Ceux qui doutaient encore des conséquences du dérèglement climatique sur leur quotidien, les pensant réservées aux populations de pays lointains, ont radicalement revu leur position cet été. Les épisodes nombreux de températures caniculaires en juillet et en août, l’intensité de la sécheresse qui a mis à sec certaines rivières, la pénurie d’eau qui a frappé certains villages du sud de la France et, surtout, ces spectaculaires incendies qui ont ravagé des milliers d’hectares de forêt ont montré combien nous étions exposés aux conséquences du réchauffement climatique et combien nous étions fragiles et pas aussi bien préparés qu’il le faudrait à ces nouveaux aléas. L’un de ceux-ci pourrait d’ailleurs provoquer des dégâts dont on ne mesure pas encore l’ampleur : les fissures dans les habitations.
Jusqu’à présent, ces déboires concernaient des maisons construites à proximité de mines ou de puits dont le terrain s’affaissait ou bien d’habitations secouées par des explosifs lors de chantiers de construction. Mais cette fois, les fissures pourraient toucher un nombre beaucoup plus important de maisons lorsqu’elles sont construites sur des terrains argileux. Le phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA) – rétractation des sols quand il fait sec, gonflement quand il pleut – a, en effet, été avivé par les sécheresses de cet été. Tant et si bien que des milliers d’habitations subissent des mouvements de terrains qui affectent leurs fondations. Depuis plusieurs semaines, des milliers de propriétaires témoignent de leur désarroi face aux fissures qui lézardent leur façade, aux portes et fenêtres déformées, aux sols soulevés.
Des dégâts pour l’heure évalués entre 1,6 et 2,4 milliards d’euros au régime des catastrophes naturelles selon la fédération France Assureurs, qui s’inquiète. Car non seulement le précédent record de 2003 (2,12 milliards d’euros) sera battu mais les perspectives ne sont pas à l’optimisme puisque l’évolution du réchauffement climatique pourrait conduire à ce que plus d’une maison sur deux (54%) soit concernée par de tels dégâts. Sont ainsi menacées de dommages conséquents 3,3 millions de maisons (16 % du parc) implantées « en zone à risque fort », dans le Sud-Ouest, le Sud-Est, le centre et le nord.
Si depuis 2020 les pouvoirs publics ont revu les normes de constructions et obligent les constructeurs à réaliser une étude des sols avant de lancer tout chantier, le défi de « sauver » les maisons existantes paraît colossal. Il existe bien sûr des solutions pour solidifier les habitations, entre renforcement structurel, régulation hygrométrique ou consolidation des fondations. Mais cela a un coût croissant : le coût moyen des réparations des maisons endommagées par la sécheresse s’élève aujourd’hui à 17 300 euros…
La nouvelle donne qu’impose le réchauffement du climat, nous appelle plus que jamais à adapter nos politiques d’urbanisme et d’aménagement et nos techniques de construction. À cet égard la publication cette semaine par l’Institut géographique national (IGN) du premier Atlas de cartes de l’anthropocène, cette nouvelle période où l’être humain est devenu la principale force de changement, est une bonne nouvelle pour préparer l’avenir.
(Editoral publié dans La Dépêche du Midi du samedi 1er octobre 2022)