Ce lundi, un élevage de canes et de canards a été touché par l’influenza aviaire à Aignan, à l’ouest du Gers. Un abattage préventif était prévu dès hier. Nouvel épisode de cette épizootie de grippe aviaire qui, depuis plusieurs années, frappe l’Europe, plus dévastatrice que jamais, et touche désormais près de 37 pays. L’épizootie semble même avoir traversé l’Atlantique, car des éleveurs américains et canadiens ont dû procéder eux aussi à de nombreux abattages de volailles.
Ainsi, alors que les hommes se débattent avec une épidémie de Covid-19 dont le rebond en Chine est inquiétant, les animaux sont victimes d’une grippe qui aboutit à prendre des mesures drastiques. Les autorités sanitaires européennes ont indiqué la semaine dernière que plus de 50 millions d’oiseaux avaient été abattus dans les seuls élevages infectés entre octobre 2021 et septembre 2022. En France, du 1er août au 21 décembre, 3,3 millions d’animaux ont déjà été abattus, dont une moitié de canards ; deux millions l’ont été rien qu’en ce mois de décembre, selon le ministère de l’Agriculture.
Derrière ces chiffres impressionnants, il y a la détresse des éleveurs – et notamment ceux des petites exploitations familiales – qui, du jour au lendemain, et en dépit de toutes les précautions et protocoles pris selon les directives des autorités, voient leurs animaux tués pour éviter d’autres contaminations dans leur secteur. Un vrai crève-cœur pour toute une filière qui subit par ailleurs les attaques des défenseurs du bien-être animal. Aujourd’hui, elle attend une légitime solidarité nationale et européenne via des indemnisations décentes et, surtout, une accélération du calendrier pour mettre en place la vaccination dont on parle depuis des années.
À ce stade, il n’existe aucun vaccin suffisamment efficace et disposant d’une autorisation de mise sur le marché, et encore moins de réglementation européenne autorisant la vaccination. « En cinq ans, trois crises sanitaires dues à l’influenza aviaire hautement pathogènes (IAHP) ont généré des coûts considérables pour les professionnels et l’État, des pertes de marché à l’export ainsi qu’une moindre attractivité pour les entreprises mondiales de la génétique. L’abattage de millions de volailles se heurtera tôt ou tard à des questions d’acceptabilité sociétale. Enfin, même si le virus H5N8 actuel présente un potentiel zoonotique faible, l’IAHP représente une menace de santé publique qui ne doit pas être négligée », résumait le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux dans un rapport publié en juillet 2021…
Il est aujourd’hui plus que temps d’accélérer. Dès que les résultats des expérimentations de vaccins menées par cinq pays européens seront connus au premier trimestre 2023, l’Europe devra se doter d’une stratégie vaccinale claire et rapide, et prévenir toute distorsion de concurrence qui surviendrait avec les pays refusant les volailles vaccinées et donc des avis scientifiques parfaitement établis.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du mercredi 28 décembre 2022)