En parvenant à faire décoller automatiquement, sans intervention humaine, un A350, Airbus a réalisé une première mondiale et un exploit technologique. À l’heure où Boeing est englué depuis des mois dans la crise de son 737-MAX, cloué au sol pour des défaillances logicielles, le contraste est évidemment saisissant, même si cet accident industriel n’obère en rien les capacités d’innovation de l’avionneur américain. La réussite de ce premier décollage (presque) sans pilote est aussi un élément de fierté pour tous les ingénieurs qui travaillent sur le projet ATTOL (Autonomous Taxi, Take-Off and Landing – roulage, décollage et atterrissage autonomes), lancé en 2018, et au-delà pour tous les compagnons de l’avionneur.
La prouesse d’Airbus montre en tout cas que dans l’aéronautique, peut-être plus que dans tout autre domaine, l’innovation, la recherche, l’expérimentation constituent une constante consubstantielle de la grande aventure imaginée par Léonard de Vinci et concrétisée par Clément Ader et ses successeurs. Guillaume Faury, le nouveau patron d’Airbus, ne disait d’ailleurs pas autre chose lors du dernier salon du Bourget. "Il est très probable qu’après 50 ou 60 ans de stabilité dans l’architecture des avions, nous voyions des changements radicaux. Ils ne sont pas loin, (mais) les technologies ne sont pas encore matures. Nous avons le privilège d’être la génération qui devra lancer ces technologies, et probablement les prochains programmes avec ces technologies."
Quels seront demain les nouveaux modes de transports ? Comment répondre au défi du réchauffement climatique en construisant des avions sans émissions polluantes ? Comment avoir suffisamment de pilotes pour absorber la croissance du trafic aérien ? Autant de questions qui sont de véritables défis pour Airbus comme pour tout le secteur aéronautique. Des questions forcément exaltantes qui imposent des choix audacieux, des prises de risques, des décisions difficiles aussi quand il s’agit de stopper un programme qui va dans la mauvaise direction, mais aussi une bonne dose d’intuition pour dessiner ce que sera le voyage de demain. Bref, de suivre le conseil d’un des pionniers de l’aérien, Antoine de Saint-Exupéry : "Pour ce qui est de l’avenir, il ne s’agit pas de le prévoir, mais de le rendre possible."
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 25 janvier 2020)