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Petite musique

impots

L’arrivée des premiers avis de taxe foncière est un coup dur pour les ménages et met clairement le gouvernement en mauvaise posture à l’heure de la préparation du Budget 2024. La taxe foncière va, en effet, subir cette année une hausse minimale de +7,1 % en raison de la revalorisation forfaitaire des valeurs locatives, votée lors de la dernière loi de finances. Une taxe qui peut par ailleurs augmenter si les communes – dont l’autonomie fiscale s’est réduite ces dernières années, notamment avec la suppression de la taxe d’habitation voulue par Emmanuel Macron – décident de jouer sur les taux. À Paris la hausse est de 51,9 %, à Grenoble de 25 %…

Peu importe pour les Français que le gouvernement et les collectivités se renvoient la responsabilité de la hausse finale. Le résultat pour eux constituera bien une hausse de la fiscalité qui tombe mal pour le gouvernement. Depuis des semaines, en effet, Elisabeth Borne et Bruno Le Maire ne cessent de marteler qu’il n’y aura pas de hausses d’impôts, tant pour les ménages que pour les entreprises.

Mais l’exécutif a beau vouloir stopper « la petite musique sur les hausses d’impôts » selon l’expression d’Emmanuel Macron, il joue, d’évidence, sur les mots. Car s’il ne touche effectivement pas à l’impôt sur le revenu, celui sur les sociétés ou la TVA, il s’apprête bien à opérer un certain nombre de choix qui vont directement ou indirectement peser sur le budget des Français et particulièrement ceux des classes moyennes. Les diverses taxes à venir sur les transports aériens et autoroutiers se répercuteront au final sur les Français. Et que dire du doublement des franchises médicales que l’opposition a tôt fait de qualifier de « nouvel impôt qui ne dit pas son nom. » La hausse de la taxe foncière ne fait qu’ajouter une note à la « petite musique »…

Avec une croissance attendue autour de 1 % en 2023, des recettes fiscales moins dynamiques qu’en 2022 et une dette publique de plus de 3 000 milliards d’euros, le Budget 2024 est évidemment compliqué à bâtir. L’exécutif cherche à économiser 15 milliards d’euros pour arriver à ramener le déficit public à 2,7 % du PIB en 2027, sans renier l’ADN libéral du macronisme.

Alors que le taux de prélèvements obligatoires en France atteint des sommets à 45,4 % de la richesse nationale, et que l’inflation, notamment alimentaire, ampute toujours le pouvoir d’achat des Français, le gouvernement doit faire des choix pour répondre finalement à un double objectif : redresser les comptes publics lestés par les aides du « quoi qu’il en coûte » né pendant la crise du Covid-19, et en même temps trouver les ressources pour financer l’indispensable mais très coûteuse transition écologique du pays.

En appelant à la retenue fiscale des collectivités qu’il a bousculées, en choisissant de jouer sur des taxes et en s’interdisant de créer de nouveaux impôts – notamment sur les plus aisés comme le préconisait l’économiste Jean Pisani-Ferry pour financer la transition écologique – le gouvernement fait ses choix. Mais pour les Français, quelles que soient les circonlocutions et les dénominations, ils se traduisent bien par des hausses d’impôts.

(Editorial publié dans La Dépêche du jeudi 31 août 2023)

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