D’aucuns y verront la quintessence du « en même temps » appliquée à la 5G, la nouvelle norme de téléphonie mobile dont les antennes sont en cours de déploiement en France. Le 14 septembre dernier Emmanuel Macron fustigeait ceux qui réclamaient un moratoire sur ce sujet, estimant qu’on ne pouvait « relever la complexité des problèmes contemporains en revenant à la lampe à huile. » « Je ne crois pas que le modèle Amish permette de régler les défis de l’écologie contemporaine », rajoutait le chef de l’Etat, s’attirant les foudres d’associations et d’élus écologistes et de gauche. Mais quelques jours plus tard, le 29 septembre, le secrétaire d’Etat au Numérique, Cédric O, écrivait une lettre aux opérateurs, révélée début février, par L’Express, dans laquelle il leur demandait expressément de « communiquer un dossier d’information » – ce que prévoit d’ailleurs la loi – aux élus locaux un mois avant le déploiement du réseau, quitte donc à retarder l’installation des antennes.
Ce que certains pointent comme un double discours est sans doute plus sûrement l’illustration que sur la 5G comme sur d’autres sujets – OGM, nucléaire… – il est urgent de retrouver de la nuance et de la transparence plutôt que des positions binaires en tout ou rien. Ainsi sur la 5G, les questions – toutes légitimes – posées par les associations ou les élus locaux sur l’impact environnemental (pointé d’ailleurs du doigt par le Haut Conseil pour le climat), sur les risques potentiels pour la santé humaine, voire sur les usages sociétaux, méritent des réponses claires et transparentes, étayées par des faits et des études, plus que du mépris et de la condescendance. Tout autant, l’intérêt et les qualités de la 5G pour répondre aux besoins d’un monde de plus en plus connecté doivent être expliqués et replacés dans un contexte mondial où la France – qui ne vit pas dans une bulle – doit honorer des engagements européens et où les questions de souveraineté et de géopolitique industrielle et technologique comptent aussi.
Le temps étant davantage aux clashs qu’aux débats prenant en compte toute la complexité d’un sujet, la 5G continue ainsi à cristalliser les passions… comme avant elle la 4G. Celle-ci a fini par s’imposer, au nom d’un principe de réalité.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du dimanche 28 février 2021)