locaux, a assuré depuis vouloir un nouvel acte de décentralisation. Sans doute parce que la question des territoires sera au cœur des enjeux électoraux des prochaines années. Emmanuel Macron le sait ; Carole Delga aussi…
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 23 novembre 2019)