L'abbaye de Conques en Aveyron. |
À l'instar de la fête de la musique devenue depuis 1982 un rendez-vous culturel incontournable pour tous les Français, les Journées du patrimoine, lancées en 1984 par Jack Lang – l'emblématique et créatif ministre de la Culture de François Mitterrand – n'ont eu de cesse de conquérir, année après année, le grand public, en France mais aussi partout en Europe où elles se sont exportées. La 36e édition de ces Journées qui commencent ce samedi pour deux jours intenses revêt toutefois cette année un relief particulier pour au moins trois raisons.
La première, c'est le choc qu'a constitué l'incendie de Notre-Dame-de-Paris, survenu dans la toiture de la cathédrale le 15 avril dernier. L'émoi international qu'a provoqué la destruction de la « forêt » de chênes centenaires, les témoignages de soutien exprimés à la France partout dans le monde, l'élan de solidarité internationale pour reconstruire au plus vite l'édifice ont fait de la cathédrale meurtrie une « Notre-Dame du Monde » qui illustre combien le patrimoine français est consubstantiel à l'identité même de notre pays et constitue le ciment d'une cohésion nationale partagée.
La deuxième raison pour laquelle ces Journées du patrimoine 2019 apparaissent différentes des précédentes éditions, est le succès remporté par le loto du patrimoine initié en 2018 par Stéphane Bern et les jeux de grattages qui l'accompagnent. Ce ne sont pas tant les montants – modestes au vu des immenses besoins – collectés par ces opérations au profit de la Fondation du patrimoine qui importent, mais plutôt le fait ces jeux contribuent à financer la restauration d'un «petit» patrimoine. Vernaculaire, local et souvent rural, ce patrimoine-là qui mobilise au quotidien à son chevet de petites associations sans grands moyens, a toujours vécu à l'ombre des grands sites et monuments qui font la réputation et le prestige de la France à l'étranger. Les Journée du patrimoine ont toujours été l'occasion de saluer le travail de ces associations ; les jeux y ajoutent une reconnaissance désormais tout au long de l'année et non plus le seul espace d'un week-end.
Enfin, la troisième raison pour laquelle ces Journées 2019 sont particulières tient au choix du thème cette année : « arts et divertissement. » À côté des lieux de pouvoir, de religion ou de production industrielle, c'est ainsi tout un pan de notre patrimoine qui est mis à l'honneur, entre théâtres antiques et amphithéâtres romains, salles de spectacles ou de cinéma et arts du cirque, mais aussi temples du sport que sont hippodromes, piscines ou stades. L'entrelacement de ces patrimoines matériel et immatériel est au cœur de ce qui fait du patrimoine une véritable passion française.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 21 septembre 2019)