Ce n’est pas la première fois que le monde est confronté à une pandémie massive. Ces vingt dernières années, deux épidémies mortelles de coronavirus ont ainsi durement touché l’Asie et le Moyen-Orient, causant la mort de quelque 1 600 personnes. Si autrefois ce type d’épidémie pouvait rester circonscrit à une petite zone ou, comme la peste noire, se diffuser lentement en Europe, de nos jours, avec des moyens de transport accessibles au plus grand nombre, la dissémination d’un virus peut se faire rapidement, en quelques semaines. L’épidémie de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) survenue en 2002 et 2003 en Chine – et dont l’actuel nouveau coronavirus serait proche – avait ainsi infecté plus de 8 000 personnes dans 26 pays, avec un taux de mortalité proche de 10 %.
Si pour l’heure, on n’est qu’au début d’une potentielle crise sanitaire mondiale, il est bien normal que les événements de ces derniers jours inspirent dans les populations une légitime peur. Une peur qui grossit parfois de façon exagérée ou disproportionnée à coups de rumeurs ou de fake news relayées sur les réseaux sociaux.
"Dans ce moment de panique, je n’ai peur que de ceux qui ont peur", relevait en son temps Victor Hugo. Mais pour peu que l’on garde raison, cette peur peut devenir aussi une arme pour résoudre les crises ; et la gestion de ces crises une vraie leçon de collaboration internationale. Ainsi, à l’heure où certains dirigeants ne rêvent l’avenir de leur pays que bunkérisés derrière leurs frontières, une crise sanitaire comme celle que nous vivons montre que le multilatéralisme, la solidarité entre nations, l’entraide entre chercheurs, la coordination de mesures prophylactiques décidées et acceptées par tous, ça marche.
Preuve en est l’attitude de la Chine. Il y a quinze ans pour l’épidémie de SRAS, elle avait pratiqué une certaine rétention d’informations quant à la réalité des infections, faisant ainsi perdre près de trois mois à la communauté internationale pour s’attaquer au virus. Cette fois, le pays s’est montré plus réactif et plus transparent en reconnaissant l’existence de la crise sanitaire en seulement trois semaines.
Si la circulation de la bonne information et la prise de bonnes décisions politiques sont capitales pour surmonter une crise sanitaire mondiale, la communauté internationale devrait aussi s’interroger plus globalement sur les raisons pour lesquelles apparaissent de nouveaux virus ou réapparaissent d’anciennes maladies qu’on croyait éradiquées. Poser ces questions, c’est s’intéresser à la façon dont l’Homme se retrouve en contact avec des espèces animales réservoirs de virus. Cette proximité-là découle essentiellement des nouvelles activités humaines comme la déforestation, les rassemblements de population, la mondialisation des échanges, le tourisme, et plus généralement le réchauffement climatique qui bouleverse les écosystèmes et sur lesquels l’Homme a sa part de responsabilité.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du jeudi 23 janvier 2020)