Accéder au contenu principal

Le bio pour tous

bio


C'est incontestablement un cap que vient de franchir l'agriculture française. En annonçant hier que la production agricole biologique a enregistré une «année record» en France en 2018, tandis que 10% des agriculteurs travaillent désormais en bio dans notre pays, l'Agence Bio acte clairement qu'il y a désormais une nouvelle donne agroalimentaire en France. Celle-ci devrait permettre d'atteindre l'objectif de 15% de la surface agricole en bio d'ici fin 2022. L'Occitanie est d'ailleurs en pointe pour y contribuer, puisqu'elle dispose du plus grand nombre de producteurs bio – les aides mises en place par la Région n'y sont certainement pas étrangères – et des départements comme le Gers sont devenus de véritables modèles.

Ce succès du bio concerne toute une filière qui a mis du temps à se structurer : les producteurs bien sûr, les PME de transformation et de distribution dont la croissance, très forte, se traduit par des retombées économiques et des créations d'emplois, et les consommateurs en bout de chaîne. Le bio, longtemps promu par des agriculteurs «alter», soutenu par quelques rares politiques visionnaires et par des consommateurs trop vite caricaturés hier en babacool ou aujourd'hui en bobos, a conquis les esprits. Les scandales sanitaires liés à l'usage intensifs de pesticides, l'envie d'une alimentation plus naturelle et le souhait de miser sur des circuits courts ont contribué, d'évidence, à créer un choc psychologique, une prise de conscience aujourd'hui partagée par de plus en plus de Français.

Cependant, il convient de ne pas céder à un enthousiasme béat et de considérer plusieurs écueils qui concernent les trois niveaux que sont les producteurs, les distributeurs et les consommateurs. Il serait ainsi particulièrement injuste de mettre à l'index les 90% de producteurs qui sont en agriculture conventionnelle. Les produits non-bio qu'ils proposent – et donc qui peuvent avoir recourt avec escient à l'aide de la chimie – peuvent parfaitement être de grande qualité, parfois dûment labellisés, et même s'inscrire davantage dans des circuits courts que des produits bio importés depuis le bout du monde...

Second écueil avec la distribution des produits bio. Ce marché de 10 milliards d'euros suscite la convoitise de la grande distribution. Entre rachat de réseaux pionniers, production et vente hors saison via des cultures sous serres, certaines enseignes, qui investissent massivement un marché marqué par une demande croissante des consommateurs, modifient en profondeur les pratiques du bio, au risque de fragiliser tout le secteur.

Enfin dernier écueil, pour le consommateur, qui se retrouve parfois perdu et freiné face à des prix souvent plus élevés et à la nébuleuse de labelsbio qui recèlent des zones d'ombre. Certains labels tolèrent, par exemple, jusqu'à 0,9 % d'OGM dans les produits bio, d'autres ne certifient pas que tel ou tel produit est dénué de tout pesticide, mais que le producteur a mis en œuvre les conditions pour y parvenir.

On voit que pour que le bio soit pour tous, des garde-fous sont nécessaires pour accompagner le formidable développement du secteur et faire en sorte que chaque consommateur puisse y accéder.

(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mardi 5 juin 2019)

Posts les plus consultés de ce blog

Grandiose !

  Cent ans après les JO de Paris de 1924, les XXXIIIes Jeux Olympiques d’été de l’ère moderne se sont ouverts hier dans la Capitale au terme d’une cérémonie d’ouverture exceptionnelle qui est entrée dans l’histoire en en mettant plein les yeux au monde entier. Les athlètes ont défilé non pas dans un Stade olympique mais en bateau, sur la Seine, sur un parcours rythmé par une mise en scène de toute beauté mettant en valeur la France, son patrimoine, son Histoire, ses talents, avant de rejoindre le Trocadéro devant une Tour Eiffel parée des anneaux olympiques. Nul doute que cette cérémonie réussie, émouvante, populaire, inédite, fera date en se rangeant dans la longue liste des défilés qui ont marqué les JO mais aussi l’histoire de notre pays, de la Fête de la Fédération du 14 juillet 1790 à celle pour le Bicentenaire de la Révolution française en 1989, en passant par la Libération de Paris dont on va bientôt célébrer les 80 ans. Cette cérémonie ponctue plusieurs années de préparatio...

Guerres et paix

La guerre menace encore une fois le Pays du Cèdre, tant de fois meurtri par des crises à répétition. Les frappes israéliennes contre le sud du Liban et les positions du Hezbollah ravivent, en effet, le spectre d’un nouveau conflit dans cette Terre millénaire de brassage culturel et religieux. Après quinze années de violence qui ont profondément marqué le pays et ses habitants (1975-1990), la paix est toujours restée fragile, constamment menacée par les ingérences étrangères, les divisions communautaires et une classe politique corrompue. La crise économique sans précédent qui frappe le pays depuis 2019, puis l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth en 2020, symbolisant l’effondrement d’un État rongé par des décennies de mauvaise gouvernance, ont rajouté au malheur de ce petit pays de moins de 6 millions d’habitants, jadis considéré comme la Suisse du Moyen-Orient. Victime d’une spectaculaire opération d’explosion de ses bipeurs et talkies-walkies attribuée à Israël, le Hezbollah – ...

Vaccin et vigilance

La résurgence de la coqueluche en France comme ailleurs en Europe a de quoi inquiéter. En France depuis le début de l’année, un total provisoire de 28 décès a été rapporté à Santé Publique France, dont 20 enfants (18 de moins de 1 an) et 8 adultes (de 51 à 86 ans mais dont la coqueluche n’était pas indiquée comme première cause de décès). La circulation de la bactérie Bordetella pertussis, principale cause de la coqueluche, est si importante que les autorités s’attendent à de nouveaux cas à venir dans les prochains mois. Car la coqueluche est extrêmement contagieuse, une personne contaminée pouvant transmettre la maladie à 15 autres en moyenne… Et si elle a longtemps été considérée comme une maladie de la petite enfance, elle peut être sévère à tous les âges, voire mortelle pour les nourrissons, non ou partiellement vaccinés, et les personnes à risque telles que les femmes enceintes et les personnes âgées. Ce n’est pas la première fois que l’on est confronté à une résurgence de la coqu...