Il n’y a pas que l’épidémie de Covid-19 qui fonctionne par vagues. Le marché de l’immobilier connaît lui aussi des vagues, des flux et reflux entre offre et demande, neuf et ancien, achat et location, facilité ou durcissement dans l’obtention d’un crédit immobilier auprès des banques, modulation des taux d’intérêt, apaisement ou tension dans les relations entre propriétaires et locataires, etc. Autant dire que l’immobilier est un domaine habitué à la volatilité, aux circonstances, à l’actualité.
Lorsque l’épidémie de Covid a submergé le monde en 2020, la vague épidémique a percuté la vague immobilière. Enfermés chez eux en raison des confinements, les Français ont pu alors mesurer toute l’importance d’avoir un logement qui corresponde à leurs besoins et leurs envies. Ceux qui n’avaient pas la chance d’avoir une maison avec jardin mais vivaient dans des appartements exigus qui leur convenaient lorsqu’ils pouvaient travailler à l’extérieur, ont alors construit ou accéléré le projet d’acquisition qui était dans l’air depuis un moment mais dont la réalisation était sans cesse repoussée. Cette envie de maison avec jardin a même conduit certains à s’éloigner des grandes villes pour s’établir dans les villes moyennes dont on redécouvrait alors les atouts, au premier rang desquels leur taille humaine. Les taux d’intérêt bas et la reprise économique post-Covid ont ensuite constitué le cadre idéal pour réaliser enfin ce rêve de devenir propriétaire.
Mais cette vague d’optimisme a commencé à refluer avec le déclenchement de la guerre en Ukraine le 24 février 2022 et ses conséquences économiques en cascade : le retour d’une inflation galopante et la hausse des taux d’intérêt. À cette situation moins avantageuse, mais pas bloquante, s’est alors ajouté un bouleversement supplémentaire : le taux d’usure censé protéger les consommateurs – qui correspond au taux annuel effectif global (TAEG) maximal au-delà duquel une banque ne peut prêter de l’argent – est devenu un frein aux projets immobiliers de nombreux Français qui ont essuyé des refus de prêts… Résultat : après la hausse survenue entre fin 2020 et le 3e trimestre 2021, le volume annuel de transactions s’est orienté à la baisse depuis le 4e trimestre 2021 comme viennent de le montrer les Notaires de France dans leur bilan immobilier 2022. Après l’enthousiasme post-Covid, la morosité a ainsi gagné 2022 et pourrait laisser place à l’inquiétude en 2023.
Car le logement, l’un des principaux postes de dépenses des foyers, va connaître dans les mois qui viennent d’autres secousses, notamment celles induites par la transition énergétique. La loi Climat et Résilience qui veut à raison lutter contre les passoires thermiques va chambouler un peu plus le marché immobilier français provoquant une forte décote sur les logements énergivores (F ou G) et des transferts de ceux-ci du marché de la location vers le marché transactionnel avec de fortes disparités sur le territoire national.
2023 sera assurément une année charnière.
(Editorial publié dans La Dépêche du Midi du lundi 26 décembre 2022)