Accéder au contenu principal

Le scandale de trop

steak


Cette nouvelle affaire de faux steaks vendus à des associations caritatives résonne davantage encore en Occitanie qu'ailleurs dans le pays car notre région reste marquée par le scandale des lasagnes de bœuf à la viande de cheval qui avait éclaté en 2013 et éclaboussé non seulement une entreprise audoise jusqu'ici réputée, mais l'idée même que l'on se fait du bien-manger si cher au sud-ouest.

Ce nouveau scandale monte d'un cran dans l'ignominie et le cynisme et souligne deux aspects qui mériteront des réponses autant judiciaires que politiques.

Le premier concerne bien sûr les consommateurs finaux de ces produits, victimes de la tromperie d'un fournisseur français. En livrant des steaks polonais sans viande mais avec du gras, sans muscle mais avec de la peau à La Croix Rouge, aux Restos du Cœur, au Secours Populaire Français et à la Fédération française des banques alimentaires qui tous viennent en aide aux plus démunis d'entre nous, cet industriel ne peut qu'inspirer le dégoût tant il s'attaque ainsi à ce qui fait l'humanité et la dignité de chaque Français puisqu'il considère que les plus pauvres mériteraient moins que les autres des produits de qualité.

Le second aspect que soulève ce scandale est particulièrement problématique pour les autorités. À la faveur de l'affaire des lasagnes, on avait découvert que le marché international de la viande n'avait rien à envier... à celui des armes avec de multiples intermédiaires, l'intervention de «traders» opérant à Chypre, aux Pays-Bas ou en Roumanie, dans un contexte d'intense guerre des prix. L'opinion publique avait même découvert l'existence du «minerai de viande», terrible expression désignant un aggloméré de bas morceaux hachés pour plats préparés, tellement éloigné de la bonne viande de qualité. Les pouvoirs publics avaient affiché leur détermination à éclairer d'une lumière crue ce système très opaque, et promis un renforcement des contrôles pour mettre fin à ces pratiques. à l'ouverture du procès des lasagnes, l'ONG Foodwatch redoutait pourtant qu'un autre scandale du même type soit possible. Nous y voilà...

«Il est hors de question que ce type d'attitude se reproduise», a martelé hier la secrétaire d'état à l'économie Agnès Pannier-Runacher en annonçant que l'État allait saisir la justice et interpeller les autorités polonaises. Nécessaire mais loin d'être suffisant. Ce scandale impliquant, là encore, plusieurs pays, c'est bien à l'échelon de l'Union européenne qu'il faut agir pour tout remettre à plat, revoir les procédures d'agrément et de contrôle, réviser et augmenter les sanctions pénales pour dissuader les fraudes. Bref, rebâtir tout un système qui permette aux professionnels vertueux de ne pas subir les fautes de quelques uns, et aux consommateurs – quelle que soit leur situation sociale – de retrouver la confiance.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du samedi 8 juin 2019)

Posts les plus consultés de ce blog

Moine-soldat

Dans le marathon de l’examen de la réforme des retraites à l’Assemblée nationale, le calendrier a marqué une pause ce jeudi à l’occasion de la niche parlementaire du Parti socialiste. Une pause mise à profit par le gouvernement pour aller sur le terrain défendre une réforme toujours massivement rejetée par 7 Français sur 10. À l’avant-veille de la quatrième journée de manifestation appelée par l’intersyndicale, Elisabeth Borne et Gérald Darmanin se sont ainsi rendus hier à Neuville-en-Ferrain, dans le Nord, Olivier Dussopt à Toulouse, où il a notamment rencontré six lecteurs de La Dépêche du Midi au siège de notre journal pour répondre à leurs questions et leurs inquiétudes. Celui qui enchaîne à un rythme soutenu les interviews dans les matinales et défend depuis lundi son texte devant une Assemblée nationale survoltée s’est montré tel qu’en lui-même : un moine-soldat de la macronie. Moine, parce que le ministre connaît sur le bout des doigts le catéchisme de la réforme, son dogme du r

L'indécence et la dignité

C’est sans doute parce qu’elle avait le souriant visage de l’enfance, cheveux blonds et yeux bleus, parce qu’elle aurait pu être notre fille ou notre nièce, notre petite sœur ou notre cousine, une camarade ou la petite voisine. C’est pour toutes ces raisons que le meurtre barbare de la petite Lola a ému à ce point la France. Voir le destin tragique de cette bientôt adolescente qui avait la vie devant elle basculer à 12 ans dans l’horreur inimaginable d’un crime gratuit a soulevé le cœur de chacune et chacun d’entre nous. Et nous avons tous pensé à ses parents, à sa famille, à ses proches, à ses camarades de classe, à leur incommensurable douleur que notre solidarité bienveillante réconfortera mais n’éteindra pas. Tous ? Non, hélas. Dans les heures qui ont suivi le drame, certains ont instrumentalisé de façon odieuse la mort de cette enfant pour une basse récupération politique au prétexte que la suspecte du meurtre était de nationalité étrangère et visée par une obligation de quitter l

Bien manger

C’est un petit logo qui nous est devenu familier lorsque nous faisons nos courses. Impulsé par un règlement européen (INCO) de 2014, établissant des règles pour informer les consommateurs sur la déclaration nutritionnelle ou la liste des ingrédients d’un produit, le Nutri-Score, ses cinq lettres de A à E et ses cinq couleurs de vert à rouge, est désormais bien ancré dans le paysage. De plus en plus présent sur le devant des emballages, on peut même dire que c’est un succès européen puisqu’il est présent non seulement en France, qui l’a introduit en 2017, mais également en Belgique, en Allemagne, au Luxembourg, aux Pays-Bas, en Espagne et même en Suisse, qui ne fait pourtant pas partie de l’Union européenne. Face à des étiquettes qui livrent la composition des produits écrite en tout petits caractères difficilement lisibles, certains consommateurs s’étaient déjà tournés vers des applications comme Yuka. Avec un smartphone, il suffit alors de scanner le code-barres d’un produit pour en a