Il ne se passe plus une année sans qu’une affaire de scandale alimentaire ne vienne défrayer la chronique et mettre à l’épreuve des familles. Parfois elles sont sans gravité pour la santé humaine lorsqu’il ne s’agit que de tromperie sur la réalité des ingrédients ou lorsque l’intoxication provoquée reste bénigne. Mais il arrive aussi que ces contaminations alimentaires, aux bactéries E. coli ou aux salmonelles, conduisent à être gravement malade après avoir consommé un produit d’une grande marque connue acheté en supermarché, ou après avoir déjeuné dans un restaurant qu’on croyait au-dessus de tout soupçon. Et parfois, hélas, cela va plus loin, lorsque les manquements conduisent à la mort, comme celle du petit Kelig, ce petit garçon de deux ans et demi décédé il y a un an après avoir mangé un bout d’une pizza Buitoni.
Si le risque zéro en matière de contamination alimentaire n’existe évidemment pas, tout doit être fait pour le minimiser. Cela n’est pas toujours le cas et les affaires de ces dernières années touchant des producteurs, l’industrie agro-alimentaire, des restaurants montrent que certains s’affranchissent sans vergogne des règles d’hygiène et de sécurité sanitaire pourtant très claires. Tous les Français ont en mémoire les images chocs de l’usine Buitoni de Caudry transmises par un ex-employé.
Ce dernier grand scandale a mis le doigt sur les dysfonctionnements des contrôles sanitaires. Le ministère de l’Économie a beau indiquer ce mois-ci qu’entre mars 2021 et février 2023, près de 6 000 produits ont été concernés par un rappel, il n’en reste pas moins que les contrôles sont très largement insuffisants. Leur nombre chez les professionnels de l’agroalimentaire a baissé de 24 % entre 2011 et 2016, dénonçait en 2019 un rapport du Bureau Européen des Unions de consommateurs (BEUC) qui appelle, en France comme dans les autres pays, à revoir et muscler la surveillance.
« Le système favorise ces scandales alimentaires pourtant évitables », selon l’association Foodwatch, qui dénonce le principe des autocontrôles que font les géants de l’agroalimentaire, la faiblesse des sanctions et le manque de moyens. Car les contrôles ne sont pas assez nombreux faute de contrôleurs. En 2022, les rangs de la Répression des fraudes (DGCCRF) comptaient 442 agents de moins que dix ans auparavant, et le nombre des inspections sur la sécurité sanitaire des aliments effectuées par la Direction générale de l’alimentation (DGAL) a diminué de 33 % entre 2012 et 2019 ! Gageons que la réforme en cours de fusion de la DGCCRF et de la DGAL aura les moyens financiers et humains pour gagner en efficacité et permettre aux consommateurs de retrouver la confiance.
Au-delà de ces affaires, ces contaminations alimentaires s’inscrivent dans un champ plus large, celui de la santé globale, que recouvre le concept de One Health (Une seule santé). Derrière ce terme, apparu il y a une vingtaine d’années, se trouve la prise en compte de l’interdépendance entre les santés humaine, animale, végétale et la protection de l’environnement. La maladie de la vache folle ou l’épidémie de Covid-19 en sont la parfaite illustration. L’approche One Health suppose une large collaboration de tous les acteurs pour trouver des solutions qui répondent à la fois à des enjeux de santé publique et aux enjeux environnementaux. C’est là l’un des grands défis de notre siècle.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du dimanche 26 février 2023)