Six mois. Il aura donc fallu six mois pour que le gouvernement apporte une réponse ministérielle aux personnels hospitaliers des urgences en grève. À croire que l'exécutif voulait jouer la montre face à des grévistes qui, au contraire des cheminots ou des routiers, affichent leur colère sans paralyser la France et en continuant à soigner leurs compatriotes…
Car depuis le mois de mars, la grogne a gagné de plus en plus de services au point que, selon le dernier décompte du collectif Inter-urgences, 239 ont rejoint le mouvement, soit près d'un service sur deux. Du jamais vu.
Certes, en juin, la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn a bien installé une mission nationale pour « construire une nouvelle stratégie d'ensemble d'évolution des services d'urgence », conduite par le président du Conseil national de l'urgence Hhospitalière (CNUH), le professeur Pierre Carli, et le député (La République en Marche) de Charente, Thomas Mesnier.
Certes, le gouvernement a ensuite débloqué 70 millions d'euros avant l'été, notamment pour financer une nouvelle « prime forfaitaire de risque » mensuelle de 100 euros net pour les infirmiers et les aides-soignants et des recrutements dans les établissements « en tension ».
Certes Agnès Buzyn a finalement annoncé une première série de mesures la semaine dernière et s'apprête à en dévoiler d'autres en une seconde vague aujourd'hui à l'issue d'une rencontre avec tous les acteurs du secteur, hospitaliers et libéraux ainsi que les partenaires sociaux et le collectif Inter-urgences.
Mais pour les personnels, tout cela relève davantage de mesurettes, de rafistolage, du déjà-vu pas à la hauteur. Car au-delà des urgences, on voit bien que c'est l'ensemble de l'hôpital qui est concerné et même toute la chaîne médicale. Comment sécuriser les urgences où les personnels subissent trop souvent des agressions ? Comment éviter que les urgences ne soient étouffées par la « bobologie » ? Comment mieux articuler l'hôpital et la médecine de ville ? Comment assurer sur l'ensemble du territoire une même qualité de service alors que perdurent d'inacceptables déserts médicaux ?
Le gouvernement se lance dans une longue concertation pour la réforme des retraites, qui sera un texte phare du quinquennat. Réformer durablement l'hôpital, l'organisation de la santé et prévoir la dépendance qui sera un sujet crucial dans les années à venir, mériterait tout autant une grande concertation, un Grenelle pour tous les personnels, voire un « Grand débat » pour tous les Français.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 9 septembre 2019)