Le plastique n’est définitivement plus fantastique. Même si l’épidémie de Covid-19 et ses mesures sanitaires ont pu laisser penser à certains que les objets à usage unique faits de plastique pourraient bénéficier d’un sursis, leur fin programmée est bel et bien enclenchée avec une date fixée à… 2040.
Échéance bien trop lointaine pour de nombreuses associations de défense de l’environnement, qui voient chaque jour les dégâts considérables que font gobelets, pailles, assiettes ou emballages en plastique jetés dans la nature sur la faune et sur la flore. En témoignent les spectaculaires images du "7e continent", ce vortex de plastique au milieu de l’océan, qui se désagrège en minuscules particules toxiques ingérées ensuite par les poissons. Mais nul besoin d’aller si loin pour se rendre compte des dégradations écologiques : il suffit à chacun de nous de se promener pour constater que notre environnement immédiat est pollué par ces plastiques. L’urgence d’agir peut-elle dès lors se contenter d’une échéance si lointaine – vingt ans – et d’un calendrier marqué par de multiples étapes ? Chacun a envie de répondre non, d’accélérer la cadence, mais notre dépendance au plastique est telle que pour s’en désaccoutumer, vingt ans ne seront sans doute pas de trop.
Car nous nous sommes tellement habitués à ces objets du quotidien, si pratiques, sitôt utilisés, sitôt jetés, que s’en passer est pour certains d’entre nous une insupportable contrainte. D’où la progressivité de l’abandon qui doit passer, en 2025, selon la promesse d’Emmanuel Macron, par 100 % de plastiques recyclés. Car la France a pris du retard sur ses voisins européens : selon une étude de PlasticsEurope, association professionnelle des producteurs européens de plastiques, notre pays affichait le piètre taux de recyclage de 26 % en 2016, contre 50 % pour l’Allemagne, 45,4 % pour l’Espagne ou 41 % pour l’Italie. Coût élevé du recyclage comparé au coût de production initial, et taux d’emballages triés par les consommateurs bien trop bas expliquent cela.
Pour effectuer cette transition vers moins de plastique il va falloir agir et se réinventer sur au moins trois domaines : renforcer en les facilitant tri, collecte et recyclage ; favoriser le développement d’alternatives au plastique avec des matériaux biodégradables ; et enfin réparer nos erreurs en luttant contre la pollution actuelle. À cet égard, les travaux scientifiques menés à Toulouse sont porteurs d’un immense espoir qui permettra d’éviter la prédiction du Forum économique mondial et de la fondation Ellen McArthur selon lesquelles si rien n’est fait, il y aura plus de plastiques que de poissons dans les océans d’ici 2050…
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 6 février 2021)