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La fin d'une époque

timbre

Au cœur de l’été, l’annonce par La Poste de la disparition du célèbre timbre rouge, qui acheminait les lettres en 24 heures, et son remplacement par une lettre électronique, la e-Lettre rouge, ont signé la fin d’une époque et sans doute causé un pincement au cœur de nombreux Français. Car ce petit bout de papier dentelé, héritier du timbre « 1 franc vermillon » lancé en avril 1849, emporte avec lui un pan de l’histoire postale, bien sûr, mais aussi un morceau de l’histoire intime de chacun d’entre nous.

Qu’il soit apposé sur une carte de vœux, sur la carte postale que l’on envoie en vacances aux grands-parents ou sur des lettres personnelles ou professionnelles, le timbre rouge a longtemps rythmé nos communications avant que le téléphone, les textos, les courriels et les échanges par messageries électroniques – WhatsApp, Messenger, Télégram et consorts – ne ringardisent son usage. La crise sanitaire du Covid-19 avec ses confinements a accéléré un peu plus ces mutations, renvoyant les échanges épistolaires aux chefs-d’œuvre de la littérature, des lettres persanes de Montesquieu à « Inconnu à cette adresse » de Kressmann Taylor, des lettres philosophiques de Voltaire aux « Lettres à un jeune poète » de Rainer Maria Rilke en passant par celle de Diderot à Sophie Volland.

Face à la baisse constante du volume de courrier et au colossal déficit du service universel postal – 1,1 milliard d’euros en 2020 – pour lequel l’État va verser une indemnité compensatoire annuelle de 500 à 520 millions d’euros, La Poste a refondu son offre courrier. Si elle est contestée par les syndicats, la logique comptable semble imparable, d’autant plus que le courrier n’est pas la priorité des priorités de La Poste qui investit massivement dans sa numérisation, dans les colis dont le trafic a explosé depuis l’épidémie de Covid-19 marquée par le boom du cybercommerce, dans ses activités bancaires et de nouveaux services comme la téléphonie mobile ou les services à la personne (visites aux personnes âgées, portage de médicaments, etc.).

Pour autant, la fin du timbre rouge, programmée au 1er janvier, laisse un goût amer car elle symbolise, quoi qu’en dise La Poste, le recul d’un service au public ; recul qui vient s’ajouter à d’autres. Les dysfonctionnements dans la livraison du courrier ou des journaux, la fermeture de bureaux de poste en zones rurales ou le réaménagement drastique de leurs horaires d’ouverture désolent nombre de Français qui se sentent délaissés et pour certains abandonnés par une entreprise qui leur tient à cœur de longue date et avec les personnels de laquelle, facteurs en tête, ils entretiennent des liens très forts.

Le recours massif à la numérisation avec des automates ou le renvoi vers internet pour la nouvelle e-Lettre rouge et d’autres services vont peut-être dans le sens de l’histoire, mais ils nécessitent de répondre à tous ces Français, jeunes ou vieux, ruraux ou urbains, qui sont mal à l’aise avec le numérique. L’illectronisme touche en France quelque 13 millions de personnes qui ne sauraient être des citoyens de seconde zone, y compris pour La Poste.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 8 octobre 2022)

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